Allemagne-Autriche: L’Eglise catholique se souvient de la «Nuit de cristal» il y a 60 ans

Novembre 38: pogroms antijuifs annonciateurs de la solution finale

Vienne/Bonn, 8 novembre 1998 (APIC) Il y a tout juste 60 ans, dans la nuit du 9 au 10 novembre 1938, des pogroms antijuifs planifiés sur tout le territoire du Reich – l’Autriche avait été annexée par les nazis lors de l’»Anschluss» huit mois plus tôt – annonçaient explicitement la «solution finale». En une nuit, des milliers de juifs furent battus, tués ou blessés, déportés… Plus d’un millier de synagogues furent la proie des flammes et de la furie destructrice. On appela cette nuit la «Nuit de cristal», à cause du bruit des vitres brisées des synagogues et des vitrines des commerces juifs.

Des foules déchaînées, chauffées à blanc par la propagande nazie à la suite de l’assassinat à Paris du diplomate Ernst von Rath par le jeune Herschel Grynszpan, armées de haches et de gourdins, semèrent la mort et la désolation. Il ne s’agissait pas d’une «colère populaire spontanée», mais bien d’un plan déjà prêt et dont la mise en œuvre fut orchestrée sur tout le territoire contrôlé par les nazis.

A l’occasion du 60e anniversaire de la «Nuit de cristal», dont les cicatrices ne sont pas refermées, des responsables politiques et religieux en Allemagne et en Autriche lancent un avertissement: il faut se souvenir de ces événements douloureux et en tirer les leçons pour le temps présent. Le souvenir ne cherche pas seulement les fautes de ceux qui nous ont précédés, mais incite les hommes d’aujourd’hui à combattre avec vigilance la haine dès ses premières manifestations, rappelle la Conférence des évêques d’Allemagne dans une déclaration publiée à Bonn à l’occasion des pogroms du 9 novembre.

Ne pas oublier, reconnaître la responsabilité des chrétiens et des Eglises

Président du Conseil central des juifs en Allemagne, Ignatz Bubis a mis en garde à Mayence contre la culture du «regarder ailleurs» et la volonté d’oublier. Il se passe la même chose aujourd’hui en cas d’actes xénophobes: la grande partie des gens regarde ailleurs. Ignatz Bubis a déploré également que beaucoup de jeunes se laissent tenter par les slogans de l’extrême-droite. L’Action catholique d’Autriche estime pour sa part que la reconnaissance de la faute des chrétiens et des Eglises est la condition pour la «réconciliation dans la rencontre».

«La violence se fraie déjà son chemin là où nous montrons de l’hostilité à l’égard des étrangers, quand nous refusons ceux qui pensent différemment, quand nous suscitons des peurs existentielles et quand nous ne sommes pas prêts à recevoir chez nous des gens d’autres pays qui sont vraiment menacés dans leur vie», soulignent les évêques allemands.

Malgré la discrimination de la population juive à l’époque, des manifestations de protestation, il n’y en eut quasiment nulle part, peut-on lire dans la déclaration de Mgr Karl Lehmann, président de la Conférence des évêques allemands. Les évêques n’ont certes pas utilisé la chaire pour protester, mais ils ont quand même secoué les fondements idéologiques de l’Etat nazi par leur refus décidé de son idéologie raciale, a-t-il affirmé.

Lors de la clôture de leur assemblée plénière d’automne, vendredi, les évêques autrichiens avaient déjà souligné la nécessité de reconnaître les fautes passées à l’occasion du 60e anniversaire des pogroms de novembre. Ils ont relevé que s’il fallait distinguer l’antijudaïsme chrétien de l’antisémitisme biologico-racial des 19e et 20e siècle, l’antijudaïsme «chrétien» représente l’une des causes essentielles de la propagation de l’antisémitisme. «En tant que chrétiens, nous le reconnaissons et nous aimerions par là renforcer une nouvelle vie ensemble entre juifs et chrétiens», déclarent les évêques autrichiens. (apic/kap/kna/be)

8 novembre 1998 | 00:00
par webmaster@kath.ch
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