Propos du pape sur la RSI: l’Ukraine proteste
En parlant de «drapeau blanc» dans un extrait d’entretien avec la télévision suisse italienne (RSI), diffusé le 9 mars 2024, le pape François a suscité de vives réactions de la part de l’Ukraine et de ses alliés. Sur Vatican News, le directeur du Bureau de presse du Saint-Siège Matteo Bruni assure que le pape ne demandait pas à l’Ukraine de capituler, mais seulement de négocier pour trouver une issue à la guerre.
Interrogé par des journalistes, Matteo Bruni explique que dans l’entretien, le pontife argentin «reprend l’image du drapeau blanc proposée par l’intervieweur, pour indiquer la cessation des hostilités, la trêve obtenue avec le courage de la négociation». Le pontife a souhaité insister sur «l’importance du dialogue contre la ‘folie’ de la guerre et la préoccupation prioritaire pour le sort des populations civiles», affirme-t-il, assurant que le pape «souhaite une solution diplomatique pour une paix juste et durable».
Kiev n’a pas tardé à réagir aux propos du pape par le chef de sa diplomatie, Dmytro Kuleba, qui a déclaré sur X que le drapeau pour lequel les Ukrainiens mourraient était «jaune et bleu» et qu’ils ne hisseraient «jamais d’autres drapeaux». Il accuse le Vatican de suivre la même stratégie que celle poursuivie «dans la première moitié du XXe siècle» – une critique implicite de la position du Saint-Siège et du pape Pie XII pendant la Seconde Guerre mondiale.
Tout faire pour «tuer le dragon»
Le ministre des Affaires étrangères demande au pontife d’éviter de «répéter les erreurs du passé». Il l’a enjoint à «soutenir l’Ukraine et son peuple dans leur juste lutte pour la survie». Il l’encourage enfin à venir en Ukraine pour apporter son soutien à la population ukrainienne et plus particulièrement «aux plus de cinq millions de gréco-catholiques».
Sur le réseau social X, l’ambassadeur d’Ukraine près le Saint-Siège Andriy Yurash a lui aussi critiqué les propos du pape, lui demandant d’être «cohérent» et comparant la situation actuelle à celle de la Seconde Guerre mondiale. «Est-ce que quelqu’un a parlé sérieusement de paix à l’époque, en parlant avec Hitler et de drapeau blanc pour le satisfaire?», s’étonne-t-il. Le diplomate écarte toute alternative: «Si nous voulons mettre fin à la guerre, nous devons tout faire pour tue le dragon». Son message est accompagné de plusieurs photos, dont une montrant un jeune enfant ukrainien tenant une pancarte avec écrit en anglais: «Aidez-moi, arrêtez Poutine!».
Soutien de l’Allemagne, de la Pologne, de la Lettonie et de l’Union européenne
Andriy Yurash a reçu le soutien de l’ambassadeur d’Allemagne près le Saint-Siège Bernhard Kotsch. Sur X, ce dernier affirme que la Russie avait «enfreint le droit international» et que c’était donc à elle de mettre fin au conflit. «La Russie a déclenché une guerre illégale et injustifiée», abonde, sur le même réseau social, Alexandra Valkenburg, ambassadrice de l’Union européenne près le Saint-Siège. Elle déclare soutenir le plan de paix de l’Ukraine.
«Il ne faut pas capituler face au mal, il faut le combattre et le vaincre, afin que le mal hisse le drapeau blanc et capitule», exhorte sur X le président de la Lettonie Edgars Rinkēvičs. Toujours sur X, le ministre des Affaires étrangères de Pologne Radek Sikorski accuse pour sa part le pape de «chamberlainisme», une référence à la politique du Premier ministre anglais Neville Chamberlain visant à ne pas entrer en guerre avec l’Allemagne nazie, qui avait abouti à la signature des accords de Munich en 1938, mais sans empêcher la guerre pour autant. (cath.ch/imedia/cd/rz)