L’accueil des ministres homosexuels: une décision jugée hâtive

Vaud : La question de l’homosexualité divise l’Eglise évangélique réformée

Déo Negamiyimana, pour l’Apic

Lausanne, 25 juin 2008 (Apic) Le 28 janvier dernier, le synode de l’Eglise réformée vaudoise a adopté à une large majorité une série de résolutions visant à l’accueil des homosexuels dans l’Eglise. Du coup, ces derniers ont le droit d’accéder au ministère pastoral et diaconal, à condition qu’ils agissent dans la discrétion.

Même si le parlement réformé a refusé d’avaliser la bénédiction des couples pacsés, sa décision a provoqué de vives réactions. De nombreux pasteurs et paroissiens considèrent que le synode a franchi les limites de l’acceptable.

Une grande tension. C’est le mot que Martin Hoegger, utilise pour qualifier le climat qui règne actuellement au sein de l’Eglise évangélique réformée du canton de Vaud (EERV). Pour ce pasteur vaudois, qui est président du Conseil des Eglises chrétiennes basées sur le territoire vaudois, l’inquiétude est doublement ressentie. L’accueil des pasteurs et des diacres homosexuels adopté par le synode pourrait d’une part facilement handicaper le dialogue oecuménique avec les autres Eglises chrétiennes. Ces dernières, en grande majorité, restent prudentes face à la question des homosexuels et s’en tiennent à une position éthique classique. « D’autre part, estime-t-il, le phénomène de l’homosexualité est complexe. Une question d’une si grande importance, qui touche à la structure anthropologique fondamentale de la relation entre l’homme et la femme devant Dieu, ne peut être décidée par un vote majoritaire ». A son avis, les tensions provoquées par les résolutions synodales montrent que les autorités ont pris une décision hâtive.

Dans un article que le pasteur Shafique Keshavjee consacre au sujet de l’homosexualité dans la revue Hokhma (*), le malaise n’est pas non plus des moindres. Le docteur en sciences des religions considère que le sujet est explosif, extraordinairement complexe et fortement émotionnel. « Selon la manière de le traiter et d’y répondre, prévient-il, il est source de division. Au sein de l’Eglise réformée et entre les Eglises chrétiennes. Source aussi d’exclusion. Des personnes et surtout des ministres homosexuels qui, au terme du processus, ne se verraient peut-être pas reconnaître, ou au contraire, des personnes qui, refusant des ministres homosexuels, ne se reconnaîtraient plus dans une Eglise qui peut-être les accueillerait ». Pour le professeur de théologie oecuménique et des religions à la faculté de théologie de Genève, ce sujet suscite des positions inconciliables, sans compromis possible ou vérité supérieure.

Le synode pris entre deux positions

Du côté synodal, les autorités savent qu’elles doivent faire face à la virulence de deux camps. Celui des pour et celui des contre l’accueil des ministres homosexuels.

« Nous sommes pris entre deux positions », relevait Antoine Reymond, membre permanent du Conseil synodal, au moment de l’introduction au débat d’entrée en matière. Il met en garde contre une reconnaissance de l’homosexualité au même titre que l’hétérosexualité. « Comme Eglise, nous refusons cette indifférenciation. C’est d’ailleurs la position de la société suisse, puisque le vote populaire en faveur du partenariat enregistré marque à la fois une reconnaissance juridique possible et une différence. L’autre position est représentée par des chrétiens aux yeux desquels l’homosexualité devrait être dénoncée et les personnes exclues des Eglises et communautés chrétiennes. Le Conseil synodal n’a cédé ni aux uns ni aux autres », conclut le pasteur Reymond.

Des paroisses comme Yverdon-Temple, La Vallée, Vevey, Corsier-Corseaux et Le Mont-sur-Lausanne ont déjà fait entendre leur protestation. Mais elles refusent pour l’heure d’en parler aux médias. Des sources révèlent cependant que des la paroisse d’Yverdon Temple, par exemple, a décidé de refuser toute candidature d’un ministre homosexuel. Pierre Guignard, président du Conseil paroissial, explique sa décision par le fait d’avoir voulu éviter des départs en masse de paroissiens qui lui avaient fait parvenir un abondant courrier, manifestant ainsi leur désaccord avec les décisions prises par le Synode. A la paroisse du Mont-sur-Lausanne, les signataires refusent toute forme de bénédiction des couples homosexuels et rejettent l’idée de poursuivre la réflexion à ce sujet.

Que ceux qui se sentent lésés poursuivent leur ministère ailleurs

Face à cet imbroglio, certains réformés n’hésitent pas à proposer aux homosexuels d’aller voir ailleurs s’ils dénoncent le fait de ne pas accéder à certaines responsabilités. C’est le cas de Christian Glardon. Ce pasteur à Valeyres-sous-Montagny ne mâche pas ses mots. Dans son article intitulé « Ministres homosexuels? Résister à la précipitation », il demande clairement aux homosexuels de définir eux-mêmes leurs priorités. « Que les ministres homosexuels dans le secret, ceux en particulier qui en souffrent, cherchent la voie de Dieu et la voie de Dieu pour eux, au besoin avec un accompagnement, et continuent à donner dans l’Eglise leurs richesses s’ils le peuvent. Que ceux qui souffrent trop ou trouvent injuste de ne pas pouvoir être reconnus, acceptent notre incapacité actuelle à trouver une solution et envisagent de poursuivre leur ministère dans une autre Eglise ou organisation », écrit-il dans la revue Hokhma.

(*) Revue de réflexion théologique, n° 87, 2005 – page 133 (apic/dng/bb)

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