Cocaine: le Pérou aux avants postes (300887)

Lima, 30aout(APIC) Avec la Colombie, le Pérou, le Brésil, l’Equateur, la

Bolivie et le Vénézuela, l’Amérique latine est pour les trafiquants de drogue la plus grande fourvoyeuse de feuilles de coca. C’est-à-dire de la

plante qui sert à «fabriquer» la cocaine. Les bénéfices de ce marché l’attestent: 150 mille millions de dollars sont ainsi annuellement empochés.

soit l’équivalent du tiers de l’ensemble de la dette extérieure des pays

d’Amérique latine.

Malgré la guerre aujourd’hui déclarée partout dans les principaux pays

producteurs des feuilles de coca contre les trafiquants, les «cocadollars»

enrichissent de plus en plus la mafia de la drogue pour laquelle ce poison

demeure le marché le plus lucratif de la terre. Placé dans le triangle d’or

de la cocaine avec la Colombie et le Brésil, le Pérou, avec Bogota, en Colombie, est devenu une véritable plaque tournante de ce marché. Avec la pate de base de cocaine, fruit de la récolte des feuilles de coca, il approvisionne les laboratoires clandestins situés en Amazonie. Laboratoires qui

se chargent ensuite de transformer cette pate en une cocaine plus ou moins

pure avant de l’acheminer vers les Etats-Unis, l’Europe ou partout ailleurs.

Un négoce qui corrompd la société dans son entier

Pour le Péro u, l’énormité des statistiques et des chiffres laissent

songeur. Ils soulignent le type d’enjeu et le combat que se livre les autorités et les trafiquants. Il faut savoir en effet, que si le Pérou, à l’instar de la Bolivie par exemple, décidait demain de natiuonaliser la production nationale de la cocaine, en peu de temps il serait en mesure de

combler sa dette extérieure estimée à près de 14.000 millions de dollars.

cette constation situe clairement l’ampleur de la question. non seulement

en ce qui concerne la production et tout ce qui gravite autour, mais plus

fondamentalement encore la consommation de drogue. Cela sans parler des effets dus à cette montagne d’argent, produit d’un négoce quiasservit les

pouvoirs, corrompd des hommes et des institutions, élimine des milliers de

vies humaines et crée un puissant «narco-pouvoir» que très peu osent ou

veulent défier.

Selon des estimations fournies par le ministère de l’intérieur péruvien,

le kilo de cocaine se vend à lima à 15.000 dollars, à Miami à 35.000 et en

Europe à 70.000 dollars. Or, on évalue actuellement au Pérou entre 180.000

et 20.000 les hectares de cultures illicites consacrés à la coca. En

d’autres termes, si l’on excepte la production admise et «controlée destinée aux besoins locaux – industrie et consommation brute de la feuille de

coca, ancestrale coutume encore largement répandue et entretenue parmi les

populations indigènes -, la production potentielle du pays, toujours selon

les memes sources, s’éleverait à un million de kilos par an.

L’économie du pays serait soutenue par le marché de la cocaine

Interrogé à Lima, le général Juan Zarate Gambini, principal responsable

pour le Pérou de la lutte antidrogue confirme ces chiffres. Meme vendu à

l’état de pate de base, le marché péruvien de la drogue est juteux. Et son

impact au niveau de l’économie nationale n’est pas une mince affaire puisque le seul produit de sa vente, évalué à quelque 6.160 millions de $,

représente l’équivalent du 30 % du produit national brut. D’un autre coté,

certains analystes économiques soutiennent que l’actuel niveau de réserves

de devises que possède le Pérou se maintient grace à l’entrée des «Cocadollars» en particulier, qui se réalise dans un marché informel de la rue Ocona, à Lima. Un marché aujourd’hui fermé après les récentes mesures financières prises par le Président Garcia. Mesures qui inclues l’étatisation

des banques et des principales sociétés financières ainsi que des assurances péruviennes.

Pour le responsable de la lutte antidrogue, le Pérou offre une place

privilégiée au trafic de la feuille de coca. la majorité des plantations

sont concentrées dans des zones difficiles d’accès en Amazonie, dans les

régions de Juanjui, Togache, Uchiza et Ucayali, mais principalement dans la

région de tingo Maria, située au Nord Est de LIma, derrière la Cordillière

des Andes, à quelque 700 kilomètres à vol d’oiseau de la capitale.

La guerre ouvertement déclarée contre les trafiquants ne se limite pas

seulement à des raids aériens et terrestres contre les installations et les

hommes au service de ce dangereux trafic. Des tentatives et de grands efforts financiers sont ainsi consentis pour tenter de trouver et de donner

aux cultivateurs la possibilité d’une culture de substitution à celle de la

coca. Pas simple. Les effets de la plante de coca affectent gravement la

terre et quatre ans d’efforts sont nécessaires avant d’y voir planter autre

chose. En outre, il est absolument nécessaire d’arracher la plante, et non

seulement de la bruler; l’extraction de la plante est onéreuse et pas

forcément efficace. Chaque année, pour 2 à 3.000 hectares de plantes de coca détruits, 12.000 autres apparaissent, prets au bout de quelques mois

seulement à servir les intérets des peu scrupuleux trafiquants.

Quant aux cultivateurs de la feuille de coca, interrogés, ils admettent

percevoir annuellement près de 5.000 $ pour chaque hectare de terre cultivée. Cependant que leru salaire annuel pour des récoltes trationnelles et

légales et vitales pour le pays, telles que le mais, le riz, le cacoa ou le

café, ne dépasse guère 685 $ par hectare. C’est à dire 8,3 fois plus que

celui reçu pour semer, cultiver et récolter la dangereuse feuille de coca.

Pour ces derniers, le choix est vite fair. Quant aux conséquences….

(apic/pr/cr)

30 août 1987 | 00:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 4  min.
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