Neuchâtel: Quelque 500 catholiques ont participé samedi 29 mai au Forum diocésain 2010
Neuchâtel, 29 mai 2010 (Apic) Plus de 500 fidèles, prêtres, religieux, religieuses et laïcs engagés dans les paroisses et les mouvements du diocèse de Lausanne, Genève et Fribourg (LGF), se sont réunis samedi 29 mai à Neuchâtel à l’occasion du Forum diocésain 2010. C’est dans une ambiance fraternelle et festive – quelque peu ternie par l’absence de l’évêque diocésain Mgr Bernard Genoud, à la santé très affaiblie – que Mgr Pierre Farine, évêque auxiliaire à Genève, a ouvert cette journée consacrée à la diaconie.
Diaconie ? Un terme grec ayant le sens de « service » et d’accueil du prochain et qui est plus vaste et plus large que l’action caritative. Car la diaconie fonde toute vie chrétienne, comme l’a rappelé Mgr Genoud dans son message lu devant l’assemblée. « Elle est la mise en œuvre de l’Evangile du Christ au service de la personne, notamment des plus pauvres… L’Eglise est diaconale ou elle n’est pas! ».
« Mgr Genoud est spirituellement avec nous par la pensée », a lancé Mgr Farine dans une « église rouge » – la Basilique Notre-Dame de l’Assomption, située non loin de la rive du lac – pleine à craquer. Et d’ouvrir le Forum en lisant la contribution écrite de Mgr Genoud reprenant les éléments de la consultation sur la diaconie lancée au niveau des conseils pastoraux et des communautés et mouvements de tout le diocèse de LGF.
L’évêque relève que la diaconie se réalise sous des formes souvent humbles, locales, qui tiennent du geste d’accueil ou de la visite de malades, des soupes de carême, des liens avec les EMS, les hôpitaux, ou de manière professionnelle dans des institutions comme Caritas ou l’Action de Carême. « Notre diocèse vit intensément sa diaconie », souligne-t-il, faisant entrevoir que l’Esprit du Christ est bien là, « vivant au milieu de nous, suscitant un Royaume que nous ne faisons qu’entrevoir, mais bien réel: le Royaume de sa charité ».
Relevant que « notre foi elle-même est trop souvent peureuse de la radicalité du Christ », Mgr Genoud a invité les fidèles à avoir l’audace d’engagements nouveaux, d’ouvrir de nouveaux chantiers: dans le domaine de la famille, des nouvelles pauvretés, comme les travailleurs pauvres (souvent appelés « working poors »), les gens en déplacement, les réfugiés politiques ou économiques jusqu’aux cadres vivant à l’étranger « comme dans une bulle ». L’évêque, sur la base de ces réalités, souhaite formuler quelques axes pastoraux dont il espère qu’ils puissent être promulgués comme normes pastorales de la diaconie du diocèse dès cet automne.
Il relève que « la diaconie n’est pas l’action sociale de l’Eglise comme on le dit souvent d’organisations comme Caritas, Aide à toute détresse (ATD Quart Monde), les Œuvres pontificales missionnaires, mais c’est le service au Christ souffrant et à son corps ». En ce sens, la diaconie n’est pas une conséquence du témoignage ou de la liturgie de l’Eglise, poursuit-il, mais c’est « servir le Christ dans son corps qui souffre ». Et de citer l’Evangile (Matthieu 25, 40): « Tout ce que vous aurez fait au plus petit d’entre les miens, c’est à moi que vous l’avez fait ».
L’évêque souhaite coordonner, dans un premier temps au niveau cantonal, toutes ces activités diaconales « afin de les rendre plus dynamiques et audacieuses, mais aussi d’avoir un lieu de discernement sur ces pratiques, sur leur authenticité, sur leur efficacité ou encore leur pertinence sociale ou ecclésiale ». Une telle coordination devrait être instaurée dans chacun des cantons du diocèse. Finalement, Mgr Genoud souhaite instituer pour le diocèse le dimanche de la Saint Vincent de Paul comme « fête de la diaconie », occasion de faire le point sur la diaconie dans les paroisses, les communautés et les mouvements, et de se confronter aux nouvelles formes de pauvretés.
