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Homélie

Homélie du 21 août 2016 ( Lc 13, 22-30)

Mgr Jean-Marie Lovey, évêque de Sion – Hospice du Grand-Saint-Bernard

  Frères et soeurs, chers amis,
Le pèlerinage est toujours une grâce. Il invite à un déplacement. Géographique parfois. Intérieur, toujours. Jésus était un pèlerin. Il a fait un si long déplacement d’auprès du Père pour venir habiter parmi nous ! Mais aujourd’hui nous le voyons, marcher sur notre terre, traverser ville et villages en enseignant, en route avec les siens vers Jérusalem.

Certains parmi nous se sont fait pèlerins, l’espace d’une journée. Beaucoup d’autres se rendront à Rome cet automne répondant à l’invitation de se faire pèlerin de la Miséricorde. Tous nous sommes invités à suivre Jésus sur le chemin qui monte à Jérusalem. En effet, « Le pèlerinage est un signe particulier de l’Année Sainte : il est l’image du chemin que chacun parcourt au long de son existence. La vie est un pèlerinage, et l’être humain un viator, un pèlerin qui parcourt un chemin jusqu’au but désiré. » (MV 14). Alors, marchons un instant aux côtés de Jésus et entrons dans le dialogue qui nous est rapporté.

Une histoire de porte

On l’interroge sur le nombre des sauvés. N’y aura-t-il que peu de gens à être sauvé ? Dans le fond, on interroge Jésus sur la Miséricorde de Dieu. S’étendra-t-elle à tous ou seulement à quelques-uns ? Et Jésus répond par une histoire de porte. Une porte étroite à découvrir et dont il faut s’efforcer d’en franchir le seuil. La porte marque en effet la frontière entre deux mondes. Celui du dehors et celui du dedans. St Bernard qui a fondé cet hospice a bien compris que le passage entre le Nord et le Sud était ici étroit et difficile. Beaucoup s’efforçaient de le franchir au risque de leur propre vie. Et en y installant une communauté d’accueil il initiait sur ce col, à cette porte des Alpes, une oeuvre de Miséricorde. La porte de la miséricorde, à l’entrée de l’hospice, comme toutes les portes saintes de cette Année jubilaire, est investie de ce symbolisme biblique.

A chacun de nous pécheurs, de nous efforcer de passer la porte étroite. Il est peut-être plus facile de franchir, même par tempête, le col du GSB que de sortir de notre espace ordinaire, celui des soucis quotidiens, d’une certaine grisaille ou d’une certaine monotonie ou superficialité, d’une pénombre ou d’une obscurité pour entrer dans l’espace symbolique de la grâce et de la rencontre avec le Christ, dans l’univers de la Miséricorde et de la lumière. Et c’est à cela que le passage de la porte sainte nous invite.

«Confiance totale en la Miséricorde de Dieu»

Le franchissement de la porte sainte ne peut pas se réduire à un acte machinal, superstitieux ou magique ; ce n’est pas d’avoir mangé ou bu avec Jésus qui va nous sauver. Ce franchissement ne portera son fruit que s’il exprime une authentique démarche spirituelle d’amour renouvelé envers chacun ; une démarche de foi, de confiance totale en la Miséricorde de Dieu. Dans sa vision, le prophète Isaïe faisait revenir les nations les plus éloignées, celles des îles lointaines par toutes sortes de moyens de transport -sur des chevaux, des chariots, à dos de mulets ou de dromadaires— jusqu’à la montagne sainte de Jérusalem. Cette image très éloquente du prophète oriente notre attention vers la question du début : quelle est la grandeur de la miséricorde de Dieu. Un peu ? Beaucoup ? Passablement ?… Infiniment, rappellera le Pape François puisque « Miséricorde est le mot qui révèle le mystère de la Sainte Trinité (MV2) » Efforçons-nous de passer cette porte-là.

«La miséricorde est l’être même de Dieu»

Frères et soeurs, vous l’aurez compris, cette porte étroite qu’il faut trouver à tout prix, qu’il faut franchir, ce n’est pas celle d’une morale étroite qui déboucherait au terme sur le Royaume comme une récompense. Le christianisme n’est pas un perfectionnisme. Ce n’est pas non plus celle de l’épreuve qui ouvrirait à quelques champions la porte de la consécration suprême. Le christianisme ce n’est pas de l’héroïsme ! Les Jeux Olympiques c’est très bien, mais c’est autre chose !

Dieu nous prend dans sa miséricorde

La porte étroite est nécessairement quelqu’un ; c’est Jésus. Donc, « Si la miséricorde est l’être même de Dieu, son expérience intime, on comprend alors que Dieu ne peut faire autre chose et autrement que de nous aimer et de nous prendre dans sa miséricorde. C’est sa seule richesse, c’est son tout. Rien d’autre ne peut venir de lui vers nous que cela. C’est une nécessité absolue, mais absolument libre aussi. L’amour est ainsi et ne peut être autrement, sauf à se renier.

Et ce ne sont pas nos péchés qui diminueront sa miséricorde ou lui feront obstacle. Au contraire ! Ce sont eux qui en appellent le plus sûrement à la miséricorde divine. «Nos péchés sont le point d’impact en nous de l’amour divin.1 «

« Alors, Seigneur, nous te répétons la question : n’y aura-t-il que peu de gens à être sauvé ?
– Et toi, tu nous répètes ta réponse de toujours : « Je suis la Porte, qui entre par moi sera sauvé » A cause de la miséricorde du Père, les derniers auxquels vous pensez, seront les premiers.

AMEN


1 Michel Salamolard, La Miséricorde ou rien d’autre, p. 14.


21e DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE
Lectures bibliques :  Isaïe 66, 18-21; Psaume 116; Hébreux 12, 5-7.11-13;  Luc 13, 22-30


 

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21 août 2016 | 21:02
Temps de lecture: env. 4 min.
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