Le Foyer de charité de la Flatière, en Haute-Savoie | © Foyers de charité
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Une nouvelle commission pour faire la lumière sur les Foyers de charité

Les Foyers de charité ont annoncé le 14 janvier 2025 la création d’une commission indépendante chargée de faire la lumière sur leur histoire. Ces communautés ont été marquées ces dernières années par des scandales notamment liées aux figures fondatrices que sont la mystique Marthe Robin et le Père Georges Finet.

Les Foyers de charité, des communautés qui rassemblent des laïcs et des prêtres, ont été cofondés en 1936 en France par Marthe Robin et le prêtre catholique Georges Finet. Aujourd’hui, les Foyers de charité comptent près de 900 membres répartis dans 68 maisons, sur quatre continents. En Suisse, un Foyer existe à Bex, dans le canton de Vaud. Ces structures accueillent plus de 50’000 personnes par an pour des retraites spirituelles.

Fraude mystique?

Des témoignages d’abus sexuels sont apparus en France dès 2018 concernant cette association de fidèles. En 2020, un rapport visant Georges Finet faisait état de 26 femmes accusant le prêtre d’agressions sexuelles. Cette même année, est sorti le livre du carme belge Conrad De Meester (1936-2019), spécialiste de la mystique, sollicité en 1988 pour étudier les textes de Marthe Robin en vue de son procès en béatification. Les notes du religieux, publiées à titre posthume, font ressortir sa conviction que Marthe Robin s’était rendue coupable de «fraude mystique». Elle aurait menti sur les aspects surnaturels tels que les stigmates ou l’abstinence de nutrition et aurait plagié des auteurs.

En février 2022, le pape François a nommé le cardinal Jean-Pierre Ricard, délégué pontifical pour les Foyers, afin de «gouverner l’association, de manière temporaire». Mais celui-ci a démissionné un mois plus tard, peu de temps avant de s’accuser lui-même de faits de nature sexuelle commis 35 ans auparavant sur une adolescente. Michel Dubost, évêque émérite d’Évry, l’a remplacé en mars 2022.

Dissolution de la première commission

En juin 2023, une commission pluridisciplinaire était mise en place par les Foyers pour enquêter au sein des communautés afin de déterminer d’éventuelles «déviations théologiques» ayant pu conduire à des «abus spirituels et sexuels». Le 12 février 2024, Michel Dubost en démissionnait. Laurent Landete, ancien modérateur de la communauté de l’Emmanuel, membre du Dicastère pour les laïcs, la famille et la vie, et Christine Foulon, religieuse assomptionniste, étaient nommés délégués pontificaux.

En mars 2024, les membres de la commission ont refusé les exigences des deux délégués pontificaux concernant leur liberté de travail et démissionné en bloc.

La lumière sur la genèse et le développement des Foyers

C’est donc une commission renouvelée qui prend à présent le relais de l’enquête pour le compte des Foyers. Le groupe indépendant est composé de six membres aux expertises complémentaires: deux historiens, un juriste, une sociologue, un théologien et un psychanalyste, note le journal La Croix. Les travaux doivent s’achever sur un rapport publié en 2026. «Il ne s’agit pas de refaire l’enquête sur Marthe Robin – le matériau est déjà ample, une enquête de canonisation est en cours avec un dossier de 14’000 pages, (…) – mais de l’inclure dans un panorama plus vaste, une histoire institutionnelle des Foyers, de leur fondation dans les années 1930 jusqu’aux années 2000», relève dans le journal français Florian Michel, professeur d’histoire contemporaine à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et membre de la commission.

Au moins une demi-douzaine de prêtres de la première génération des pères de Foyers ont été identifiés comme «abuseurs», dans des sens distincts, note Florian Michel.

Marthe Robin «en toile de fond»

Les enquêteurs rencontreront les membres des Foyers, actuels ou anciens, et recueilleront le témoignage de tous ceux qui connaissent bien leur fonctionnement. Les principaux points de recherche concerneront l’aspect systémique des abus. «Y a-t-il une dynamique interne à ces phénomènes? S’interroge Florian Michel. Sont-ils, ou non, une série de produits dérivés mimétiquement d’un schème initial qui serait celui de Marthe Robin et du Père Finet?»

L’historien estime «vérifiable qu’un certain nombre de théologiens pervers ont cherché à Châteauneuf-de-Galaure [l’endroit où résidait Marthe Robin, ndlr] une validation». Parmi eux, le Père Thomas Philippe (1905-1993), convaincu de multiples agressions sexuelles, notamment sur des religieuses. «Nous allons naturellement reprendre les conclusions des différentes enquêtes publiées ces dernières années – celle de la Ciase, celle sur Jean Vanier, celle des Frères de Saint-Jean, puisque dans chacun de ces rapports, Marthe Robin apparaît en toile de fond», souligne Florian Michel. (cath.ch/cx/arch/rz)

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Le Foyer de charité de la Flatière, en Haute-Savoie | © Foyers de charité
16 janvier 2025 | 14:43
par Raphaël Zbinden
Temps de lecture : env. 3  min.
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