Suite à l'»affaire Huonder», les libres penseurs incitent à sortir de l'Eglise

Zurich, 25.08.2015 (cath.ch-apic) L’Association suisse des libres penseurs a débuté une campagne d’affichage à l’adresse des catholiques, le 24 août 2015, dans diverses villes de Suisse alémanique. Suite à l’»affaire Huonder», les militants de la laïcité veulent inciter les catholiques à réfléchir s’ils veulent rester dans l’institution ou sortir de l’Eglise. La campagne ne prend cependant pas racine en Suisse romande.

Interrogé par cath.ch, Eric Perruchoud, président à la fois de la Libre Pensée de Genève et de l’Association vaudoise de la Libre Pensée, connaît l’existence de cette campagne en Suisse alémanique. Il souligne cependant que chaque section affiliée à l’Association suisse des libres penseurs est libre de faire campagne ou pas. Il souligne qu’en Suisse romande, pour le moment, rien n’est prévu dans ce sens. Et de relever que son association n’a pas les moyens financiers de se lancer dans une campagne d’affichage, même si les paroles de dignitaires de l’Eglise catholique condamnant l’homosexualité ont également eu un écho en Suisse romande.

Panneaux d’affichage dans les gares

En Suisse alémanique, les libres penseurs ont débuté leur campagne sur les panneaux d’affichage électroniques et vont également poser des affiches, mais uniquement en langue allemande. Vice-président des libres penseurs suisses, l’enseignant haut-valaisan Valentin Abgottspon précise à cath.ch que de telles affiches, outre les villes de Suisse alémanique, seront également présentes – mais seulement en allemand – à Sion et à Fribourg. Dès le 24 août, l’affichage se fait dans les gares de Zurich, Zurich Stadelhofen, St-Gall, Zoug, Lucerne et Fribourg, et dès le 31 août à Coire, Davos, Landquart, Brigue, Viège et Sion, signale l’Association suisse des libres penseurs.

Le vice-président des libres penseurs affirme que son association ne demande pas aux catholiques de simplement sortir de l’Eglise. EIle leur demande de réfléchir s’ils veulent rester dans une institution qui se réfère à un passage du Lévitique selon lequel «Si un homme couche avec un homme comme on couche avec une femme, ils ont fait tous deux une chose abominable, ils seront punis de mort: leur sang retombera sur eux» (Lévitique 20:13)». L’évêque de Coire avait notamment mentionné ce passage à Fulda, en Allemagne,  lors d’une conférence qu’il avait donnée fin juillet sur «Le mariage, cadeau, sacrement et mission».

Homosexualité: le catéchisme dans le collimateur

Et Valentin Abgottspon de relever à propos de l’attitude de l’Eglise  face à l’homosexualité qu’il ne s’agit pas seulement d’un livre de l’Ancien Testament, mais également du catéchisme actuellement en vigueur de l’Eglise catholique (de 1992), aux numéros 2357, 2358 et 2359. «Je ne peux pas appartenir à une institution qui présente l’homosexualité  comme ‘des dépravations graves’  et des actes ‘intrinsèquement désordonnés’, ‘contraires à la loi naturelle’, qui ‘ne sauraient recevoir d’approbation en aucun cas’». Mais, précise-t-il, «c’est une invitation à réfléchir». L’enseignant haut-valaisan affirme que cette invitation vise en premier lieu les catholiques qui le sont par habitude plutôt que par conviction.

Valentin Abgottspon conteste le fait que son association prône avant tout les sorties d’Eglise, «comme l’a écrit la presse». Mais dans les faits, Andreas Kyriacou, président de l’Association suisse des libres penseurs, dans sa lettre ouverte aux catholiques publiée sur son site internet www.frei-denken.ch, affirme: «chers catholiques, vous êtes tous aussi Huonder. En appartenant à l’Eglise catholique romaine, vous soutenez le système qui a engendré Huonder et continue à le protéger». Kyriacou renvoie sur le site internet à un modèle de «déclaration de sortie de l’Eglise» – en huit langues – et souligne que toute personne a le droit de sortir en tout temps de l’Eglise et que c’est un droit protégé par la Constitution suisse. L’appel à quitter l’institution ne peut être plus clair…

«Les catholiques pensent par eux-mêmes»

Dans une lettre intitulée «Les catholiques pensent par eux-mêmes», Sabine Rüthemann, chargée d’information du diocèse de Saint-Gall, estime qu’en écrivant «Vous êtes tous Huonder», sur des affiches et dans leur lettre ouverte, les libres penseurs blessent les catholiques de Suisse. Elle souligne que les catholiques sont des personnalités autonomes, capables de penser par elles-mêmes, de façon libre. Les catholiques sont conscients qu’ils sont tous ensemble «l’Eglise» et aussi que l’Eglise catholique est dès le départ une «unité dans la diversité». De plus, précise-t-elle, un évêque n’est pas toute «l’Eglise en Suisse», en soulignant que le dernier exemple de cette réalité vient des diverse réactions aux déclarations de Mgr Huonder lors de sa conférence de Fulda, où il a abordé la question de l’homosexualité.

Plusieurs évêques, dont Mgr Markus Büchel, évêque de Saint-Gall), Mgr Felix Gmür, évêque de Bâle, et Mgr Charles Morerod, évêque de Lausanne, Genève et Fribourg, ainsi que l’Abbé Urban Federer, de l’abbaye bénédictine d’Einsiedeln, ont réagi aux propos tenus à Fulda. Ils ont fait savoir dans leur prise de position qu’ils avaient une autre conception théologique à se sujet.

Une campagne dirigée contre l’ensemble de la communauté ecclésiale

Sabine Rüthemann relève que les libres penseurs, avec leur lettre ouverte et leur campagne d’affichage font preuve d’un zèle missionnaire qui, depuis longtemps, n’est plus à l’ordre du jour dans l’Eglise catholique. La campagne, qui est dirigé contre l’ensemble de la communauté ecclésiale, rappelle l’époque du Kulturkampf. Mais les réalisations de l’Eglise dans les paroisses, les organisations de jeunesse, les organismes spécialisés ou les oeuvres sociales «ne doivent pas être dévaluées en quelques phrases dans lesquelles il ne s’agit que d’un seul évêque». L’attachée de presse regrette que les libres penseurs se servent de cet exemple pour militer abusivement en faveur des sorties d’Eglise. (apic/be)