Des jeunes apprennent à gérer les conflits par la non-violence

Broc: Le «Village de la Paix» fête son quart de siècle d’existence

Jacques Berset, agence Apic

Broc, 28 mai 2006 (Apic) Au pied de la Dent de Broc, à deux pas du Moléson et du Château de Gruyères qui marquent l’horizon, se dresse depuis une décennie le «Village de la Paix», qui fête ce week-end les 25 ans de sa fondation. Cette initiative venue d’une Suisse centrale imprégnée de l’esprit pacifiste de saint Nicolas de Flue a désormais poussé ses racines au coeur de la Gruyère.

Créé en 1981 au Flüeli, ce lieu mythique sur le plateau au pied des montagnes obwaldiennes où souffle encore l’esprit de l’ermite du Ranft, le «Friedensdorf» fut à l’origine une initiative de deux associations chrétiennes pour enfants et jeunes gens (Blauring et Jungwacht) implantées en Suisse alémanique.

Après une quinzaine d’années au Flüeli-Ranft, les Soeurs de Sainte Dorothée, qui avaient mis les locaux de leur internat à disposition du «Friedensdorf», mirent un terme à la collaboration avec ces militants pour la non-violence. C’est que leur présence ne passait pas inaperçue: on y a même offert la possibilité d’une «école de recrue alternative» en 1984. L’hébergement de familles kurdes en grève de la faim se termina en 1991 par leur expulsion violente par la police .

Il fallut donc trouver de nouveaux locaux pour le «Village de la Paix», et l’occasion se présenta après des recherches intensives. Ce fut Broc, où la propriété des Pères de la Salette était à vendre et à rénover. Le nouveau «Village de la Paix » fut inauguré à la Pentecôte 1997. Il a fallu certes plusieurs années pour que la petite communauté, essentiellement composée d’Alémaniques, soit acceptée dans ce coin de la Gruyère, mais il semble aujourd’hui que la greffe a bien pris.

Encore mieux se faire connaître en Suisse romande

«On aimerait toutefois recevoir davantage de jeunes du canton de Fribourg. Peut-être que les paroisses trouvent nos prix trop élevés, mais nous devons défrayer des animateurs professionnels. Une journée d’animation coûte 500 francs pour 10 personnes, et 30 francs par personne supplémentaire», souligne Lucienne Devaud, la secrétaire du Village.

Avec la gérante Andrea von Arx-dell’Avo, le concierge Ruedi von Arx, et la comptable Odile Schuwey (qui habite à Bellegarde), Lucienne Devaud, de Broc, fait partie de l’équipe qui reçoit les hôtes sur place. Les animateurs – comme le Fribourgeois André Birbaum, le chef du projet «Jeunes pour la non-violence» et étudiant en psychologie clinique à l’Université de Fribourg – sont défrayés pour un temps partiel. La Saint-Galloise Sibylle Ackermann, théologienne morale et biologiste ainsi qu’animatrice pour le projet «Jeunes pour la non-violence», gagne sa vie chez son employeur principal, une boîte de communication et de relations publiques.

Un budget annuel approchant les 400’000 francs

C’est qu’avec un budget annuel approchant les 400’000 francs – y compris les réparations et rénovations apportées aux bâtiments – on ne peut pas faire des folies. Le projet est porté par une association d’environ 180 membres, dont une trentaine sont vraiment actifs. Certains prennent même sur leur temps libre pour prêter main forte aux chantiers de rénovation, auxquels participent également des bénévoles du Service Civil International. Le «Village de la Paix» accueille également des «civilistes» qui ont choisi cette alternative au service militaire.

Si, à l’époque, entre 3’000 à 5’000 jeunes passaient annuellement au Flüeli, ils sont 2’000 à avoir participé ces deux dernières années au projet «Jeunes pour la non-violence», placé depuis l’été 2000 sous le patronage de l’UNESCO. Les participants ont entre 13 et 17 ans et viennent principalement de Suisse alémanique, mais également des cantons de Vaud et du Valais. Des groupes de confirmands de Broc et de Charmey sont déjà venus, et des contacts ont étés pris avec les CO de Bulle et de Fribourg. «Les discussions sont ouvertes et nous attendons leur décision», note Lucienne Devaud.

Une maison d’hôtes qui accueille toute l’année

A côté de ce projet, il faut noter que la maison (50 lits) est quasiment louée toute l’année: des groupes de 30 à 50 personnes hébergés au Village peuvent – s’ils le désirent – profiter des animations du «parcours de la paix» dispersées sur la propriété. Des écoles primaires et secondaires viennent également à Broc pour leur traditionnel «camp vert», sans parler de groupes de théâtre, de chant ou de musique, qui profitent des divers locaux et de la scène.

«Si certains groupes profitent avant tout de l’hébergement, d’autres participent durant leur séjour à une journée d’animation. Ils se posent inévitablement des questions, et partent souvent imprégnés de notre esprit de paix», souligne Sibylle Ackermann. «Notre message, c’est que la paix peut être apprise, comme quand on apprend à conduire une voiture, cela prend du temps. C’est pareil pour apprendre à maîtriser les conflits, il faut réagir constructivement. C’est un peu cela notre pédagogie», ajoute André Birbaum.

Et la qualité du travail fourni par le «Village de la Paix» est reconnue, par exemple par la Fédération Education et Développement (FED). Une éventuelle collaboration avec l’Association suisse de football (ASF) pour développer un programme de prévention à la violence, avec les équipes et les entraîneurs de foot, démontre que l’association et son projet sont sollicités comme centre de compétence en matière de résolution de conflits. En plus des animations sur place, les collaboratrices et collaborateurs du projet ont conduit avec succès des projets d’école sur les thèmes des conflits, de la violence et du racisme.

Vendredi soir, «Le Village de la Paix» attendait quelques 200 jeunes du coin pour écouter des groupes de musique locaux comme «Regard du Nord» et «Sans Cible», tandis que la cérémonie officielle en présence de représentants des autorités locales, politiques et religieuses, s’est déroulée samedi soir, juste avant le concert avec le groupe Duenda, qui a offert un voyage musical à travers l’Europe. (apic/be)

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