Avant de se rendre dans la quinzaine d’ateliers de discussions animés par des personnes engagées sur le terrain avec les immigrés, les réfugiés, dans le monde du travail, le monde de la santé, la pastorale familiale, la pastorale carcérale, le monde des médias, la solidarité avec le tiers-monde ou avec les victimes de la torture, les participants ont entendu trois témoignages fort applaudis.
D’abord celui d’Anne Gallot, qui vit à Genève, au service de Points-Cœur, une œuvre catholique née il y a 20 ans. Points-Cœur envoie des jeunes partout dans le monde pour vivre pendant un à deux ans une expérience d’amitié avec les plus souffrants. Anne a fait ses premières armes en visitant les malades dans un hôpital populaire d’une favela de Salvador de Bahia, au Brésil. Son message: « L’homme a besoin d’amour, cela pourrait paraître banal, mais ne l’oublie-t-on pas souvent ?… Aimer est la réponse définitive à l’attente de tout homme ».
L’abbé Gérald Carrel, aumônier d’hôpital au CHUV à Lausanne, s’est demandé comment il pouvait traduire concrètement dans son ministère ce qu’il découvrait dans l’Evangile. Pour lui, c’est d’abord avoir une attitude d’écoute au pied du lit du malade, une « écoute non directive », qui lui permette de s’exprimer le mieux possible, de dire ce qu’il ressent comme il veut et jusqu’où il veut. C’est le malade qui guide l’entretien, dans « une écoute centrée sur la personne marquée par un accueil inconditionnel de l’autre et le non jugement ». Pour l’aumônier, la diaconie, le service de l’autre, n’est pas seulement l’affaire de la pastorale spécialisée, l’affaire des gens formés, des prêtres, des diacres ou des croyants pratiquants, « mais bien l’affaire de tous! »
Frère Romon Frey, frère des écoles chrétiennes, qui vit à l’Abbaye de Fontaine-André (Neuchâtel), a apporté son témoignage d’ancien aumônier des prisons, où il a découvert la pauvreté, les blessures de la vie, la solitude, les faiblesses humaines, mais aussi les potentialités des détenus, quels que soient leur provenance, leur culture, leur religion, leurs délits… Il faut, dit-il, ne pas juger la personne détenue, mais la prendre avec ce qu’elle est, avec son poids de souffrance et de regrets, « avoir confiance et foi que ces personnes en prison puissent découvrir en elles ’la mèche qui fume encore’, essayer de la rallumer encore, et encore, inviter à faire remonter le positif encore enfoui au fond de l’homme et le faire revivre ». Et l’aumônier d’inviter les fidèles à porter les personnes derrière les barreaux dans leurs prières personnelles et dans les paroisses, car « les détenus sont touchés de savoir qu’à l’extérieur, il y a des gens qui pensent à eux! »
Dans les divers ateliers, les participants ont mené une réflexion de fond sur la mission de l’Eglise en lien avec les pauvretés de notre époque: fragilisation des liens familiaux et sociaux, augmentation de l’individualisme, exclusion des personnes différentes, pour déboucher sur une foule de propositions recueillies par les animateurs. L’après-midi, les participants ont fait le tour d’une exposition interactive abritée sous diverses tentes tout autour de l’ »église rouge », permettant ainsi de découvrir les diverses formes de diaconie existant dans le diocèse. L’itinéraire, en trois sections, comprenait le parcours « Diaconie et libération », avec par exemple Caritas ou l’Aumônerie des prisons, un second parcours sur la « Diaconie et vérité », avec notamment le travail de l’Action de Carême, de l’Action des Chrétiens pour l’Abolition de la torture (ACAT), ou du Centre catholique de radio et télévision (CCRT), sans oublier le témoignage des moines cisterciens de Hauterive, pour finir avec le parcours « Diaconie et solidarité ». La journée s’est terminée par une messe festive à la Basilique Notre-Dame, avec un « envoi en mission », suivi d’un apéritif convivial. (apic/be)
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