« Calvin, intime et public »
Genève, 27 avril 2009 (Apic) « La Vie protestante », le mensuel de l’Eglise protestante de Genève, publie un numéro hors-série sur Calvin, intitulé « Calvin, intime et public » (*). Le Réformateur n’en finit pas de faire parler de lui… mais au fond, le connaît-on vraiment ?, se demandent les auteurs du dossier. La VP veut nous faire découvrir dans cette publication, sous la plume des meilleurs spécialistes, quantité de facettes méconnues de Calvin.
Les auteurs conviés par la VP veulent nous faire suivre les traces de Calvin de Noyon, sa ville natale en Picardie, à son exil strasbourgeois en passant par Bourges, Orléans, Bâle, Genève, à travers un reportage photo inédit. Ils nous plongent dans la Genève du XVIe siècle, ses remparts, ses réfugiés et ses « chasse-gueux ».
« Calvin est sans nul doute le plus méconnu des hommes célèbres… »
Ponctué de dessins originaux d’artistes de talent, richement illustré grâce aux archives du Musée international de la Réforme (MiR) et des Musées de la Ville de Genève, « ce hors-série constitue la mémoire indispensable du jubilé », estime la VP. C’est que Genève fête cette année le 500ème anniversaire de « son » Réformateur.
« Calvin est sans nul doute le plus méconnu des hommes célèbres… », note dans son éditorial Serge Bimpage, responsable de La Vie protestante et coordinateur de ce hors-série. « Tout le monde connaît Calvin, écrit Serge Bimpage, mais qui peut affirmer lire encore celui qui traduisit la Bible en langue française et révolutionna cette dernière ? » Et qui lit aujourd’hui dans le texte son oeuvre majeure, l’ »Institution de la religion chrétienne », un traité de théologie écrit par Jean Calvin, d’abord publié en latin en 1536, traduit par lui-même en français en 1541?
Un dossier pas absent de critiques et de mises en perspectives
Le riche dossier sur Jean Calvin n’est pas absent de critiques, notamment le passage sur « Calvin, serviteur de Dieu au mépris des hommes? », où l’on découvre un personnage se considérant comme investi d’une mission providentielle. « Un homme qui hésite entre humanisme et tyrannie », selon les mots du pasteur et théologien Vincent Schmid. Convaincu que les intérêts de Dieu passent avant ceux des hommes, Calvin en effet n’a pas hésité à sacrifier ceux qui enfreignaient la loi divine.
« Comme nombre d’humanistes de son temps, il ne nourrit nul penchant pour la tyrannie; il s’est d’ailleurs prononcé pour le droit à la résistance dans un écrit de jeunesse… », poursuit Vincent Schmid. Mais, poursuit-il, « Calvin n’a jamais accepté d’être contrarié en quoi que ce soit. Moins par tempérament que par foi. Il s’est toujours considéré comme investi d’une mission providentielle. Ses opposants l’ont appris à leurs dépens ».
N’allait-il pas demander aux magistrats de Genève de faire respecter la loi de Dieu et de punir ceux qui se moquent de la « vraie Religion ». Ainsi à l’automne 1553, on put assister à Genève au procès puis à la mise à mort de Michel Servet, philosophe, médecin et théologien dissident d’origine espagnole, brûlé vif le 27 octobre 1553 dans les murs de la « Rome protestante ». Le procès et la condamnation de Servet sur ordre du Grand Conseil « est un dramatique exemple de ce que produit la collusion du religieux et du politique: la présence à Genève d’un hérétique est ressentie aussi par le pouvoir civil comme une menace grave qu’il faut écarter par la mise à mort du ’coupable’ », écrit pour sa part Eric Fuchs, professeur honoraire de la Faculté de théologie de Genève.
Au-delà d’actions et de décisions « détestables »
Mais, au-delà de ces actions et décisions « détestables », le Réformateur est aussi un instigateur de la séparation des pouvoirs temporel et spirituel, en quelque sorte un « précurseur de la démocratie », bien que « les dirigeants restent soumis à une loi qui surpasse toute autre: la justice de Dieu », relève Eric Fuchs. C’est également un « humaniste », un « vulgarisateur de la langue française », une langue encore peu employée au XVIe siècle, un « inspirateur de la politique sociale » en codifiant l’assistance publique et le secours aux pauvres, tout en instaurant des contrôles stricts pour traquer les abus… On devine également en Calvin un « promoteur du progrès » qui considère la réussite comme une reconnaissance à l’égard des moyens mis par Dieu à la disposition de l’Homme.
« Connu pour son caractère colérique, amer et cynique », relève Isabelle Graesslé, docteur en théologie et directrice du Musée international de la Réforme (MiR), « on sait peu que Calvin pouvait être tendre avec les femmes », comme le montre sa relation épistolaire avec la duchesse Renée de Ferrare. Et finalement, note Jérôme Cottin, docteur en théologie des Universités de Genève et de Strasbourg, « contrairement aux idées reçues, Calvin était un esthète amateur d’art ». S’il se méfiait de l’art religieux et pourfendait les idoles, « il appréciait l’art profane qu’il a contribué à émanciper de la gangue religieuse ».
Dans son portrait kaléidoscopique du « plus méconnu des hommes célèbres », La Vie protestante entend en effet « ouvrir quelques fenêtres originales sur un homme qui a non seulement forgé les mentalités à Genève, mais également dans une bonne partie de l’Europe et jusqu’à l’avènement des droits de l’homme ». JB
(*) Ce numéro est désormais disponible dans les paroisses protestantes de Genève, dans les kiosques Naville, les librairies Payot ainsi que les FNAC de Suisse romande au prix de Frs 10.– (apic/be)
webmaster@kath.ch
Portail catholique suisse
https://www.cath.ch/newsf/geneve-la-vie-protestante-edite-un-numero-hors-serie-sur-calvin/