Pie XII a-t-il sciemment éliminé un discours de Pie XI?

Rome: La polémique sur la béatification de Pie XII relancée

Paris/Rome, 1er juin 2007 (Apic) Pie XII a-t-il sciemment éliminé le discours de Pie XI contre le fascisme et le nazisme? Un ouvrage sur le rôle joué par le futur Pie XII face au fascisme et au nazisme relance la polémique sur sa béatification, indique vendredi le quotidien catholique français « La Croix »

« Pie XI contre Pie XII. » Depuis quelques jours, au Vatican comme en Italie, la polémique fait rage par journaux interposés, écrit de Rome Isabelle de Gaulmyn La sortie, mercredi 30 mai, d’un livre d’une historienne reconnue, Emma Fattorini, Pie XI, Hitler et Mussolini relance le débat.

S’appuyant sur des archives du Vatican récemment mises à disposition du public pour les années 1936-1939, l’auteur montre un pape de plus en plus exaspéré par l’évolution des régimes de Mussolini et de Hitler, et isolé dans cette révolte au sein de la Curie: notamment de son propre secrétaire d’État, le cardinal Eugenio Pacelli, futur Pie XII, partisan d’une attitude plus diplomatique.

Selon la journaliste de « La Croix », l’historienne met surtout au jour un document selon lequel le cardinal Pacelli a ordonné la destruction des épreuves et des « plombs » (servant à l’impression) d’un discours que Pie XI voulait prononcer le 11 février 1939, condamnant fortement le régime fasciste.

Un discours auquel Pie XI pensait depuis longtemps, et tenait à donner une certaine solennité, en convoquant l’ensemble de l’épiscopat italien et en le prononçant pour le dixième anniversaire des accords du Latran signés avec Mussolini. Mais le pape meurt la veille. Des rumeurs d’empoisonnement ont couru, que rien ne peut prouver : le pape avait alors 82 ans, et il était malade.

Une destruction qui allait de soi?

Eugenio Pacelli, qui sera élu pour lui succéder sous le nom de Pie XII, a-t-il sciemment détruit ce discours ? La réponse à cette question revêt une importance politique évidente après le feu vert, donné le 8 mai par la Congrégation des causes des saints, à la première étape de sa béatification. Une béatification contestée par ceux qui reprochent à Pie XII son « silence » face à la Shoah.

Pour l’historien Giovanni Maria Vian, qui signe dans le quotidien catholique Avvenire une critique sévère du livre d’Emma Fattorini, « cette destruction allait de soi » et n’est pas significative. Quand un pape meurt, le secrétaire d’État perd de facto son poste et n’est donc plus rien.

C’est alors au cardinal camerlingue d’exécuter les dernières volontés du défunt. Or, relève « La Croix », Pacelli était à la fois secrétaire d’État et camerlingue (c’est aussi le cas du secrétaire d’État actuel, le cardinal Bertone). Le camerlingue est chargé de détruire les épreuves de tous les textes en préparation sur lesquels le pape n’a pu apposer sa signature. « Mais le discours lui-même a été conservé », explique Giovanni Maria Vian. D’ailleurs, Jean XXIII le rendra public vingt ans plus tard, en 1959.

« Dommage que la Curie ait abandonné la pratique à laquelle elle s’est tenue jusqu’en 1871, de rester extrêmement prudente avant de canoniser un pape, regrette Giovanni Maria Vian. Le risque est que cette canonisation pousse les uns et les autres à utiliser les papes comme bannière politique ». Ce qui semble bien parti, aujourd’hui, avec Pie XII, conclut Isabelle de Gaulmyn. (apic/cx/idg/pr)

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