Le responsable musulman Montassar BenMrad prône le dialogue intra et interreligieux

Genève, 27.07.2015 (cath.ch-apic) Le Vaudois Montassar BenMrad, élu le 14 juin dernier à la présidence de la Fédération d’organisations islamiques de Suisse (FOIS), est «un homme d’ouverture et de dialogue», assure le 27 juillet à cath.ch Hafid Ouardiri, directeur de la Fondation de l’entre-connaissance, à Genève.

A la tête de la plus grande association faîtière islamique du pays, Montassar BenMrad est un partisan de la concertation, aussi bien entre les diverses composantes de la communauté musulmane, qu’avec les autres religions. Hafid Ouardiri est enthousiaste quant à la nomination de l’expert en informatique vaudois, qu’il connaît bien. «C’est la personne idéale pour mettre en place les projets concrets et visibles qui sont désormais nécessaires pour la communauté islamique du pays», assure l’intellectuel genevois. «Montassar BenMrad va agir dans un esprit de dialogue et d’ouverture, avec un grand sens de la citoyenneté», affirme Hafid Ouardiri. Il est persuadé que le responsable musulman vaudois saura établir les structures adéquates, notamment au niveau de la communication, pour faire avancer l’image de l’islam dans le pays. Le Genevois a également bon espoir qu’il saura articuler les relations entre les différents groupes, en particulier les deux associations faîtières musulmanes que sont la FOIS, basée à Saint-Gall, et la Coordination des organisations islamiques de Suisse (COIS), basée à Zurich. Il précise que la Fondation de l’entre-connaissance n’est pas affiliée à la FOIS ou à une autre organisation faîtière, dans un souci d’indépendance, mais que son organisation est en relation avec la fédération, qui représente quelque 150 centres islamiques de Suisse.

Un bâtisseur de ponts

Montassar BenMrad, d’origine tunisienne, a été nommé à la suite du décès de l’ancien président de la FOIS, Hisham Maizar, le 14 mai dernier. Le nouveau dirigeant est engagé depuis plus de 20 ans dans le travail associatif et dans le dialogue interreligieux. Il a activement contribué à construire des ponts et des liens de convivialité aussi bien au sein de la communauté musulmane en Suisse que dans le cadre des activités interreligieuses, assure le site internet de la FOIS. Le docteur BenMrad est l’un des membres fondateurs de la Maison de L’Arzillier en 1998, maison du dialogue située à Lausanne, ainsi que du groupe Musulmans et Chrétiens pour le Dialogue et l’Amitié, en 2001. Il est l’un des fondateurs et le premier président de l’UVAM, Union Vaudoise des associations musulmane en 2005. Il est enfin l’un des fondateurs avec Hisham Maizar de la FOIS, en 2006, et a été impliqué dans la révision du premier mandat du Conseil Suisse des religions, qui réunit les responsables des communautés monothéistes de Suisse, dont il est aujourd’hui vice-président.

Une approche modérée

Montassar BenMrad présente, dans le quotidien romand Le Temps du 27 juillet, les principales orientations de sa nouvelle fonction et ses positions sur la place de l’islam en Suisse. Directeur chez IBM et diplômé de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), il s’impose indéniablement comme un modèle d’intégration pour les musulmans du pays, souligne Le Temps.

Montassar BenMrad assure conserver une approche modérée de la religion, respectueuse de ses principes et de ses traditions. Une affirmation que confirme à cath.ch Hafid Ouardiri. «Ce serait une erreur de tomber dans le syncrétisme et dans les dérives de certains penseurs qui dénaturent l’Islam. Par exemple, il n’est pas juste de dire que le port du voile ne fait pas partie de la tradition. Tout un chacun est libre de la suivre, ou non. Mais nous ne pouvons pas la nier», affirme-t-il dans le journal romand. S’il souligne n’avoir aucune prise sur «les tragédies effarantes» qui se déroulent à l’étranger, l’homme d’affaires assure toujours miser sur le dialogue pour désamorcer les conflits locaux. Il veut ainsi aller à la rencontre de l’Union démocratique du centre (UDC), comme des groupes n’appartenant pas à la FOIS, même ceux qu’il qualifie de «sectaires». «Je ne crois pas qu’on arrivera à bout de ces mouvements avec des mesures policières. Il faut leur parler. Ils sont parfois plus réceptifs aux arguments religieux qu’à certains articles du code pénal», relève-t-il. Montassar BenMrad s’oppose ainsi à la création- telle que souhaitée par l’imam Mustafa Memeti, qui prêche à la maison des religions à Berne- d’un organe de contrôle de supervision de toutes les mosquées, en collaboration avec les autorités suisses. Il mise plutôt sur la responsabilité citoyenne et invoque un risque de délation gratuite.

Faire contrepoids à Nicolas Blancho

Le responsable musulman de 48 ans entend en particulier faire contrepoids, en Suisse romande, au Conseil central islamique suisse (CCIS) de Nicolas Blancho. Le groupe d’inspiration salafiste est parvenu, grâce à une communication provocante, à s’assurer une importante médiatisation. «C’est gênant, car ils ne sont pas représentatifs des communautés musulmanes en Suisse. Nous voulons faire entendre la voix du milieu, la voix de la modération», souligne Montassar BenMrad. Il veut ainsi renforcer les relations avec la presse. Pour ce faire, il a nommé deux porte-parole, dont, pour la Suisse romande, Pascal Gemperli, président de l’Union vaudoise des associations musulmanes (UVAM).

Prévention et formation

Pour lutter contre la radicalisation, le nouveau président de la FOIS, créée en 2006, entend travailler en priorité sur la prévention et la formation. «Les jeunes qui n’ont aucune connaissance de l’islam sont les plus à risque. Les mouvements sectaires peuvent leur faire croire n’importe quoi. Leur donner des bases, des connaissances de la religion, est un bon vaccin», relève-t-il. Montassar BenMrad regrette d’ailleurs qu’il n’y ait pas davantage de musulmans socialement intégrés qui servent d’exemple. «Mais la jeunesse a besoin de modèles. C’est nécessaire pour éviter un repli identitaire. Certains jeunes sont sûrs qu’ils n’ont pas trouvé d’emploi, car ils sont musulmans et qu’ils ont été discriminés. Or, chacun peut réussir avec de la bonne volonté», assure le responsable musulman. (apic/lt/rz)