Réfugiés syriens dans  un camp de  la Bekaa, au Liban | © Maurice Page
Suisse

Vaud: Le Conseil pastoral cantonal scrute les défis de la migration

Lausanne, 08.10.2015 (cath.ch-apic) Les problèmes de migrations ne vont pas changer «tant que des solutions régionales ne sont pas trouvées», a lancé Jean-Pierre Hocké, ancien haut-commissaire des Nations Unies pour les réfugiés (HCR). Il s’exprimait à l’invitation du Conseil pastoral cantonal catholique vaudois à Lausanne, qui s’est penché, le 7 octobre 2015 à Lausanne, sur l’asile et la migration.

Cette démarche s’inscrivait dans la foulée du message du pape François pour la journée mondiale des migrants et des réfugiés, qui aura lieu le 17 janvier 2016, informe l’Eglise catholique dans le canton de Vaud (ECVD). Le titre du message est tout un programme: «Migrants et réfugiés nous interpellent. La réponse de l’Evangile de la miséricorde».

Invité d’honneur, Jean-Pierre Hocké a rappelé en préambule qu’à la fin des années 1970, 1,3 million de boat-people d’Asie du Sud-Est ont été intégrés à travers le monde. «Les structures d’accueil ont fonctionné à ce moment-là, l’opération a réussi», relève-t-il. Et l’ancien haut-commissaire des Nations Unis pour les réfugiés de se pencher sur deux exemples actuels: le Moyen-Orient et l’Afrique.

Moyen-Orient: un siècle de violence

Au Moyen-Orient, la violence que l’on connaît aujourd’hui n’est pas récente. Il faut, selon Jean-Pierre Hocké, remonter à la Première Guerre mondiale. Alors que l’Empire ottoman avait pris le parti de l’Allemagne, une coalition panarabe avait soutenu les alliés en échange de la constitution, au sortir de la guerre, d’un grand pays comprenant la Syrie, le Liban et une partie de l’Irak. Mais on le sait, les promesses n’ont pas été tenues, les Français et les Anglais se partageant l’Empire ottoman (accords Sykes-Picot). Jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale, le système colonial européen a dominé le Moyen-Orient. Mais les populations ont toujours combattu pour obtenir l’indépendance. Dès 1945, le tableau change, avec la montée des nationalismes. Par la suite, l’apparition de Nasser en Egypte, Kadhafi en Libye et du père de Bachar, Hafez el-Assad, en Syrie change la donne. Indépendance acquise, ils rêvent de reconstituer une grande région pan-arabique. Cela n’a pas fonctionné, souligne Jean-Pierre Hocké.

La succession des dictatures a amené l’élimination systématique de toute opposition, ce qui explique que quand un dictateur tombe, il n’y a personne pour reprendre le flambeau, et que c’est le chaos généralisé, explique l’ancien responsable des Nations unies. Il précise qu’une violence sous-terraine ne peut qu’engendrer une pire violence. C’est celle-là qui produit le flux de réfugiés que l’on connaît aujourd’hui. «Et c’est une réalité qui va durer, en tout cas pour un certain temps».

Migration africaine endémique

Depuis plus de 20 ans, le HCR a mis en garde contre le danger des migrations en Afrique. «Les données statistiques montrent que 5 à 10% de la population totale africaine bouge au sein du continent. Parmi ces personnes, entre 2,5 et 5% veulent quitter l’Afrique», poursuit Jean-Pierre Hocké. Quand on sait qu’il y a aujourd’hui un milliard d’habitants sur le continent, le calcul est simple: il y a chaque année entre 1,25 et 5 millions d’Africains qui veulent quitter leur continent. «Et ça ne va pas changer, avertit l’ancien haut-commissaire, tant que des solutions régionales ne sont pas trouvées. C’est le défi de l’Europe et du monde».


Encadré

La mission particulière de l’ECVD

A la question de l’abbé Christophe Godel, nouveau vicaire épiscopal pour le canton de Vaud, de savoir quelle était la mission particulière de l’ECVD dans le domaine des réfugiés et des migrants, Jean-Pierre Hocké a répondu: «Vous êtes au quotidien avec eux. Il faut que vous fassiez mieux connaître vos engagements, afin, notamment, de désamorcer des idées reçues. Il vous faut également faire un travail de sensibilisation auprès des autorités et des partis politiques».

Ce travail au quotidien se traduit par des personnes ressources présentes dans le domaine de l’asile et auprès des personnes migrantes en précarité:

– A Point d’Appui, espace multiculturel des Eglises à Lausanne (lieu œcuménique), un accueil, de l’écoute, des cours de français et d’informatique, ainsi que des accompagnements sont proposés par des aumôniers et une soixantaine de bénévoles du lundi au vendredi ;

– Le médiateur Eglises-réfugiés reçoit les personnes migrantes en précarité au Point d’Appui ou en d’autres lieux, facilite les contacts avec les services de l’Etat et des services sociaux, soutient dans les démarches, oriente dans le réseau ;

– Les aumôniers de la Pastorale sociale et de rue, présents sur la Côte, dans le Grand Lausanne, dans l’Ouest lausannois, sur la Riviera et dans la Broye, organisent avec des bénévoles les Permanences accueil, en collaboration avec Caritas, à Vevey, Nyon et Payerne; le Roseau à Moudon; le Lieu d’accueil (foyer St-Vincent) pour femmes à Renens; la Distribution de cornets alimentaires à Renens, Lausanne, Payerne, Moudon et Clarens; les Dimanches solidaires à Renens, Lausanne et Villeneuve.

– Le responsable du Département Solidarités, Pascal Bregnard, coordonne ces activités pastorales et diaconales.

– Une présence d’aumônerie est assurée dans les centres d’enregistrement et de procédure (CEP) à Vallorbe et aux Rochats. Les aumôniers sont en lien avec un espace d’accueil animé et géré par l’Association auprès des requérants d’asile Vallorbe œcuménique et humanitaire (ARAVOH) et avec une permanence juridique du Service d’aide juridique aux exilés (SAJE) à proximité du CEP de Vallorbe.

– Caritas Vaud propose différentes prestations sociales en plusieurs lieux du canton, comme les épiceries sociales, les magasins d’habits et des consultations sociales. (apic/com/rz)

Réfugiés syriens dans un camp de la Bekaa, au Liban | © Maurice Page
8 octobre 2015 | 15:07
par Raphaël Zbinden
Temps de lecture: env. 4 min.
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