Un rapport chiffres à 250’000 les femmes stérilisées en 3 ans

Pérou: Les stérilisations forcées continuent

Lima, 21 décembre 1998 (APIC) Quelque 250’000 femmes péruviennes, pauvres parmi les pauvres, ont été stérilisées de force ou à leur insu depuis 1996, indique un rapport officiel du Comité pour la défense des droits des femmes en Amérique latine et dans les Caraïbes, en partie repris par le quotidien madrilène «El Pais».

La campagne de stérilisations forcées, décrétée au Pérou par le président Alberto Fujimori dans le cadre d’un programme de planification familial, n’est de loin pas terminée, comme le laissait pourtant entendre le pouvoir péruvien dans le courant de cet été, après le tollé provoqué par ce scandale. Selon le rapport, des menace de mort auraient même dernièrement été lancées pour contraindre de nombreuses femmes à se faire stériliser.

Quant à l’Eglise catholique, qui ne cesse de dénoncer ces pratiques depuis des mois, elle qualifie de «criminelle» les conditions sanitaires dans lesquelles se déroule cette campagne», qui a fait plus de 1’000 morts l’an dernier, en raison du manque d’assistance post-opératoire.

Victimes «privilégiées» de la campagne du président Fujimori: les femmes des Andes et de la Sierra. Elles ont en commun d’être pauvres, souvent analphabètes et d’ethnie quechua. Aujourd’hui encore, malgré les promesses des autorités de Lima, les méthodes restent les mêmes: des employés du ministère de la santé, médecins et infirmières, débarquent dans l’un ou l’autre poste sanitaires de village.

A coup de promesses d’aliments, de mensonges et de chantage – suppression de l’aide au verre de lait, par exemple -, on propose à des femmes, visiblement dépassées par un jargon médico-technique, de leur venir en aide. En les assurant que seul la ligature des trompes peut mettre un terme à leur problème. Pire: de nombreuses femmes, entrées dans un poste sanitaire ou un hôpital de fortune pour une simple intervention, en sont ressorties avec les une ligature des trompes, pratiquées à leur insu.

Nettoyage ethnique

Derrière le programme de planification familiale revu et corrigé en 1996 par Fujimori se cachait en réalité une vaste campagne de stérilisation forcée qui visait en particulier les populations andines. Rien à voir avec la campagne de planification initiée en novembre 1990, qui consistait, aux dires du ministre d’alors, à informer et à distribuer gratuitement «du matériel contraceptif». Le président péruvien avait fait du contrôle de la natalité dans son pays une de ses priorités. But avoué: aller au-devant de 45% des femmes en âge de procréer, soit entre 5,5 et 6 millions de péruviennes.

Les dénonciations successives de ces drames, les rapports et les visites à Lima d’organisations internationales, avaient eu pour effet d’obliger momentanément le gouvernement à revoir ses pratiques. Momentanément, seulement. «Le président Fujimori n’est pas homme à faire marche arrière», confiait à l’APIC Juan Valverde, alors responsable de «Terre des hommes» au Pérou. (apic/misna/pr)

21 décembre 1998 | 00:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 2  min.
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