Rome: Benoît XVI raconte sa vocation sacerdotale aux jeunes du diocèse de Rome
Rome, 7 avril 2006 (Apic) Le pape Benoit XVI a raconté, dans la soirée du 6 avril 2006, comment il avait discerné son appel à la prêtrise, lorsque adolescent, il s’était trouvé face à l’idéologie « inhumaine » du nazisme allemand. Le pape répondait aux questions posées par les jeunes du diocèse de Rome, sur la façon de vivre leur foi chrétienne dans le monde contemporain.
Comme chaque année, des dizaines de milliers d’entre eux étaient rassemblés Place Saint-Pierre pour une rencontre diocésaine précédant le dimanche des Rameaux et la JMJ (Journée mondiale de la jeunesse).
« J’ai grandi dans un monde très différent » du vôtre, a expliqué le pape interrogé sur l’origine de sa vocation. « D’une part, il y avait encore la situation du christianisme où il était normal d’aller à l’église comme d’accepter la foi comme Révélation de Dieu et de chercher à vivre selon elle. D’autre part, il y avait le régime nazi, où il avait été dit à haute voix que dans la nouvelle Allemagne il n’y aurait plus de prêtres ni de vies consacrées, que nous n’en avions plus besoin », a-t-il rapporté. C’est « justement devant la brutalité de ce système, de ce visage inhumain, que j’ai compris qu’il y avait besoin de prêtres », a-t-il alors confié.
« Voir cette culture anti-humaine m’a confirmé que le Seigneur, l’Evangile, la foi nous montrent le juste chemin » et que « nous devons oeuvrer pour que ce chemin l’emporte », a-t-il alors lancé sous les applaudissements des dizaines de milliers de jeunes assemblés sous le soleil couchant. Si « la vocation à la prêtrise a crû presque naturellement en moi, sans grand événement de conversion », « deux choses m’ont aidé dans ce cheminement », a renchéri Benoît XVI, citant son vieil amour de la liturgie et de la théologie.
Le pape a cependant admis avoir eu des doutes. « Naturellement les difficultés ne pouvaient manquer ». « Je me suis demandé si j’aurais réellement la capacité de vivre toute ma vie dans le célibat », a-t-il ainsi avoué. Il a aussi expliqué que se sachant plus théorique que pratique, il avait craint de ne pas savoir se rendre « toujours disponible pour les jeunes, les personnes âgées, les malades et les pauvres », ayant conscience que « la théologie ne suffisait pas pour être prêtre ». « Mais le Seigneur m’a aidé » tout comme « la compagnie d’amis, de bons prêtres et de maîtres », a-t-il précisé.
Le premier des sacrements
Interrogé sur la responsabilité dans la vie affective demandée par l’Eglise, Benoît XVI est revenu sur sa conception de l’amour conjugal exprimé dans son encyclique « Deus caritas est » dont des extraits ont été lus au cours de la veillée. Pour lui, le mariage est « le premier des sacrements » créés par Dieu, sa définition se trouvant dès les premières pages de la Bible, dans laquelle il est dit, « juste après la création de l’homme », que celui-ci « quittera son père et sa mère, suivra sa femme et que tous deux ne feront plus qu’une seule chair, une seule existence ». « Le sacrement du mariage n’est donc pas une invention de l’Eglise, a expliqué le pape, il est en réalité co-crée avec l’homme comme tel, comme dynamisme de l’amour dans lequel l’homme et la femme se trouvent et ainsi trouvent aussi le Créateur qui les a appelés à l’amour ».
Pour Benoît XVI, si les cultures, « entachées de l’erreur humaine », ont proposé et proposent encore d’autres modèles que celui du mariage chrétien, elles reviennent nécessairement à celui de la « monogamie », car il est inscrit dans la nature même de l’homme. « Nous pouvons voir dans ce monde, malgré de nombreux autres modèles de vie, de nombreuses familles chrétiennes qui vivent avec fidélité et avec joie la vie de l’amour indiqué par le Créateur », a-t-il aussi souligné. Et de se réjouir qu’ainsi « croit une nouvelle humanité ».
Pour le pape, cette « affection » fidèle dans le mariage entre un homme et une femme peut « devenir possible, même si cela paraît impossible dans le monde aujourd’hui », si l’on vit en communion avec le Christ et son Eglise. Ainsi « nous vivons de ce que le Créateur nous a donnés et cela est réellement une vie heureuse », a-t-il estimé.
