France: Les protestants «consternés» par le document du Vatican sur la doctrine de l’Eglise

Vives et violentes critiques un peu partout

Paris, 11 juillet 2007 (Apic) Les protestants sont « consternés » par le document du Vatican publié mardi à Rome sur la doctrine de l’Eglise, écrit l’Agence oecuménique ENI. Qui rappelle que le document, autorisé par le pape Benoît XVI, réaffirme la doctrine catholique romaine selon laquelle les dénominations protestantes ne sont pas des Eglises « au sens propre », a été accusé de retarder la recherche de l’unité chrétienne. Les critiques sont vives, pour ne pas dire « violentes ».

« Une revendication exclusive considérant l’Eglise catholique romaine comme seule et unique Eglise de Jésus Christ, comme nous le lisons dans le communiqué … va à l’encontre de notre vocation chrétienne à l’unité dans le Christ, » a déclaré le pasteur Setri Nyomi, secrétaire général de l’Alliance réformée mondiale, basée à Genève. L’Alliance regroupe 214 Eglises issues de la réforme protestante du XVIe siècle.

Le pasteur Nyomi réagissait à la publication le 10 juillet à Rome du intitulé « Réponses à des questions concernant certains aspects de la doctrine sur l’Eglise ».

Ce document affirme que les dénomination protestantes issues de la Réforme « n’ont pas conservé l’authentique et intégrale réalité du Mystère eucharistique … [et] ne peuvent pas être appelées ’Eglises’ au sens propre selon la doctrine catholique. »

A Genève également, dans une réponse qui, selon certains observateurs, pourrait être un signe de mécontentement vis-à-vis des récents développements, le Conseil oecuménique des Eglises (COE) a affirmé « l’importance du dialogue oecuménique authentique et du témoignage chrétien commun sur les problèmes auxquels le monde est confronté aujourd’hui ».

Le COE regroupe 347 Eglises, principalement issues des traditions protestantes, anglicanes et orthodoxes. L’Eglise catholique n’en est pas membre, mais a des représentants dans certains de ses organes.

Dans un communiqué utilisant le mot « catholique » au sens d’ »universel », le COE a déclaré: « Chaque église est l’Eglise catholique et non pas seulement une partie d’elle. Chaque Eglise est l’Eglise catholique, mais elle n’en est pas la totalité. Chaque Eglise réalise sa catholicité lorsqu’elle est en communion avec les autres Eglises ».

Un « aveu de faiblesse »

Au Vatican, la Congrégation pour la doctrine et la foi a déclaré que ce document avait été réalisé par elle afin de corriger « des études parfois non exemptes d’erreurs et d’ambiguïtés ». « Je vois ce texte, en fait, comme un aveu de faiblesse », a déclaré le pasteur Marcel Manoël, président du Conseil national de l’Eglise réformée de France, à la correspondante d’ENI.

« Nous attendons autre chose d’un partenaire catholique qui continue de se comprendre comme le seul détenteur de la vérité; nous attendons un vrai dialogue où chacun pourrait aussi formuler même ses reproches », a ajouté le pasteur.

Pour Jean-François Collange, président du conseil de l’Union des Eglises protestantes d’Alsace et de Lorraine, « on n’en voudra pas au pape de rappeler une vérité que l’on avait intégrée depuis la Réforme elle-même. Mais on s’étonnera du ton condescendant, nombriliste et plutôt hégémonique avec lequel il s’exprime ».

Pourtant, selon le théologien luthérien André Birmelé, expert oecuménique, « c’est beaucoup de bruit pour rien. Le texte est à destination interne, fait pour rassurer ».

A Rome, le théologien protestant italien Paolo Ricca s’est cependant demandé s’il y avait encore un intérêt à dialoguer avec l’Eglise catholique : « Avec de nombreux catholiques, oui, mais avec l’institution romaine, peut-être pas », a-t-il déclaré au correspondant d’ENI.

« Acte délibéré »

En 2005, dans la première homélie qui avait suivi son élection, le pape Benoît XVI avait déclaré qu’il était « disposé à faire tout ce qui est en son pouvoir pour promouvoir la cause fondamentale de l’oecuménisme ». Pourtant, Wolfgang Huber, principal évêque protestant d’Allemagne, a déclaré qu’avec ce document récemment publié, « les espoirs d’évolution de la situation oecuménique ont été une fois de plus reportés à un avenir lointain ». L’évêque Huber a indiqué que le récent document reprenait le message contenu dans la déclaration « Dominus Iesus », publiée en 2000 et rédigée par le cardinal Joseph Ratzinger avant qu’il ne devienne pape, en 2005.

Certains théologiens bien disposés à l’égard de l’oecuménisme avaient par la suite suggéré que « Dominus Iesus » était le résultat d’une négligence, a déclaré l’évêque Huber, chef de l’Eglise évangélique d’Allemagne. « Personne ne peut plus parler de négligence » aujourd’hui, a déclaré l’évêque. A ses yeux, « il s’agit d’un acte délibéré ». (apic/eni/pr)

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