"La résurrection de Lazare", tempera et or sur panneau, détail.  	
Duccio di Buoninsegna, vers 1310-11 | Domaine public
Homélie

Homélie du 26 mars 2023 (Jn 11, 1-45)

Eric Monneron, diacre – Eglise Saint-Jean-Baptiste, Gland

Il y a quinze jours, vous vous en souvenez, nous étions invités à contempler le dialogue de Jésus avec la femme de Samarie dans lequel Jésus se révélait comme la source d’eau vive. La semaine dernière, nous entendions le dialogue de Jésus et de l’aveugle-né. Jésus se manifestait alors comme la lumière du monde, comme la lumière véritable. Aujourd’hui, dans ce dialogue avec Marthe et Marie, la révélation culmine à son sommet. Jésus se révèle comme « la Résurrection et la Vie ». Et cette Bonne Nouvelle, il nous faut l’accueillir.

Quand Jésus se présente comme « la Résurrection et la Vie », nous sommes tournés vers sa divinité ; mais ce qui est frappant dans ce passage de l’évangile selon saint Jean, c’est la manière dont sont étroitement mêlées la divinité de Jésus et son humanité.

Dans ce passage, saint Jean nous montre vraiment que Jésus est pleinement homme et pleinement Dieu. Qu’il est vrai homme et vrai Dieu. Son humanité transparaît à travers l’amitié qu’il noue avec Marthe, Marie et Lazare.

D’ailleurs, à plusieurs reprises, l’évangéliste précise que Jésus les aimait…

Toute l’humanité de Jésus nous est présentée

Les deux sœurs font dire à Jésus : « Celui que tu aimes est malade. » Il sera profondément ému de la peine des deux sœurs. Il sera bouleversé en approchant de la tombe de son ami Lazare et il pleurera. Toute l’humanité du Christ Jésus nous est présentée ici et c’est dans la plénitude de cette humanité, rejoignant notre propre humanité, qu’il va pouvoir se révéler comme « Résurrection et Vie ».

Mais avant d’aller plus loin dans cet évangile, arrêtons-nous quelques instants sur cette phrase : « Seigneur, celui que tu aimes est malade. »

Cette prière que Marthe et Marie font à Jésus peut nous mettre chacun et chacune sur un chemin de conversion par rapport à nos prières d’intercession et à nos demandes.

Bien souvent, quand nous faisons des prières d’intercession, sans nous en rendre compte, nous donnons des ordres à Dieu : « Fais ceci ; fais cela ; donne la guérison à telle personne ; fais que telle personne ait du travail ; fais que mon petit-fils ait son diplôme ; etc. » Finalement nous donnons des ordres à Dieu pour qu’il soit à notre service.

Evangéliser nos prières d’intercession

Saint Jean de la Croix, dans son Cantique Spirituel, nous indique de quelle manière intercéder. Il nous donne d’abord l’exemple de la Vierge Marie à Cana qui se contente de présenter la situation : « Ils n’ont plus de vin. » ; puis il évoque notre passage : « Les sœurs de Lazare, au lieu d’envoyer demander au Sauveur la guérison de leur frère, se bornèrent à lui représenter que celui qu’il aimait était malade. ».

Il s’agit donc de présenter simplement la situation pour que Dieu puisse agir selon les desseins de son amour ; que son Règne puisse advenir dans cette situation ; pour que son Nom soit sanctifié dans cette situation… Il y a là un chemin de conversion de nos mentalités et de nos manières de faire pour évangéliser nos prières d’intercession.

Jésus accueille la demande, mais malgré les sentiments d’affection qu’il nourrit à l’égard de Lazare, il va attendre deux jours avant de se mettre en route.

Deux jours pour permettre à l’œuvre de Dieu de se manifester…

Jésus donne à ses disciples un premier enseignement en leur parlant de la mort comme d’un sommeil, comme d’un temps de passage entre cette vie et la vraie Vie.

Sur les pierres tombales de nos cimetières, nous pouvons lire : « Ici repose… », laissant bien entendre que, pour nous chrétiens, la mort n’est qu’un temps de sommeil dans l’espérance d’un éveil.

