La vie monastique est une subversion sociale
Sénégal: «Penser la veille», colloque pour les 50 ans de l’Abbaye de Keur Moussa
Dakar, 12 avril 2013 (Apic) Dans le cadre des célébrations du 50e anniversaire de sa fondation, l’abbaye bénédictine de Keur Moussa, dans la région de Thiès. au Sénégal, a organisé le 11 et 12 avril 2013 un colloque international sur le thème «Penser la veille». Au menu des discussions la mission des ‘veilleurs’ dans les diverses traditions religieuses.
Lors de la messe d’ouverture à la cathédrale de Dakar, le Père Abbé, Ange-Marie Niouky, a adressé un hommage très appuyé à Mgr Marcel Lefebvre alors archevêque de Dakar. C’est en effet lui qui frappa en 1959 à la porte de l’abbaye de Solesmes en France et obtint l’envoi de neuf moines pour une fondation monastique en Afrique.
Parmi les premiers intervenants du colloque, René Nouilhat, professeur d’histoire au centre universitaire de Dijon a évoqué la naissance du monachisme, en Egypte, puis en Occident, comme une forme de réaction sociale à la reconnaissance du christianisme comme religion officielle dans l’empire romain au IVe siècle. Citant Régis Debré, il a rappelé que le moine «veilleur qui attend l’aurore en sandales est l’ombre inversée du hiérarque crossé et mitré». A l’époque et aujourd’hui encore, la vie monastique est dans son essence une subversion sociale.
Une table ronde a permis ensuite d’évoquer la veille dans les diverses traditions religieuses: judaïsme, christianisme, mais aussi islam et religions traditionnelles. L’imam Djamil Mansour Sy a notamment souligné l’influence du monachisme égyptien sur le développement du soufisme, le courant mystique de l’islam. Du côté des religions traditionnelles le veilleur est surtout celui qui transmet le culte des ancêtres.
La discussion s’est également élargie aux défis contemporains avec la veille sur la justice sociale, les droits humains ou encore le développement.
Le moine caméléon
Sur le plan culturel, l’intervention du frère Dominique Catta – un des derniers membres fondateurs de l’Abbaye et découvreur de la harpe africaine, la kora – est très attendue. Il s’exprimera sur le thème : «De la kora du griot à la spiritualité bénédictine». Mais c’est surtout la création d’un concert-spectacle intitulé «le moine Cameléon» qu’il donnera en compagnie de comédiens professionnels dans le plus grand théâtre de Dakar qui retient l’attention.
Un demi-siècle de présence monastique au Sénégal
La présence des bénédictins au Sénégal est due à Mgr Marcel Lefebvre, alors archevêque de Dakar. C’est lui sollicita en 1959 l’abbaye de Solesmes en France, pour l’envoi de moines en vue d’une fondation bénédictine en Afrique. Neuf moines débarquèrent ainsi en 1963 à Keur Moussa.
Situé dans un environnement aride, le monastère de Keur Moussa, dans la région de Thiès, compte aujourd’hui 44 moines, sénégalais, français, gabonais, guinéens, camerounais et congolais. Les responsables reçoivent un nombre important de demandes d’entrée.
L’abbaye accueille de nombreuses personnes, dont des musulmans, des groupes de femmes, ainsi que des pasteurs évangéliques. Elle dispose d’un réseau de partenaires et d’amis et travaille en étroite collaboration avec les populations des villages environnants, sans distinction de religion, en leur apportant une assistance spirituelle, matérielle, technique, et sanitaire.
Dès sa fondation, l’abbaye a développé une importante recherche dans le domaine de la musique liturgique. Tout en respectant la tradition solesmienne d’un goût très vif pour une liturgie soignée et fervente, le frère Dominique Catta a apprivoisé la kora traditionnelle et élaboré une psalmodie en français. Cet effort d’inculturation a rayonné bien au-delà de Keur Moussa.
(apic/bl/mp)