Une coutume solidaire vieille d’un siècle
Cherrapunjee/Inde, 30 mai 2008 (Apic) Une « poignée de riz » lie les chrétiens du nord-est de l’Inde, une communauté chrétienne liée par une identité unique, à travers sa situation géographique et son origine ethnique distincte.
Reliée au reste du territoire indien par un étroit corridor et cerné par le Bangladesh, le Bhoutan, le Myanmar et la Chine, le nord-est de l’Inde, cette région est constitué de sept minuscules Etats totalisant plus de 30 millions d’habitants, dont plus de 20 % sont chrétiens.
L’un des éléments qui unissent les Eglises de la région est la tradition de la « poignée de riz », préservée depuis que cette pratique y a été mise en place il y a un siècle par des presbytériens. Elle prend aujourd’hui un relief particulier, en raison de la crise alimentaire, qui frappe nombre de pays, y compris l’Inde.
Aujourd’hui, outre les presbytériens, les baptistes et les catholiques suivent cette tradition: les familles chrétiennes possèdent un bol ou un récipient chez elles pour recueillir la « poignée de riz », qu’elles mettent de coté à chaque fois que la denrée de base de cette région est préparée.
Le week-end, des bénévoles des Eglises collectent le riz mis de coté et le vendent aux familles chrétiennes dans le besoin à un prix inférieur au cours du marché. Les familles chrétiennes pauvres peuvent alors acheter du riz à un prix plus accessible et les fonds récoltés sont utilisés pour le travail de ces Eglises.
« C’est ici que tout a commencé », a déclaré à l’Agence oecuménique ENI l’ancien Ebarwell Swer, de l’Eglise presbytérienne, à Sohra-rim, près de Cherrapunjee.
C’est à Cherrapunjee, à 53 kilomètres au sud-ouest de Shillong, que les premiers missionnaires presbytériens gallois se sont installés dans le nord-est de l’Inde, en 1841, à l’époque de l’empire britannique, qui avait fait de Cherrapunjee sa première capitale dans la région, comprenant alors le Myanmar et le Bangladesh.
« Nous avons célébré le centenaire de la ’poignée de riz’ en 2007 », a déclaré l’ancien Swer, en montrant le bol en fer-blanc qu’il garde chez lui pour recueillir le riz. Les familles les plus riches, a-t-il affirmé, mettent de coté plusieurs poignées de riz.
Aide aux écoles
Dans l’Etat du Mizoram, la petite Eglise baptiste du Mizoram, qui compte 125’000 membres, a gagné plus de 20 millions de roupies (près de 300’000 euros), soit 10 % de son budget annuel, grâce à la collecte de riz.
Le pasteur K. Thanzauva, secrétaire général de l’Eglise, a déclaré à ENI que le riz collecté était utilisé « pour soutenir le travail missionnaire, et les membres de l’Eglise contribuent généreusement ». Ce travail joue un rôle crucial dans le soutien aux programmes pastoraux et aux écoles primaires gérées par l’Eglise, assure de son côté le pasteur Laldawngliana Fanai, secrétaire de l’Eglise presbytérienne de l’Inde, qui comprend huit Synodes indépendants dans les Etats du nord-est de l’Inde.
Dans l’Etat de Meghalaya, la collecte de la « poignée de riz » est utilisée exclusivement pour venir en aide aux écoles primaires. Dans d’autres Etats, comme le Mizoram, où la contribution annuelle des 400’000 presbytériens équivaut à 50 millions de roupies (745’000 euros), les fonds sont consacrés au travail missionnaire de l’Eglise.
« Nous aussi, nous suivons cette pratique instaurée par les Eglises protestantes », a déclaré Ionnis Warpakma, prêtre catholique et proviseur du Collège Saint-Anthony de Shillong. Certains catholiques habitant en milieu urbain ont toutefois abandonné cette pratique et préfèrent faire des dons en liquide, a-t-il indiqué, mais la tradition reste fermement ancrée « dans les familles catholiques rurales ». (apic/eni/pr)
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