L’avis nuancé et peiné d’un de ses proches collaborateurs

Condamnation du Père de Mello par le Vatican

Madrid, 18 octobre 1998 (APIC) «On trouve des choses discutables chez Anthony de Mello, mais la notification de la Congrégation pour la Doctrine de la foi me peine, car il a aidé de nombreuses personnes à s’approcher de Dieu. Je ne connais personne qu’il ait éloigné de Dieu ou de l’Église «, a déclaré à Madrid le Père José Javier Aizpun, qui lui a succédé à la tête de l’Institut Sadhana, à Lonavia (Inde).

C’est dans une note publiée en août dernier que la Congrégation romaine a reproché au jésuite indien Anthony de Mello (1931-1987), auteur, entre autres, de «Sadhana, chemin de Dieu  » (publié en 45 langues !), «un éloignement progressif des contenus essentiels de la foi chrétienne». Quoique très influencés par le bouddhisme et le taoïsme, les premiers écrits du Père de Mello restaient «dans la ligne de la spiritualité chrétienne», observait le dicastère romain, reconnaissant que ses livres sont d’ailleurs dans l’ensemble «porteurs d’éléments valables de la sagesse orientale qui peuvent aider à la maîtrise de soi, à l’affranchissement de liens ou affects qui nous empêchent d’être libres et à faire face sereinement aux événements favorables ou contrariants de la vie». Selon Rome, il s’est progressivement écarté de l’essentiel de la foi catholique, allant jusqu’à substituer à la révélation en Jésus-Christ  » une perception de Dieu sans forme ni image, au point qu’on y parle de Dieu comme d’un simple vide».

Pour le Père Aizpun, qui a travaillé avec Anthony de Mello à partir de 1978, la notification ne donne pas au théologien «le bénéfice du doute», optant, parmi diverses interprétations possibles de ses écrits, pour «une qui est sévère», a-t-il déclaré lors d’une conférence donnée à Madrid. Quelques-unes des reproches qui lui sont adressés par la Congrégation dirigée par le cardinal Ratzinger lui paraissent cependant «objectives», et c’est pourquoi il se garde bien de recommander le Père de Mello comme unique source d’inspiration pour ceux qui s’intéressent à la vie spirituelle et à la méditation.

Pas un simple vide

Cela dit, le Père Aizpun proteste : il ne trouve pas dans les écrits du de Anthony de Mello un «simple vide», mais bien «un Dieu personnel». Le théologien indien confessait le Christ comme «son Seigneur» et non comme un prophète parmi d’autres. Et ce n’est pas parce qu’il adressait des critiques à l’Église, parfois justifiées, qu’il n’entrait pas dans son mystère profond, a-t-il déclaré.

Le Père Aizpun a insisté sur le fait que le théologien indien n’a pas écrit «selon une clé spécifiquement chrétienne», car le public qui fréquentait l’Institut Sadhana était très diversifié. Il a souligné aussi l’importance du contexte dans lequel il parlait et écrivait, celui du dialogue avec les religions non chrétiennes, «qui exige un langage non pas opposé à celui de l’Occident, mais certainement différent».«

De l’avis de Père Aizpun, si quelques-unes des intuitions du Père de Mello sont risquées, d’autres sont très profondes, qui peuvent être utiles au christianisme dans son effort d’inculturation. «Ce n’est pas bon d’avoir dans ces questions des opinions tranchées. La voie la plus indiquée est celle de la tolérance». (apic/cip/pr)

18 octobre 1998 | 00:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 2  min.
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