L'acteur Jean-Luc Bideau et le directeur du séminaire de LGF, Nicolas Glasson, 30.04.16 (Photo: Pierre Pistoletti)
Suisse

Le séminaire, de la fiction à la réalité

L’heure était au débat, samedi soir, entre l’abbé Nicolas Glasson et Jean-Luc Bideau. Le directeur du séminaire de Lausanne, Genève et Fribourg et l’acteur genevois, alias Père Etienne Fromenger dans la série Ainsi soient-ils, ont confronté leur vision de l’Eglise et de la formation des prêtres, dans le cadre des Rendez-vous cinéma de l’Eglise catholique romaine (ECR) genevoise, Il est une foi.

Tous deux peuvent se targuer d’une certaine expérience. L’abbé Nicolas Glasson accompagne depuis bientôt dix ans les futurs prêtres de son diocèse. Quant à Jean-Luc Bideau, il a revêtu les habits sacerdotaux pour les 24 épisodes de la série Ainsi soient-ils, diffusée d’octobre 2012 à octobre 2015 sur Arte.

Une véritable immersion, pour l’acteur genevois. D’autant que la série est réaliste, selon le «vrai» directeur de séminaire, qui atteste de la bonne préparation des producteurs, «très bien documentés sur l’aspect liturgique, notamment».

Le prêtre selon Bideau

Cette plongée dans l’univers sacerdotal n’a eu aucun effet sur la foi de Jean-Luc Bideau, qui «ne croit en rien». Ou du moins «pas au Dieu de la Bible». Elle l’a en revanche confronté à la réalité de la formation au sacerdoce, à la générosité des candidats, mais également à leur part d’ombre.

Un prêtre a pour mission de «rendre l’homme plus sage qu’il ne l’est», explique celui qui interprétait le rôle du Père Etienne Fromenger, figure de résistance engagée contre une institution coupée du monde et conservatrice.

Une vision de l’Eglise qui colle relativement bien avec celle de Jean-Luc Bideau dans la vraie vie. Il lui reproche d’avoir «perdu le sens précis de ce que devrait être l’amour du prochain».



De quoi nourrir le débat. «Comme prêtre, nous sommes parfois dans une machine, explique l’abbé Nicolas Glasson. On nous réduit à des services, ce qui peut refroidir la charité pastorale. La série est réaliste de ce point de vue. On voit des jeunes prêtres généreux, mais empêchés de se donner comme ils le souhaiteraient par une équipe pastorale qui cherche à téléguider complètement l’un d’entre eux, par exemple».

Des séminaristes vulnérables

Ainsi soient-ils est un peu caricatural, confie le directeur de séminaire. «Chaque personnage incarne une problématique en y étant d’une certaine manière réduit. Elle a toutefois le mérite de toucher à tous les points délicats qui secouent l’Eglise actuellement».

Les cinq séminaristes de la série ont en effet un profil clairement défini: du scout breton naïf à l’archéologue homosexuel, en passant par le fils d’un riche entrepreneur et un ex-taulard. Dans la réalité, c’est plus complexe. Une palette de nuances plus large constitue l’identité des futurs prêtres. Malgré cela, Ainsi soient-ils interpelle l’Eglise quant à la manière d’intégrer les candidats au sacerdoce, sans occulter leurs limites.

Dans la réalité, quel regard poser sur la vulnérabilité des séminaristes? «Il faut réunir les éléments qui feront qu’ils se sentent suffisamment libres pour être ce qu’ils sont, en prenant conscience de leur faiblesse, non pour la fuir, mais pour en tirer une qualité». Ce n’est pas toujours possible, reconnaît-il.

Ouvrir le débat

«Diffuser Ainsi soient-ils, qui aborde frontalement des questions sensibles, a suscité quelques résistances», explique Geoffroy de Clavière, initiateur des Rendez-vous cinéma de l’ECR et grand amateur du septième art. «C’est surtout un moyen d’ouvrir le débat à travers le cinéma, formidable vecteur de communication».

Samedi soir, si le débat n’a pas été des plus engagés, deux mondes sont allés à la rencontre l’un de l’autre. Et c’est cela qui importe aux yeux de Geoffroy de Clavière. «Par définition un festival est ouvert. A travers Il est une foi, l’Eglise sort pour aller à la rencontre des gens». Et les gens n’ont pas négligé l’invitation. 400 personnes, chaque jour, sont venus la retrouver dans les salles obscures du Grütli. 


Il est une foi

Pour la deuxième année consécutive, l’Eglise catholique romaine à Genève a organisé les Rendez-vous Cinéma: Il est une foi, aux Cinémas du Grütli, du 27 avril au 1er mai 2016.

L’occasion de visionner 15 films, avec un espace de dialogue et d’échange, pour débattre et discuter autour du septième art, de la foi et des questionnements humains.

L'acteur Jean-Luc Bideau et le directeur du séminaire de LGF, Nicolas Glasson, 30.04.16
1 mai 2016 | 18:24
par Pierre Pistoletti
Temps de lecture: env. 3 min.
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