Fridolin Zahradnik, évêque tchèque marié, de passage en Belgique (180693)

«On ne va pas me pousser à quitter ma femme et mes enfants!»

Bruxelles, 17juin(APIC) 17juin(APIC) «Rome était parfaitement au courant des ordinations clandestines en Tchécoslovaquie, y compris d’hommes

mariés, en raison de la situation dans laquelle était alors plongée l’Eglise» sous le régime communiste, a affirmé à Bruxelles l’évêque tchèque Fridolin Zahradnik, lors de son récent passage en Belgique.

Durant la période communiste évêque clandestin à Rychnov nad Kneznou,

dans le diocèse bohémien de Hradec Kralové, marié et père de trois enfants,

son ordination n’est pas reconnue par les autorités ecclésiastiques. Quelques jours avant son arrivée dans le pays, les évêques de Belgique avaient

mis en garde le public, affirmant que Fridolin Zahradnik «n’est pas en

communion avec l’Eglise catholique, ni avec les évêques de Tchéquie, ni

avec le Vatican».

Le Secrétariat de la Conférence épiscopale de Belgique avait fait savoir

que «des doutes sérieux existent concernant la validité de l’ordination de

Fridolin Zahradnik. Dans ces circonstances, les évêques de Belgique ne peuvent l’autoriser à célébrer l’eucharistie, ni conférer un sacrement». Aucun

évêque de Belgique n’a voulu recevoir l’évêque tchèque invité en Flandre

par le groupe de «Prêtres et Religieux pour la Justice et la Paix».

Les «facultés mexicaines»

Rappelant les raisons des ordinations clandestines en Tchécoslovaquie,

Fridolin Zahradnik souligne que durant la période communiste, «en vertu des

mêmes facilités que celles qui furent accordées à l’Eglise du Mexique sous

la persécution, l’Eglise locale fut autorisée à pourvoir elle-même à son

organisation». L’évêque non reconnu se dit scandalisé «que l’Eglise officielle ait utilisé des prêtres et des évêques ordonnés clandestinement,

surtout ceux qui étaient mariés, pour ensuite les rayer de la liste s’ils

n’acceptaient pas d’être dégradés au rang de diacres, de passer dans les

rangs de l’Eglise catholique de rite byzantin ou de consentir à une séparation de fait et de promettre de ne plus vivre maritalement».

Fridolin Zahradnik se montre excédé par le fait qu’on lui réclame continuellement des preuves de la validité de son ordination et de celles qu’il

a pratiquées. Dans l’ex-Tchécoslovaquie, dit-il, «c’était un procédé typique de la police secrète».

Je demande le respect

«Ce que j’ai à dire à Rome, je l’ai couché par écrit, explique Fridolin

Zahradnik. Tout se trouve sur le bureau du cardinal Ratzinger, le préfet de

la Congrégation pour la Doctrine de la Foi. Dans ces papiers, j’écris aussi

que je ne prétends plus à une charge épiscopale. Je ne demande ni diocèse

ni cathédrale. Comme mes collègues de l’Eglise des catacombes, j’attends

qu’on respecte notre engagement pour la survie de l’Eglise sous le régime

communiste. J’espère pouvoir continuer comme prêtre marié mon travail parmi

les sans abri en Tchéquie sans devoir abandonner ma femme et mes enfants».

A plusieurs reprises durant la période communiste, s’étonne l’évêque en

visite, la hiérarchie catholique a rappelé à l’ordre les prêtres tchèques

et slovaques affiliés à l’association «Pacem in Terris», liée au régime.

Aujourd’hui, d’après Mgr Zahradnik, «ces prêtres ont été pratiquement réintégrés dans l’Eglise sans difficulté. Mais nous, on nous suspecte, on nous

calomnie. Ma femme est bien placée pour en parler. Décidément, nous ne convenons plus à l’époque postcommuniste. Et le motif principal tourne finalement autour du célibat. Est-ce suffisant pour nous rejeter comme prêtres ou

évêques, après tout ce que nous avons fait pour l’Eglise?»

Fridolin Zahradnik précise qu’il a été ordonné prêtre en 1969 puis évêque en 1970 dans l’Eglise catholique de rite oriental. Ces ordinations

clandestines avaient-elles pour but de mettre des prêtres à disposition de

l’Eglise latine? L’évêque tchèque ne partage pas «cette distinction qui

n’en est pas une», car, dit-il, à l’inverse de la Slovaquie, il n’y a pour

ainsi dire pas de catholiques de rite byzantin en Tchéquie. D’ailleurs,

ajoute-t-il, il s’agit de deux rites au sein de la même Eglise catholique

romaine. Aussi Fridolin Zahradnik refuse-il «la solution vaticane»: se rattacher comme prêtre marié à l’Eglise catholique de rite byzantin.

Avec les sans abri

Mgr Zahradnik ne souhaite pas révéler le nom de celui qui l’a ordonné

prêtre et évêque. Mais il confirme une opinion relayée entre autres par

l’actuel archevêque de Prague: «l’Eglise des catacombes en Tchécoslovaquie

a été principalement l’oeuvre d’un évêque ordonné validement, le jésuite

Peter Dubovsky». Ce dernier, âgé aujourd’hui de 72 ans, est actuellement

évêque auxiliaire du diocèse de Banska Bystrica, en Slovaquie.

Dans un communiqué publié à l’occasion de la visite de Fridolin Zahradnik, «les Prêtres et Religieux pour la Justice et la Paix déplorent que la

conférence épiscopale belge ait pris publiquement ses distances à l’égard

de l’évêque Zahradnik, et cela sans l’avoir auparavant rencontré et entendu». L’association juge que l’évêque tchèque «n’a pas été ménagé par

l’Eglise». Elle demande que «sacerdoce et célibat soient dissociés, afin

que des hommes mariés puissent être ordonnés prêtres». (apic/cip/cb)

18 juin 1993 | 00:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 3  min.
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