Réfugiés, le défi

Je vis depuis quelques mois au contact quotidien avec des réfugiés. Les choses se passent bien de façon générale. Nous avons beaucoup de jeunes gens entre treize et dix-huit ans. Ils sont aimables, polis, même si les contacts sont réduits du fait de la langue. Le français, malgré quelques cours, est très peu pratiqué, l’anglais primitif et même entre Kurdes, appartenant à différentes nations, la compréhension n’est pas facile. L’arabe non plus n’est pas un moyen de communication aisé entre eux. La langue des signes et quelques dessins parviennent à combler les lacunes.

Le problème le plus grave me paraît être l’oisiveté. Nous fournissons le gîte et le couvert. Nous avons un personnel admirable qui se met en quatre pour rendre le séjour de nos hôtes convenable. Mais ils n’ont rien à faire. Quelques-uns donnent des coups de main à la cuisine où dans les chambres. Ils jouent un peu au ballon ou pédalent sur un ou deux vélos mis à disposition. Mais ce sont des jeunes gens en pleine santé qui s’ennuient. Ils regardent la télévision, gardent l’oreille collée à leur téléphone portable, écoutent de la musique. Ils fument trop et boivent en cachette. C’est ainsi depuis des semaines et des mois qu’ils sont en Suisse. Quelle va être la suite?

Je vois qu’accueillir, nourrir et loger est relativement facile mais comment les intégrer dans la vraie vie? Les mettre à l’école, au travail, à l’apprentissage? C’est un gigantesque effort, qui ne doit pas trop tarder car il n’est pas sain de les laisser ainsi sans encadrement familial, sans milieu professionnel, sans leur donner des modèles précis d’insertion réussie. La question de l’accueil a été présentée dans les médias comme une question de générosité ou de fermeture; ce que je constate c’est que nos systèmes de formation (école et apprentissage) n’ont pas été organisés en fonction d’une jeunesse dont la langue et la culture sont aussi différentes. C’est un problème structurel dont nous avons sous-estimé la gravité, or c’est la condition d’une intégration réussie.

Jean-Blaise Fellay | 06.01.2015

Portail catholique suisse

https://www.cath.ch/blogsf/refugies-le-defi/