Discipline et renonciations
Concernant les exigences requises par ce modèle chrétien, le pape a fait une analogie avec le monde du sport. « Pour arriver à un grand succès dans le monde du sport, il faut de la discipline et des renonciations. Mais à la fin, cela se couronne par un succès, par l’atteinte d’un but souhaitable ». Il en va ainsi pour la vie, « le devenir homme selon le dessein de Jésus exige des renonciations qui ne sont pas une chose négative, mais qui nous aident à vivre comme des hommes avec un coeur nouveau et vivre une vie vraiment humaine et heureuse », a alors estimé Benoît XVI.
« Comme il existe une culture consumériste qui veut nous empêcher de vivre selon le dessein du Créateur, nous devons avoir le courage de créer des îles, des oasis et des grands terrains de culture catholique où l’on vive le dessein du Créateur ! », a alors lancé le pape en dénonçant le mode de vie occidental contemporain. A plusieurs reprises, il est d’ailleurs revenu dans ses interventions sur « le sécularisme » contemporain qu’il a fortement critiqué.
« Le grand défi de notre temps est le sécularisme, la façon de présenter le monde comme si Dieu n’existait pas, de réduire Dieu au privé, à un sentiment, mais qui ne serait pas une réalité objective », a-t-il ainsi affirmé. « Avec cette vision qui se présente comme scientifique, qui est de ne reconnaître que ce qui est vérifiable par expérimentation, on lacère la société », car « chacun suit son projet et à la fin chacun se retrouve contre l’autre », a-t-il estimé.
Dans ses réponses aux 5 questions qui lui étaient posées par 5 jeunes étudiants au nom de tous ceux présents sur le parvis de la basilique vaticane, Benoît XVI a aussi expliqué en quoi le christianisme avait fait « l’option de la priorité de la raison créatrice au début de tout et principe de tout », de cette « priorité de la liberté ». Il a ainsi rejeté la seconde option possible, celle de « la priorité de l’irrationnel selon laquelle tout ce qui fonctionne sur la terre et dans nos vies serait seulement occasionnel et un produit de l’irrationnel ».
Si « le vrai problème contre la foi me semble être le mal dans le monde », dans le sens de sa compatibilité « avec la rationalité du Créateur », a-t-il alors expliqué, il a répondu que c’est là où « nous avons besoin du Dieu qui s’est fait chair et qui nous montre qu’il n’est pas seulement une raison mathématique mais que cette raison originaire est aussi amour ».
Rencontre colorée
Interrogé enfin sur la Parole de Dieu, thème de la 21e JMJ ’Une lampe sur mes pas, ta parole, une lumière sur ma routé, le pape a recommandé aux jeunes de lire la Bible non pas comme un livre « historique quelconque » mais « vraiment comme la Parole de Dieu, c’est-à-dire en dialogue avec Dieu ». Il est aussi nécessaire selon lui de s’aider des travaux des grands maîtres de la Lectio Divina, comme le cardinal Martini. Benoît XVI a aussi recommandé de lire l’Ecriture sainte « en compagnie d’amis qui sont en chemin avec moi et qui cherchent ensemble avec moi la vie avec le Christ ». Ainsi « peu à peu, on entre de plus en plus dans l’Ecriture sacrée et le Seigneur nous parle réellement aujourd’hui », a-t-il conclu, différenciant pour cela la Bible du Coran.
La célébration de la rencontre diocésaine des jeunes autour du pape a commencé à 17h15 par des chants, des témoignages d’artistes et de jeunes catholiques. C’est à 18h que Benoît XVI est arrivé avec sa papamobile, vêtu de sa cape rouge, sous les chants africains et les applaudissements de la foule. Après avoir fait le tour de la Place Saint-Pierre, puis écouté le message d’accueil du cardinal Ruini, vicaire de Rome, d’une étudiante romaine et le témoignage de la soeur du père Andrea Santoro, assassiné en février dernier en Turquie, le pape s’est prêté au jeu des questions de cinq jeunes autour du thème de la 21e JMJ.
Avec amusement et intérêt, Benoît XVI a improvisé de longues réponses sous les applaudissements fréquents des jeunes. Au terme de la conversation, il a salué leurs représentants, leur confiant symboliquement des Bibles. Puis, suivant la croix des JMJ et l’icône « Salus Populus Romani » portés par des jeunes, le pape est descendu se recueillir sur la tombe de Jean Paul II pour rendre hommage au pape des jeunes, mort il y a un an. La célébration a pris fin dans le recueillement vers 20h. (apic/imedia/ar/pr)
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