Une équipe d’anthropologues à l’oeuvre pour aider les famille
Buenos Aires, 27mars(APIC) La question des violations des droits de
l’homme et des disparus, victimes des dictatures militaires en Argentine,
est une nouvelle fois au centre des préoccupations pour des milliers de
personnes avec l’apparition de scientifiques chargés de rechercher et
d’identifier des cadavres dans les cimetières municipaux en Argentine. Une
équipe d’anthropologues est à l’oeuvre. Elle est chargée de l’identification des restes des disparus. Mais son activité s’étend à d’autres pays
d’Amérique latine dans lesquels des militaires ont ou font encore, à l’instar de ceux d’Argentine, « disparaître » des milliers de personnes.
Le retour à la démocratie en Argentine ouvre un champ d’activité hélas
macabre, mais indispensable. Dans ce pays comme dans d’autres de ce contiennent par exemple, plus de 100’000 personnes ont disparu, victimes de
régimes répressifs. Aujourd’hui en Argentine, une « Equipe d’anthropologie
légiste » (EAAF) se consacre à l’investigation systématique des restes d’inconnus disparus durant la dictature de 1976 à 1983. Six anthropologues,
deux médecins, une avocate, deux techniciens en informatique, tous âgés de
moins de 40 ans complètent ainsi leur formation professionnelle.
« Quand le gouvernement démocratique du président Alfonsin est arrivé au
pouvoir, les juges ont commencé à réclamer l’exhumation des cadavres des
fosses marquées des lettres NN (no name). Mais on a très mal travaillé et
du matériel d’importance fondamentale s’est bêtement perdu », raconte Alejandro Inchaurregui, médecin de l’équipe. « Nous avons alors commencé notre
tâche, d’abord pour notre compte, ensuite à la demande des familles des
disparus, et nous avons pu classer 500 cadavres », ajoute-t-il.
L’EAAF a participé récemment à l’exhumation de sept corps au cimetière
de Boulogne, une localité située dans la province de Buenos Aires, ce qui a
permis l’arrestation de l’ex-chef de la police, le général Ramon Camps, et
du général Santiago Riverons. Les scientifiques ont découvert notamment un
bébé de six mois qui avait été enterré séparément de ses parents et de ses
frères de 4 et 5 ans, abbattus eux par des balles tirées dans la bouche.
Le coup de pouce de l’Entraide protestante suisse
« Au début, on travaillait sans aucune sorte d’aide économique, ce qui a
retardé nos efforts, rappelle pour sa part Morris Tidball, autre membre de
l’équipe. Notre premier appui est venu de Suisse, grâce à Thomas kukler, de
l’Entraide protestante. Ensuite, d’autres organisations d’entraide et de
droits de l’homme de divers pays sont venus offrir leur concours ». On se
souvient aussi de la disparition en Argentine du jeune étudiant suisse Alexis Jaccard, en 1978.
L’EAAF a aussi été appelée par les familles des disparus au Honduras, en
Bolivie, au Pérou, au Chili et aux Philippines pour des cas similaires. Aujourd’hui, l’EAAF forme pour toute l’Amérique latine des groupes d’anthropologues décidés à entreprendre courageusemenet cette longue et douloureuse
besogne. En particulier les techniques de classification et d’échantillonnage des os.
« Les corps que les militaires ont massacrés et fait disparaître reprennent la parole, si j’ose dire, et apportent la preuve d’un génocide organisé
à large échelle sur le continent, explique Alejandro Inchaurregui. La plupart des cadavres que nous avons examinés en Argentine présentent un orifice de balle dans le crâne, ce qui indique la façon dont on éliminait les
gens après les avoir déchiquetés sous la torture ». Assassinée en 1976, Ana
Marie Perez était sur le point d’accoucher. Son cas a ému l’Argentine. Intentionnellement, les coups de feu avaient été tirés de façon à tuer en même temps la mère et l’enfant.
« L’identification scientifique des victimes est un élément important
pour éclaircir ce que les tenants de la répression ont voulu occulter.
Quand le pouvoir nie la vérité et la justice, ces investigations doivent
servir aussi à identifier les assassins et à exiger leur châtiment de manière moins abstraite », relevait à ce sujet Adolfo Perez Esquivel, Prix Nobel de la Paix en 1980.
L’équipe a obtenu en 1989 le Prix Reebook des Droits de l’homme. Elle
poursuit activement ses recherches. « Et nous devons rester en alerte, conclut Alejandro Inchaurregui: la démocratie régresse en ce moment en Argentine et les assassins courent toujours, en toute liberté, perfectionnant
leurs méthodes ». (apic/infosud/pr)
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