Mgr Eamon Walsh: avant tout consolider les services de protection de l’enfance
Dublin, 27 novembre 2009 (Apic) Dans le rapport de la Commission d’enquête sur l’archidiocèse de Dublin dirigée par la juge Yvonne Murphy et publié jeudi 26 novembre par le Ministère irlandais de la Justice, l’attitude du clergé catholique irlandais est vivement critiquée. Malgré la dénonciation d’abus sexuels par des prêtres sur des centaines d’enfants dans l’archidiocèse de la capitale irlandaise, la hiérarchie catholique a « couvert » pendant des années ces accusations.
Le gouvernement irlandais s’est engagé solennellement, au nom du peuple irlandais, de faire tout ce qui est nécessaire pour s’assurer que les « sombres jours des abus sexuels sur les enfants, aggravés par la dissimulation et la complicité, soient désormais passés pour de bon ».
Dans ce rapport qui n’épargne pas la hiérarchie de l’Eglise de l’époque, les autorités de l’Etat irlandais sont également sur le banc des accusés pour avoir « facilité la dissimulation en ne remplissant pas leur devoir d’assurer que la loi était appliquée de manière égale à tout le monde et en permettant aux institutions de l’Eglise de se situer au-dessus des procédures normales d’application de la loi », peut-on lire dans le rapport. Le rapport officiel de plus de 700 pages accuse l’Eglise catholique d’Irlande d’avoir couvert les abus sexuels commis par des prêtres de la région de Dublin sur des centaines d’enfants pendant plusieurs décennies.
Cette enquête de trois ans menée par la juge Yvonne Murphy souligne que les « structures et les règles » de l’Eglise catholique ont facilité cette politique de dissimulation. Réagissant vendredi à ce rapport, Mgr Eamon Oliver Walsh, évêque auxiliaire de Dublin, a estimé que l’enquête de la juge Murphy ne devait pas être étendue au reste de l’Irlande.
Ayant travaillé comme secrétaire sous les anciens archevêques Kevin McNamara et Desmond Connell, Mgr Eamon Walsh a estimé qu’on pouvait certes passer les 15 prochaines années à parcourir le pays alors que l’on aurait mieux à faire à utiliser son temps, son énergie et son argent pour consolider les services de protection de l’enfance dans l’Eglise et dans les écoles.
L’évêque auxiliaire de Dublin a affirmé que la culture du « ne pas demander, ne pas dire » était bien terminée. Pour lui, c’en est bien fini dans l’Eglise catholique de la peur du scandale prenant le pas sur la protection des droits des enfants. Il a estimé que l’une des plus grandes fautes dans les structures de l’Eglise était qu’il n’y avait pas de vraie communication. « Chacun était dans son petit cocon, et si quelqu’un avait quelque information . . . il la gardait pour lui! Maintenant, c’est très, très différent », rapporte vendredi le quotidien « The Irish Times ».
Selon le rapport de la Commission d’enquête, des lettres envoyées par la Commission au Vatican et au nonce apostolique en Irlande pour demander des informations sur les abus sexuels commis par des membres du clergé ont été ignorées et sont restées sans réponse.
Mgr Walsh a estimé qu’il était « très regrettable » que le Vatican n’ait pas répondu aux demandes formulées par la Commission Murphy concernant de la documentation relative au traitement des allégations d’abus contre les enfants. « Je ne voudrais pas essayer de défendre cela, cela provient d’une autre époque, c’est du temps du corps diplomatique… » Bien que ces refus venant de Rome ne datent que de 2006 et 2007, l’évêque auxiliaireDublin répond que la « mentalité » du Vatican a changé.
C’est en septembre 2006 que la Commission avait demandé des explications à la Congrégation vaticane pour la doctrine de la foi à propos des rapports sur les abus sexuels commis contre des enfants que lui avait envoyés l’archidiocèse de Dublin concernant une période de trois décennies. La Commission avait également demandé sans succès des informations sur le document « Crimen Solicitationis », envoyée en 1962 par le cardinal Alfredo Ottaviani, pro-secrétaire du Saint-Office (aujourd’hui Congrégation pour la doctrine de la foi), qui traite notamment des abus sexuels commis par des membres du clergé.
La Commission a enquêté sur la façon dont l’archevêché de Dublin a traité les allégations portées contre un échantillon de 46 prêtres sur 102 contre lesquelles des plaintes ont été faites entre 1975 et 2004. Elle conclut que les archevêques et de nombreux évêques auxiliaires n’ont pas traité ces plaintes de manière appropriée. Ainsi, selon le rapport, aucun des quatre archevêques successifs n’a signalé les abus dont il avait connaissance à la « Gardai », la police irlandaise, « et ceci au long des années 1960, 1970 et 1980 ». A l’époque, des responsables de la Gardai ont également considéré que les prêtres étaient hors de portée, et certains n’ont fait que rapporter les plaintes à l’archevêché plutôt que de mener une enquête.
Le rapport signale également le cas de « prêtres courageux » qui ont fait suivre les plaintes à leurs supérieurs. Réagissant au rapport, Mgr Diarmuid Martin, actuel archevêque de Dublin, a déclaré qu’ »aucune parole de demande de pardon ne sera jamais suffisante », et il a adressé « à chacune des victimes » sa demande de pardon, en exprimant son « chagrin et sa honte pour ce qui leur est arrivé ». Le cardinal Sean Brady, primat catholique d’Irlande, a également exprimé sa tristesse profonde et sa honte face à ces graves événements.
L’archevêque émérite de Dublin, le cardinal Desmond Connell, critiqué dans le rapport pour n’avoir pas transmis assez vite à la police les informations dont il avait connaissance, a lui aussi exprimé ses « amers regrets que des manquements de ma part ont contribué aux souffrances des victimes » de quelque façon que ce soit. Sévèrement critiqué dans le rapport de la Commission, Mgr Donal Brendan Murray, évêque de Limerick, qui fut évêque auxiliaire de Dublin, a dit regretter ses actions mais a affirmé n’avoir pas l’intention de démissionner. Fachtna Murphy, Commissaire de la Gardai, la police de la République d’Irlande, a également déploré les manquements de la police, en particulier le fait que les autorités de l’Etat aient été incapables de protéger les victimes. (apic/bbc/irishtimes/be)
webmaster@kath.ch
Portail catholique suisse