Paris: premier festival bouddhique les 25 et 26 juin (230694)
apic/bouddhisme
Entre 8 et 10’000 personnes attendues pour une première
Pourquoi je me suis converti?: le témoignage d’un Français
Paris, 23juin(APIC) Premier en son genre, le festival bouddhique de Paris
devrait réunir entre 8 et 10’000 personnes les 25 et 26 juin. Un temps fort
de réjouissances et d’information plus qu’une fête religieuse à proprement
parler, qui témoigne de la vitalité du bouddhisme français. Une vitalité
expliquée par Christian D. qui raconte pour l’APIC sa conversion au
bouddhisme.
Pour Jean-Claude Chiroutte, l’un des organisateurs, l’événement est de
grande ampleur: ni plus ni moins que le premier à rassembler toutes les
communautés bouddhiques, représentatives de toutes les sensibilités. Et de
surcroit en France. Entre 8 et 10’000 personnes sont attendues sur les
lieux de la grande Pagode, au Bois de Vincennes, pour ces deux journées,
d’abord conçues comme un temps d’imformation. «De plus en plus de sectes
douteuses se réclamant abusivement du bouddhisme, essaiment. Nous voulons
montrer, expliquer au grand public ce que celui-ci est véritablement dans
tous les courants ’autorisés’, afin que les gens ne se laissent plus tromper».
Au programme, rien n’a été négligé pour satisfaire à la fois le public
amoureux ou curieux de l’Orient, et ceux qui suivent déjà un enseignement
bouddhique, sans oublier les intellectuels attirés par la possibilité d’une
ouverture philosophique. Objets rituels asiatiques, visite sur le même lieu
d’un temple zen et d’un temple tibétain, représentations de danses sacrées,
audition d’un chanteur d’opéra tibétain, procession de chars dans les rues
de Paris figurent au menu de ces journées. Sans parler des cérémonies qui
s’y dérouleront, telle celle de l’offrande aux moines de toutes les traditions. Des librairies spécialisées, des rencontres-débats avec des écrivains de sensibilité chrétienne – France Quéré (théologienne protestante),
Olivier-Germain Thomas (auteur de «Bouddha, terre ouverte», prix national
des écrivains catholiques) accompagnés de dignitaires et maîtres des diverses écoles du bouddhisme complètent le programme.
Le bouddhisme en France
Longtemps très marginale, la présence bouddhique en France s’est considérablement développée depuis la fin des années 60. A l’influence des maîtres spirituels authentiques rencontrés en Asie par de nombreux Français,
il faut ajouter celle des moines tibétains et des asiatiques réfugiés en
France. Selon l’Union bouddhiste de France, il y aurait près de 600’000
bouddhistes dans l’hexagone, dont 150’000 Français. Cette Union a été créée
en 1986, elle regroupe aujourd’hui 80% des associations bouddhiques.
ENCADRE
Portrait de Christian D, un adepte du bouddhisme tibétain
C’est un citoyen ordinaire. Enfin presque. Ni son sourire malicieux et
vif, ni ses 47 ans juvéniles, ni même un discret médaillon à l’effigie du
grand lama Kalou Rinpoché ne sauraient le distinguer. Christian D. a pourtant vécu quelque chose de peu banal: quarante mois de retraite dans un
centre tibétain, dans un espace clos, à pratiquer intérieurement le «Dharma» (l’enseignement de bouddha, la voie).
Diplôme en poche, ce fils de mai 68 a très tôt renoncé à une carrière
d’ingénieur en travaux publics. Au lieu de quoi il vivra un temps en communauté rurale dans le sud de la France, avant de s’installer en Bourgogne
et de jouer comme bassiste dans un groupe rock. Puis de s’engager dans le
bouddhisme. Pourquoi s’être converti, alors qu’il a reçu une éducation
chrétienne? «Le problème pour moi était de ne pas avoir, de ne pas réussir
à avoir la foi. Or dans le christianisme, c’est essentiel: il faut poser
d’abord un acte de foi. Les preuves intellectuelles qui l’étayent ne me paraissaient pas convaincantes. On nous disait ’prier et ça s’arrangera’. Cela ne me suffisait pas. J’ai cherché à droite à gauche, puis j’ai rencontré
le bouddhisme, explique-t-il.
«Le christianisme, dit-il, ne m’offrait pas de méthodes de ’travail’, si
j’ose dire. Tout un éventail de pratiques en direct sur ma situation quotidienne m’aidant à régler les conflits, à travailler sur mes problèmes personnels, me proposant une éthique enrichissante et surtout une règle de vie
que j’ai trouvé dans le bouddhisme. Bref, depuis longtemps, je cherchais
quelque chose qui me convienne sur le plan intellectuel et de la pratique
spirituelle. Je l’ai trouvé là».
Pourquoi la branche tibétaine du bouddhisme? «C’est une question d’opportunité. J’habitais à 30 km de ce centre tibétain. J’y suis allé par curiosité et voilà. Les cycles d’enseignement étaient ouverts à tous. J’ai
été sensibilisé à la doctrine. L’autre raison, c’est le contact, très bon,
avec mon ’instructeur’, un moine tibétain. Cette notion est très importante, car la pratique des enseignements se fait au contact d’un maître expérimenté. Dans le christianisme, il n’y a pas d’équivalent… C’est le seul
à seul avec le Christ qui, pour moi, n’a rien signifié, ne m’a pas parlé».
«Je ne suis pas dans ma culture d’origine»
A la suite de séjours fréquents, dès 1976, dans le monastère tibétain
Kagyu-Ling, à Plaige, près de Toulon-sur-Arnoux (Saône-et-Loire), Christian
D. y devient résident permanent en 1980. Le 3 septembre 1984, un moment
qu’il attendait depuis longtemps, il entre en retraite avec 14 condisciples. La première année de retraite est précisément celle des pratiques dites de purification, nombreuses et variées, telles les prosternations, qui
visent à développer l’humilité. La seconde année est, elle, dédiée à la récitation vocale ou mentale de mantras, pratiques répétitives faites le plus
souvent en position assise, mais avec un «mala» (chapelet). «Autant l’entrée en retraite avait été difficile, autant j’ai eu du mal à en sortir car
je m’y sentais bien», convient-il non sans regret.
C’est que depuis le 3 décembre 1987, jour où il a «renoué» avec le monde, lentement mais sûrement le quotidien, pour lui aussi, a repris ses exigences, avec son lot de soucis. Christian s’est depuis réinstallé à Paris,
avec la compagne rencontrée en donnant des cours de tibétain. Il est aujourd’hui demandeur d’emploi. La pratique du bouddhisme, assure-t-il, l’aide à surmonter ce moment difficile.
Au fond, grâce à cette pratique, à ces trois années de retraites en particulier, qu’a-t-il acquis? «On perd beaucoup d’illusions mais c’est une
expérience qui donne un sens à la vie. Au fond, je n’ai rien acquis de définitif, si ce n’est une tolérance bien plus grande. L’enseignement essentiel du Mahayana, c’est cela: développer une attitude bienveillante à
l’égard des autres. J’ai aussi le sentiment d’avoir expérimenté une pratique sprirituelle qui me convient, et que je dois poursuivre le plus régulièrement possible, mais en ne la séparant pas du quotidien». Le seul problème, pour lui, est que comme bouddhiste français, il n’est pas dans sa
culture d’origine. «J’ai donc quelques difficultés à m’insérer dans une
communauté religieuse essentiellement asiatique. Par rapport à cela, j’ai
parfois le regret de ne pas avoir trouvé dans le christianisme ce que je
cherchais». (apic/jcn/pr)