Jérôme Jean Hauswirth

Le pharisien et le publicain

Homélie du 30e dimanche C (Lc 18, 9 – 14) «Appuie-toi sur Dieu. Adhère à Lui. Mais appuie-toi avec ta faiblesse, non avec ta vertu.»

Quel est mon rapport à Dieu? Comment suis-je face à lui? La tentation courante qui nous guette tous est de s’estimer justes devant Dieu. Alors «Jésus dit une parabole pour certains hommes qui étaient convaincus d’être justes…».

Qu’est-ce être juste? Dans le sens biblique, être juste correspond à peu près à être saint. Le juste est celui dont la vie se conforme à la volonté de Dieu. D’ailleurs les évangiles qualifient Jésus de «juste», comme on le fait pour de nombreux saints. Etre juste est donc un idéal à rechercher.

 

Deux personnages bien typés et bien connus font leur entrée dans la parabole: Le pharisien et le publicain. Le pharisien priait en lui-même, i.e. à mi-voix selon l’usage juif. Cet homme prie en se regardant et en s’écoutant prier. Le motif de sa prière tient dans la satisfaction, dans le contentement qu’il éprouve à s’admirer lui-même, en se comparant aux autres, en s’estimant supérieur aux autres…

Il serait un peu court de résumer cette homme à l’hypocrisie. Les pharisiens étaient vraiment des hommes pieux, jeûnant deux fois par semaine et payant volontairement deux fois les impôts pour le temple et les pauvres. L’image donnée de ce pharisien semble bien correspondre à la réalité, un homme priant mais, là est le problème, un homme beaucoup trop satisfait de lui-même.

Face à lui, en retrait, un publicain. Dans notre récit il à l’air sympathique. Mais il ne l’était pas à l’époque de Jésus. Les publicains étaient l’image même de l’impureté religieuse. Ils étaient chargés de percevoir les taxes est les impôts, le faisant en extorquant les contribuables. Ajoutez à ceci qu’ils travaillaient pour l’occupant romain et que la monnaie qu’ils brassaient, celle de l’empire, affirmait que l’empereur était un Dieu, et vous comprendrez pourquoi ils étaient si mal vus des pieux pharisiens.

Ecoutons cependant comment prie ce malhonnête publicain: mon Dieu, prend pitié du pécheur que je suis. Quelle belle prière! Il n’a rien à dire si ce n’est présenter sa misère et son indignité. Ce qu’il dit n’est pas une excessive humilité, mais la vérité: il est un pauvre pécheur, comme le pense à juste titre le pharisien!

 

Arrivé à ce point du récit, les auditeurs de Jésus ont bien dû être surpris par la conclusion. La sentence tombe comme un coup de tonnerre. Qui s’élève sera abaissé, qui s’abaisse sera élevé. Rendez-vous compte! Jésus s’affirme juge d’une façon contraire à toute justice!!! Comment oser dire du pieux pharisien, si fidèle à la loi, qu’il sera abaissé! Comment oser prétendre que ce mécréant de publicain sera pardonné! Qui donc est cet homme pour affirmer de telles choses?

Il est le fils de Dieu, venu nous révéler que Dieu est Amour, qu’Il aime d’un amour gratuit, qu’Il ne nous aime pas parce que nous sommes fidèles, mais qu’Il nous aime malgré notre infidélité. Si nous sommes infidèles, Lui reste fidèle, parce qu’Il ne peut pas se renier Lui-même. Notre Dieu est un Dieu souffrant avec le pécheur, un Dieu souffrant de son péché.

Le problème de ceux qui se croient justes est qu’ils n’ont plus besoin de Dieu. En ce sens, ce péché est le plus grave. Celui qui se croit juste se suffit à lui-même, voilà la faute du pharisien.

 

Ainsi le personnage principal de la parabole, le publicain, est un pécheur pardonné. La présence de l’autre ne sert qu’à contraster, pour rendre le récit plus saisissant. Au coeur de la parabole tient l’enseignement que l’homme n’est jamais juste mais toujours à justifier. L’homme n’est pas juste par lui-même, par ses actes. Non! L’homme est juste parce que Dieu, Le Juste, s’est donné à lui pour sa justification.

Dieu se trouve impuissant et désarmé devant l’homme satisfait de lui-même qui n’attend rien de personne. Par contre Dieu réalise des merveilles avec celui qui se reconnaît pécheur et qui accueille sa grâce.

En définitive, il est possible d’être juste en accueillant le pardon de Dieu.

Le père Monier, jésuite, disait:

«Appuie-toi sur Dieu. Adhère à Lui. Mais appuie-toi avec ta faiblesse, non avec ta vertu».

 

Seigneur, aide-moi à ne pas appliquer cet évangile aux autres, mais à découvrir ma propre suffisance, mon orgueil, ma manière à moi de mépriser les autres.

Seigneur, cela est vrai : l’homme n’est jamais juste par lui-même, mais il peut être justifié par toi.

Mon Dieu, prend pitié du pécheur que je suis,

Et dis seulement un mot, et nous serons guéris.

Oui, accueillir ton pardon Ô Père, voilà toute notre justice.

Amen.

 

Père Jérôme Jean

25 octobre 2013 | 10:24
par Jérôme Jean Hauswirth
Temps de lecture : env. 3  min.
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