Ne jamais banaliser la sexualité

Vatican: « Lumière du monde »: analyse du livre révolutionnaire de Benoît XVI

Rome, 22 novembre 2010 (Apic) Révolution au Vatican !? Benoît XVI ouvre la voie au préservatif. La nouvelle est dans tous les journaux, elle a fait le tour de la planète. C’est oublier qu’en mars 2009, « l’Osservatore Romano » – le quotidien du Vatican – soulignait déjà l’efficacité du préservatif pour « des groupes particuliers » comme « les prostituées, les homosexuels et les drogués ».

C’est un fait, Benoît XVI admet l’utilisation du préservatif « dans certains cas », afin de « réduire les risques de contamination ». Mais il redit également, que seul, le condom n’arrêtera pas le virus du sida.

La mémoire collective flanche…, rappelle l’agence de presse I.MEDIA à Rome. On aurait oublié l’ouverture en 2005 du Père Cottier, théologien de la Maison pontificale, sur la question, les propos du cardinal Lustiger pour qui le préservatif était « un moyen de ne pas ajouter au mal un autre mal »… et surtout, sur le terrain, le travail de l’Eglise au contact des populations à risque.

Dans l’avion qui le menait à Yaoundé, en mars 2009, Benoît XVI affirmait (peut-être maladroitement) que la distribution de préservatifs risquait « d’augmenter le problème » du sida, qu’elle ne pouvait en tous cas le résoudre, appelant de ses vœux une « humanisation » de la sexualité. C’est ce risque d’une « banalisation » de la sexualité que Benoît XVI développe à nouveau dans l’ouvrage « Lumière du monde – le pape, l’Eglise et les signes des temps », entretien avec le journaliste allemand Peter Seewald, qui paraîtra dès le 23 novembre (*).

A cœur ouvert

La vraie révolution est ailleurs. C’est la toute première fois qu’un pape se confie aussi directement à un journaliste, ouvrant son cœur avec franchise et sagesse sur nombre de questions délicates et brûlantes, proposant sa vision du monde et ses problèmes avec une clarté surprenante, racontant y compris sa vie privée. C’est « un signe nouveau et important », confie le journaliste Peter Seewald, auteur de ces entretiens.

Dans « Lumière du monde », on apprend que Joseph Ratzinger n’a pas voulu de la « gigantesque responsabilité » qui pèse aujourd’hui sur ses épaules et qu’il se sent petit à côté de son « géant » prédécesseur. S’il juge qu’un pontife ne peut démissionner en pleine crise, il avance pour la première fois qu’il pourrait se retirer si ses forces physiques, psychiques et spirituelles viennent à manquer. De manière plus anecdotique, on apprend aussi que Benoît XVI se délecte des films de « Don Camillo », qu’il a renoncé à monter sur le vélo d’appartement conseillé par son médecin et qu’il passe beaucoup de temps à lire et à étudier des dossiers.

Le pape confie également le « choc inouï » qu’a représenté, pour lui, l’ampleur des scandales de pédophilie dans l’Eglise. Il reconnaît que Rome n’a pas été « à la hauteur » pour expliquer le sens de la levée des excommunications des 4 évêques lefebvristes et il déplore la « catastrophe Williamson », une véritable « erreur » selon lui. Le pape théologien avoue qu’il n’avait pas mesuré les effets que provoquerait une petite phrase tirée de son contexte de son fameux discours de Ratisbonne. De ces crises, il entend recueillir des « éléments positifs ».

Ouverture en vue de la communion des divorcés remariés

Benoît XVI, qui se place en héritier du Concile Vatican II, dont « presque personne ne lit » les textes, rappelle les fondamentaux de l’Eglise et de ses principes, glissant même une ouverture inattendue en vue de la communion des divorcés remariés. Il évoque longuement les rapports des chrétiens avec les juifs, leurs « pères dans la foi », et il souhaite un dialogue « large et intense » avec l’islam. Tout au long de ce livre, le pape présente une Eglise qui « n’impose rien à personne », et il insiste sur l’urgence de développer « le caractère thérapeutique du christianisme ».

Celui qui lira le livre dans sa totalité ne pourra éviter, au final, une interrogation. Ce pape ne sera-t-il pas celui de la réconciliation avec Moscou, du rapprochement avec la Chine, du dialogue avec l’islam, de la nouvelle évangélisation des terres déchristianisées, d’une Eglise franche et décomplexée ? Toujours est-il que, dans « Lumière du monde », Benoît XVI résume en une phrase sa préoccupation première: « veiller à ce que les hommes ne perdent pas Dieu du regard ».

(*) La version française, confiée aux Editions Bayard, paraîtra d’ici le 3 décembre. (apic/imedia/ami/ggc)

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