Espagne: Benoît XVI, pèlerin de Compostelle
Saint-Jacques de Compostelle, 7 novembre 2010 (Apic) Benoît XVI s’est rendu à Saint-Jacques de Compostelle en pèlerin. Le 6 novembre, il y a prononcé un discours et célébré une messe, rappelant tout particulièrement le sens même du pèlerinage et la place de Dieu dans l’Europe.
Avant d’arriver au cœur de Saint-Jacques de Compostelle, le pape a parcouru en papamobile la dizaine de kilomètres qui séparent l’aéroport du centre-ville, dans une brume épaisse. Sur son passage, Benoît XVI a été acclamé par des milliers de fidèles, dont beaucoup lançaient de grands confettis ou tenaient des ballons. On attendait près de 200’000 personnes lors du passage de Saint-Père dans les rues de la capitale de la Galice.
Venu en pèlerin à Saint-Jacques de Compostelle à l’occasion de l’année jubilaire, Benoît XVI a visité l’immense cathédrale abritant le tombeau de l’apôtre saint Jacques. Après un temps de prière personnelle devant la tombe de l’apôtre – la dépouille de ce dernier avait été découverte par un ermite en l’an 813 – le pape a vénéré, comme le veut la tradition, sa statue. A l’occasion de cette visite pontificale, le botafumeiro, célèbre et gigantesque encensoir accroché au plafond de la cathédrale, a été allumé. Le pape y a mis l’encens avant d’assister à l’actionnement, par huit hommes, les tiraboleiros, de l’encensoir de plus de 80 kilos.
Au cours de cette visite, Benoît XVI a aussi brièvement porté sur les épaules la cape des pèlerins de Saint-Jacques, où figurait entre autres la célèbre coquille.
Dans un discours en espagnol et galicien, Benoît XVI a rappelé que le pèlerinage n’était pas une simple visite culturelle mais une rencontre avec Dieu. Il a ainsi précisé que « faire un pèlerinage ne veut pas dire simplement visiter un lieu quelconque pour admirer ses trésors naturels, artistiques ou historiques ». « Faire un pèlerinage, a expliqué le pape, signifie plutôt sortir de soi-même pour aller à la rencontre de Dieu là où il s’est manifesté, là où la grâce divine s’est montrée avec une splendeur particulière et a produit d’abondants fruits de conversion et de sainteté chez les croyants ».
Le pèlerinage vers Saint-Jacques de Compostelle, qui a repris après plusieurs siècles au milieu du 20e, connaît aujourd’hui un succès croissant, drainant chaque année sur les routes d’Europe des dizaines de milliers de personnes.
Le pape a également indiqué que l’Eglise catholique ne pourrait jamais renoncer à être au service de la vérité et de la liberté. « Il existe une relation étroite et nécessaire entre vérité et liberté », avait auparavant expliqué Benoît XVI pour qui « la recherche honnête de la vérité, l’aspiration à celle-ci, est la condition d’une authentique liberté ».
Après son discours, Benoît XVI a déjeuné à la résidence de l’archevêque de Saint-Jacques de Compostelle, Mgr Julián Barrio Barrio. Il était entouré de sa suite, des cardinaux espagnols et des membres du Comité exécutif de la Conférence épiscopale.
Au cœur de Saint-Jacques de Compostelle, le pape a ensuite célébré la messe devant une foule joyeuse, en présence de nombreux jeunes qui l’ont longtemps acclamé aux cris de « Benedicto » ou encore de « Se nota, se siente, el Papa esta presente » (cela se voit, cela se sent, le pape est là).
Célébrant la messe depuis un immense podium moderne installé face à la grande cathédrale romane de Saint-Jacques de Compostelle et à sa façade baroque, Benoît XVI a jugé « tragique qu’en Europe, surtout au 19e siècle, se soit affirmée et ait été défendue la conviction que Dieu est le rival de l’homme et l’ennemi de sa liberté». Puis il s’est demandé comment il pouvait actuellement être « nié à Dieu le droit de proposer la lumière qui dissipe toutes ténèbres, comment celui-ci pouvait être enfermé dans la sphère privée ».
Dans son homélie, Benoît XVI a alors soutenu avec force qu’il était « nécessaire que Dieu recommence à résonner joyeusement sous le ciel de l’Europe ». « L’Europe, a-t-il ensuite demandé, doit s’ouvrir à Dieu, sortir sans peur à sa rencontre, travailler avec sa grâce pour la dignité de l’homme que les meilleures traditions avaient découverte : la tradition biblique – fondement de cet ordre -, et les traditions classique, médiévale et moderne desquelles naquirent les grandes créations philosophiques et littéraires, culturelles et sociales de l’Europe ». « L’Europe de la science et des technologies, l’Europe de la civilisation et de la culture, doit être en même temps l’Europe ouverte à la transcendance et à la fraternité avec les autres continents, ouverte au Dieu vivant et vrai à partir de l’homme vivant et vrai », a encore affirmé le pape.
Il y a près de 30 ans, en visitant également Santiago, Jean-Paul II avait lui aussi lancé un vibrant appel au vieux continent : « Ô vieille Europe, je te lance un cri plein d’amour : retrouve-toi toi-même, sois toi-même, découvre tes origines, renouvelle la vigueur de tes racines, revit ces valeurs authentiques qui couvrirent de gloire ton histoire et firent bénéfique ta présence dans les autres continents ».
Benoît XVI, devant quelque 8000 fidèles enthousiastes, a également souhaité avertir l’homme « des menaces envers sa dignité par la privation de ses valeurs et de ses richesses d’origine, par la marginalisation ou la mort infligée aux plus faibles et aux plus pauvres ». Des phrases prononcées dans un pays qui, en février dernier, avait libéralisé l’avortement.
L’archevêque de Saint-Jacques de Compostelle a affirmé devant le pape que les fidèles avaient besoin de revitaliser leur foi ainsi que de l’ardeur et du courage d’une « nouvelle évangélisation pour annoncer le Christ ».
Au terme de la messe, Benoît XVI s’est entretenu en privé avec le chef de l’opposition espagnole, Mariano Rajoy.
De la cathédrale romane de l’apôtre saint Jacques à l’église inachevée d’Antoni Gaudí (1852-1926) à Barcelone, Benoît XVI est venu faire le lien « entre la continuité et la nouveauté, entre la tradition et la créativité ». A Barcelone, dans une Espagne fortement sécularisée et une Europe où les fidèles catholiques se font plus rares, Benoît XVI s’apprête à consacrer une nouvelle église. Tout un symbole, d’autant que cette œuvre architecturale surprenante est dédiée à la Sainte-Famille de Nazareth. Après l’Europe, c’est le thème de la famille que le pape propose lors de la deuxième et dernière journée de son déplacement en Espagne. (apic/imedia/lb/ami/amc)
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