
Jésus mon doudou!
Rassurez-vous, je ne me défie pas encore de la conciliation entre économie et foi, mais il nous faut faire un excursus du côté de la seconde, qui nous aimante. Nous gravitons autour d’elle, même dans la sphère économique. Ou plutôt elle est cette force de gravité à laquelle personne n’échappe, car nous lui devons de tenir debout. Mais j’avance trop vite en concluant dès l’énoncé de principe. Reprenons par le tout début.
Situons-nous autour d’une table d’amis. J’y étais ce soir-là. Comme cette histoire est celle de tout le monde, invitez-vous aussi à table, vous vous y retrouverez de suite en terrain connu. Les discussions vont bon train et voilà qu’après la météo et la politique, la femme d’un ami lance le sujet religieux.
«Vous les croyants vous êtes immatures. Vous croyez en Dieu pour vous rassurer parce que vous avez peur de mourir. Vous êtes comme le petit enfant qui serre son doudou dans ses bras pour s’endormir en paix, se rassurer d’une présence inexistante. Votre Jésus c’est votre doudou, une peluche de l’imagination. Réveillez-vous, il faut grandir et devenir adultes!»
J’essuyais, dans le vif des émotions, un puissant coup de massue. Pour regagner une distance «sécuritaire» et intellectualiser quelque peu le propos, nous pouvons nous reporter à la fameuse peinture bâloise du Christ dans la tombe, de Hans Holbein le jeune (1497-1543)! Un doudou auquel il manque l’irrationnel de la résurrection, un christ bien mort, dont les traits en décomposition ne rassurent aucunement.
Le chrétien est-il donc le fou immature qui choisit l’absurde de la résurrection, par ouï-dire, parce qu’il préfère accorder sa confiance à des fous le précédant et qu’il n’a pas même connus? Non, ce chrétien-là peut difficilement être autrement qu’abruti par ses peurs, concédons-le. Ne risquons-nous pas, alors, de concéder bien plus, tous les raisonnements sans fondements tangibles, toutes les soi-disantes preuves de l’existence de Dieu, et les évangiles et toutes les déductions que l’on en tire? Allons-y gaiement, c’est toute la théologie qu’il faut bien concéder.
Ce qui précède commence à sentir fort le licenciement, heureusement que personne ne lit cette chronique, je peux écrire sans risque et sans panache. J’espère cependant que vous conviendrez avec moi que l’enjeu du «Jésus-doudou» ne se situe pas dans ce que l’on dit médiatement de Lui, mais dans l’effectivité (et pas seulement la possibilité, agnostique,) d’une relation de Dieu à l’homme, à chaque homme. Il y a donc une rencontre à faire, une présence réelle à expérimenter; sinon il n’y a rien, un tombeau vide… non! un tombeau plein…
Pascal Fessard
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