«In paradisum» vise le hit-parade

France: Les religieux et religieuses, nouveau filon des maisons de disques

Le Barroux, 19 novembre 2010 (Apic) Le lancement mondial de « In Paradisum », un CD de chants grégoriens des moniales de Notre-Dame de l’Annonciation du Barroux (département du Vaucluse), confirme la place nouvelle accordée à la musique religieuse par les maisons de disques.

Cette année, trois prêtres ont occupé la première place du hit-parade français et ce pendant neuf semaines. Initiateur de ce groupe, intitulé « Les Prêtres », Mgr Jean-Michel di Falco, évêque de Gap et d’Embrun, visait un disque d’or (50’000 exemplaires vendus) grâce à un partenariat entre le label de TF1 et Universal Music. Son groupe recevra un disque de diamant (500’000 exemplaires), rapporte le quotidien catholique français « La Croix ».

Un succès qui n’est pas sans rappeler « The Priests », un trio de prêtres irlandais qui a vendu près de 2 millions d’albums depuis 2008. La même année, Universal Music sortait un CD de chant grégorien interprété par les cisterciens autrichiens de la « Fondation Sainte-Croix », recrutés lors d’un concours. Le succès est aussi au rendez-vous, avec plus d’un million de ventes.

La beauté du grégorien

En 2010, le célèbre label de musique lance un projet équivalent avec des voix féminines. Après de longues recherches où les responsables artistiques ont écouté le chant de religieuses dans le monde entier, ce sont les sœurs cloîtrées de Notre-Dame de l’Annonciation du Barroux (petit village situé à une quarantaine de kilomètres d’Avignon, ndlr) qui ont été sélectionnées. « In Paradisum », le premier album des moniales provençales, alias « Les Sœurs », est sorti le 8 novembre 2010. Il compte déjà quelque 30’000 CD dans les bacs.

« L’Abbaye de Notre-Dame de l’Annonciation représente tout ce dont vous pourriez vous échapper dans la vie moderne. Et ces religieuses sont tout simplement les meilleures chanteuses. Quand vous entendez chanter les sœurs, c’est comme si vous échappiez immédiatement aux tensions et bruits de la vie moderne; c’est une évasion face au stress, aux défis, à la vitesse de cette vie », note Tom Lewis, responsable artistique des disques Decca (Universal), dans un communiqué présentant le nouveau CD. « Quand elle parle, il y a de la poésie dans la voix de la Mère Abbesse. Ce sont sa passion et sa détermination, tout comme la beauté de ce chant qui a attiré notre attention. »

Un argument marketing

« Dans un monde éclaté, voir des membres du clergé heureux de chanter est un réconfort, pas seulement pour les chrétiens. Ils formulent une réponse à un besoin d’espérance », a pour sa part déclaré Mgr di Falco à « La Croix ». Toujours selon le quotidien catholique français, Dominique Fournier, vendeur au rayon disques de « La Procure », relativise: « Le grand public ne connaît pas les subtilités du grégorien et achète ce qu’on présente en tête de gondole. Ces disques portés par de gros labels jouissent d’une promotion efficace, voilà tout. »

Derrière ces succès se trouvent des labels prestigieux. « Jusqu’alors, la cible adulte était négligée. Mais on réalise que le public senior reste le plus attaché au disque », explique Yann Ollivier, directeur du département musique classique et jazz chez Universal. Selon lui, la stratégie évolue vers la conquête de marchés de niches, dont le religieux. La religiosité sert ici d’argument marketing: le sentiment d’évasion face au stress, la déconnexion du mode de vie moderne sont mis en avant.

Trouver de l’argent

Du côté du clergé chantant, on n’est pas dupe mais on s’accommode de cette réalité. Après tout, quand « Les Prêtres » ont été créés, il s’agissait de trouver de l’argent pour une école à Madagascar et l’édification d’une nouvelle église au sanctuaire Notre-Dame du Laus, près de Gap. En marge de leur ministère, les trois chanteurs se sont donc pliés au jeu des plateaux télé, photos, et interviews.

Pour « Les Sœurs », religieuses cloîtrées et attachées à la liturgie dans la forme ancienne du rite romain, l’exercice est plus pénible. Devant les rares journalistes qu’elles ont accepté de recevoir dans leur parloir, elles assurent considérer l’expérience comme un moyen d’évangélisation. « Nous souhaitons envoyer un message à nos contemporains, un message dont on a le plus grand besoin, un message de joie infinie. Tant pis si la plupart des vendeurs et des acheteurs ne perçoivent pas ce que ces chants représentent pour nous, si cela sert de musique d’ambiance », expliquent-elles. Au final, les sœurs chanteuses comptent reverser les bénéfices des ventes à des œuvres caritatives, « là où Mère abbesse décidera ». (apic/la croix/com/gc/nd)

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