Fribourg: «Les Jésuites ont-ils un secret ?» (080391)

Conférence du Père Longchamp: les jésuites au coeur du monde

Fribourg, 8mars(APIC) Les jésuites ont un secret et ils le partagent

abondamment: c’est ce qu’a tenté de montrer le Père jésuite Albert Longchamp, rédacteur en chef de l’hebdomadaire catholique romand «L’Echo illustré», au cours d’une conférence donnée jeudi soir à l’Université de Fribourg. Cette conférence, intitulée «Les Jésuites ont-ils un secret ?» mettait un terme à la «Quinzaine ignatienne» de Fribourg. Au-delà des images

et des clichés colportés depuis des siècles sur la Compagnie de Jésus, elle

a permis au Père Longchamp de dégager le vrai visage des fils de saint

Ignace: des passionnés de Dieu, des précurseurs engagés dans toutes les

réalités humaines, convaincus que l’annonce de l’Evangile passe par le service de l’homme.

Affamés de domination et de pouvoir, animés d’une volonté de puissance

sans bornes, semeurs de discorde et de haine, intrigants, hypocrites,

enseignant «non l’amour de Dieu mais la haine de l’humanité», «vrais fossoyeurs de l’humanité», «fer de lance chargé de démolir le protestantisme»:

De Pascal à Henri Dunant et aux théologiens modernes, les critiques ne manquent pas au long des siècles à l’égard des jésuites, a fait remarquer le

Père Longchamp. La Compagnie n’a cessé de fasciner les esprits, a-t-il relevé: elle fait peur et séduit. Querelle des rites, cachots secrets, casuistique, probabilisme moral, thèses régicides, découvertes scientifiques,

autant d’épisodes de son histoire qui lui ont fait une réputation peu enviable, héritage encore lourd pour les actuels successeurs de saint Ignace

qui, surtout depuis Vatican II, tentent de s’en dégager.

Faire le choix de Dieu dans le monde

Un secret, les jésuites en ont un, a affirmé le Père Longchamp: annoncer

l’Evangile par le service de la foi et la promotion de la justice en unissant adoration de Dieu et service de l’homme, fidèles à l’intuition de leur

fondateur contenue dans les «Exercices spirituels»; convaincus que

«l’histoire est le devenir de Dieu, que Dieu advient dans notre histoire,

que c’est là qu’il est à découvrir». Un secret qui les pousse à «s’investir

dans les lieux les plus divers où se joue le destin de l’humanité actuelle», car pour tout jésuite, faire découvrir Dieu c’est rendre justice à

l’homme.

«Etre jésuite, c’est avant tout un esprit», a affirmé le Père Longchamp:

c’est se vaincre soi-même pour évangéliser, c’est une façon de se rapporter

à Dieu sans rien négliger de l’homme. Ce «choix de Dieu dans le monde», qui

à la suite de saint Ignace pousse très loin la logique de l’Incarnation et

situe souvent le jésuite en marge de l’Eglise institutionnelle, comporte

des risques, témoins les nombreux martyrs de la Compagnie, dont les derniers sont les six jésuites de l’Université UCA de San Salvador, assassinés

par des militaires le 16 novembre 1989. Conflits, résistances, critiques,

suppression, rien n’a été épargné à la Compagnie de Jésus au long de son

histoire.

Les jésuites, levain dans la pâte

Ce qui fait la force du jésuite, a relevé le Père Longchamp, c’est l’alliance étroite entre contemplation et action, qui donne la priorité à la

raison sur l’exaltation mystique. Un réalisme qui se traduit dans l’obéissance, fondement de toute son action. Elle est «union de plusieurs libertés» et non forme de caporalisme, principe de communion dans l’espace et le

temps, qui laisse leur place à la critique et au dialogue.

Le secret des jésuites, a conclu le Père Longchamp, a pris de nouveaux

visages à la suite de la 32e Congrégation générale en 1974: engagement aux

côtés des plus pauvres dans les communautés de base et les paroisses, présence dans les institutions laïques, le monde de la culture et des médias.

Il s’agit aujourd’hui pour les jésuites de servir l’homme en tout lieu,

d’être les instruments d’une plus grande humanisation de la société. (apiccor)

8 mars 1991 | 00:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 3  min.
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