Le cardinal Saraiva Martins a dissuadé Benoît XVI de «canoniser directement» le pape polonais
Rome: Pour l’ancien préfet de la Congrégation pour la cause des saints, Jean Paul II est «le plus grand missionnaire des temps modernes»
Rome, 24 avril 2014 (Apic) «Le plus grand missionnaire des temps modernes». C’est ainsi que le cardinal José Saraiva Martins, ancien préfet de la Congrégation pour la cause des saints, voit le pape Jean Paul II, avec lequel il a longtemps collaboré. A l’approche de sa canonisation historique et de celle de Jean XXIII, le 27 avril prochain, le prélat portugais a confié à l’agence I.MEDIA ses convictions concernant les deux nouveaux saints. Evoquant la sainteté «concrète» de Jean XXIII, le cardinal révèle aussi que le pape polonais aurait pu être dispensé de l’étape de la béatification pour être directement canonisé, mais qu’il en avait dissuadé Benoît XVI dès le début de son pontificat.
Ordonné prêtre en 1957, José Saraiva Martins se souvient parfaitement de l’élection de Jean XXIII, un an plus tard. Le prélat portugais qui a fait ses études à Rome avant d’y devenir professeur évoque la «sainteté évangélique, simple, concrète et vécue» d’Angelo Roncalli. S’il juge que ce pape a offert «une nouvelle pentecôte» à l’Eglise en ouvrant le Concile Vatican II, en octobre 1962, il tient à dire que l’idée d’un concile œcuménique revient à Pie XII (1939-1958), qui avait secrètement nommé une commission de théologiens pour réfléchir à cette éventualité.
Jean XXIII était «un croyant et un prêtre», assure le cardinal Saraiva Martins. Le prélat portugais fut l’un des artisans de sa béatification, en septembre 2000, alors qu’il était préfet de la Congrégation pour la cause des saints.
Dispensé d’un second miracle
Pour pouvoir canoniser Jean XXIII en même temps que Jean Paul II, le pape François a dispensé sa cause de l’examen d’un deuxième miracle. «Le plus important, ce n’est pas tant le miracle, mais l’héroïcité des vertus qui est proclamée à la fin d’un processus sérieux, et le pape ne peut en dispenser personne», explique le cardinal Saraiva Martins. «Le miracle est un sceau avec lequel Dieu confirme l’héroïcité des vertus, précise-t-il. Mais une cause de béatification ou de canonisation peut arriver à terme sans miracle». L’ancien préfet de la Congrégation pour la cause des saints invite cependant à ne pas trop user de telles dispenses, de peur que les responsables des innombrables causes en cours en fassent la demande.
Secrétaire de la Congrégation pour l’éducation catholique de 1988 à 1998, puis Préfet de la Congrégation pour la cause des saints, de 1998 à 2008, le cardinal portugais a travaillé aux côtés de Jean Paul II puis de Benoît XVI. Il évoque la sainteté très concrète et humaine du pape polonais, mais aussi sa sainteté apostolique et missionnaire. «Jean Paul II est le plus grand missionnaire des temps modernes», confie le prélat qui n’hésite pas à le qualifier de «saint Paul des temps modernes». Comme l’apôtre des Gentils, ce pape a voyagé à travers le monde non pas pour des raisons touristiques, mais apostoliques et missionnaires, pour annoncer l’Evangile, rappelle Mgr Saraiva Martins.
Pas de canonisation directe
S’il assure que le procès de béatification et de canonisation de Jean Paul II a suivi un processus normal, le cardinal portugais révèle aussi qu’après la mort du pontife, en avril 2005, quelqu’un de haut placé voulait qu’il soit directement canonisé, sans même passer par l’étape de la béatification. «Benoît XVI m’en a parlé et je lui ai dit que je n’y étais pas favorable, de peur qu’on ne fasse pas les recherches approfondies sur sa vie, sur ses vertus», raconte le haut prélat pour qui le nouveau pape s’était laissé convaincre par un proche de son prédécesseur.
«J’avais alors demandé secrètement son avis à chacun des cardinaux membres de la congrégation», et la plupart étaient favorables à passer par l’étape de la béatification, raconte le cardinal Saraiva Martins, avant de conclure: «J’ai rapporté cela à Benoît XVI, qui m’a remercié de cette réponse». Jean Paul II, dont la cause de béatification avait été exceptionnellement ouverte deux mois après sa mort, a été proclamé bienheureux le 1er mai 2011.
La canonisation des deux papes, le 27 avril, sera «un événement historique et unique, jamais survenu dans l’histoire moderne», souligne le cardinal Saraiva Martins. «Il s’agit de deux papes très aimés par le peuple chrétien et qui ont un rapport avec le Concile Vatican II, deux papes conciliaires dont la canonisation a une signification particulière pour l’Eglise aujourd’hui». (apic/imedia/ami/rz)