Cet enseignement de Jésus est très important. L’épître aux Hébreux affirme que Jésus est venu « affranchir tous ceux qui, leur vie entière, étaient tenus en esclavage par crainte de la mort ».

Consentir à notre être mortel

Avouons, frères et sœurs, que parfois nous sommes bien souvent tenus en esclavage par crainte de la mort. Nous n’envisageons pas spontanément notre mort comme un sommeil, comme un passage vers le Père. Nous avons sur ce point à vivre une profonde conversion au plus intime de notre être, pour consentir à notre être mortel, à l’être mortel de nos proches, mais avec cette certitude de foi que la mort n’est qu’un sommeil qui débouche sur la plénitude de la vie.

Jésus revient à Béthanie avec ses disciples et rencontre d’abord Marthe qui affirme sa foi en la Résurrection aux derniers jours. Mais Jésus lui affirme : « Moi, je suis la Résurrection et la Vie, tout homme qui vit et qui croit en moi ne mourra jamais. »

Cette parole est très importante car Jésus nous indique que, si nous avons foi en lui, nous ne ressusciterons pas simplement aux derniers jours mais que nous sommes déjà ressuscités.

Oui, Dieu ose dire qu’il ouvrira nos tombeaux et nous en fera remonter.

Frères et sœurs, est-ce que vous vous sentez être des ressuscités ? Est-ce que déjà cette Vie nouvelle est à l’œuvre en vous ? à l’œuvre en nous ? Est-ce que nous avons pleinement conscience que la grâce du baptême nous a fait mourir au péché pour renaître en Christ ? Est-ce que nous cherchons à faire en sorte que ce germe de vie divine, de vie ressuscitée, puisse s’épanouir dans toutes les fibres de notre être.

Nous sommes déjà des Ressuscités ! Nous le deviendrons pleinement quand nous serons passés par la mort ; mais nous sommes déjà ressuscités avec le Christ puisque nous croyons en lui et que nous vivons de lui, nous nourrissant de son Corps et de son Sang dans cette Eucharistie qui est le mémorial de son Mystère Pascal. Répondrons-nous comme Marthe : « Oui, Seigneur, je crois. » ?

Puis le texte évoque Jésus pleurant silencieusement, une attitude magnifiquement humaine… Et après s’être tourné vers son Père dans l’action de Grâce, il « éveille » son ami Lazare.

La description qui est faite de la « résurrection » de Lazare nous renvoie à la Résurrection du Christ Jésus mais avec de notables différences.

La grotte dans laquelle gît Lazare est fermée par une pierre, alors qu’au matin de Pâques, la pierre du tombeau de Jésus a été roulée. Le corps de Lazare sent déjà, alors qu’au matin de Pâques pas d’odeur, car le tombeau sera vide. Les bandelettes enserrent encore les membres de Lazare et le suaire couvre son visage lorsqu’il sort de son tombeau. Au matin de Pâques, Pierre et Jean, entrant dans le tombeau vide, découvriront les bandelettes rangées et le suaire posé à part.

Cela nous rappelle qu’il n’y a qu’une Résurrection véritable, celle du Christ Jésus au matin de Pâques ; et c’est en lui, et en lui seul, que nous ressusciterons pleinement et véritablement.

Alors, oui, frères et sœurs, dans cette perspective, il faut vivre en enfants de lumière ! Dans ce contexte de Résurrection, le Christ Jésus nous appelle à demeurer inébranlables dans la foi ! Alors, il faut également continuer à être les témoins quotidiens de son amour inlassable pour l’humanité entière ! Travaillons sans relâche « pour la gloire de Dieu et le salut du monde ! ». Ainsi, nous pourrons redire avec confiance les paroles du psalmiste :

« J’espère le Seigneur de toute mon âme ;
Je l’espère, et j’attends sa parole.
Mon âme attend le Seigneur
Plus qu’un veilleur ne guette l’aurore. » (Ps.129)

Amen.

5e Dimanche de Carême
Lectures bibliques : Ezékiel 37, 12-14 ; Psaume 129 ; Romains 8, 8-11 ;  Jean 11, 1-45

«La résurrection de Lazare», tempera et or sur panneau, détail. Duccio di Buoninsegna, vers 1310-11 | Domaine public
26 mars 2023 | 09:35
Temps de lecture : env. 5  min.
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