Un vieux leader palestinien modéré de confession orthodoxe
Palestine: Elias Freij, ancien maire de Bethléem, est décédé à l’âge de 79 ans
Bethléem, 30 mars 1998 (APIC) Elias Freij, maire de la ville palestinienne de Bethléem durant plus de deux décennies, est décédé dimanche à l’âge de 79 ans dans un hôpital d’Amman, capitale de la Jordanie. Vieux notable chrétien de confession grecque orthodoxe, il a conduit la destinée de la «ville de David» de 1972 jusqu’à sa démission, en mai 1997. Il abandonna en même temps son poste de ministre du tourisme de l’Autorité palestinienne qu’il détenait depuis 1994.
Le vieux leader palestinien modéré, qui aurait eu 80 ans en juin prochain, sera enterré ce mardi dans la ville dont il fut le premier citoyen, une ville chrétienne devenue entre-temps musulmane aux deux tiers. Indépendant sous l’occupation israélienne, il resta le seul maire en place non officiellement membre de l’OLP après la mise en place de l’Autorité palestinienne dans une partie des territoires occupés par Israël.
Partisan de la coexistence pacifique
Elias Freij s’était toujours déclaré partisan de la coexistence pacifique entre les diverses communautés religieuses – chrétienne, juive et musulmane – et de la reconnaissance mutuelle entre nations palestinienne et israélienne. Même si ses administrés ont terriblement souffert – et continuent de souffrir – de l’occupation israélienne, des mesures de punition collective, des représailles et confiscations de terres, de l’accaparement de l’eau, des empiétements et des exactions des colons israéliens. Aujourd’hui, l’économie de la ville (60% de chômeurs) est toujours sinistrée, car la liberté de mouvement des travailleurs palestiniens est toujours entravée et l’accès à Jérusalem, poumon économique, social, culturel et religieux de l’Autonomie palestinienne toujours fermé.
Il a conduit la ville dans les plus durs moments, surtout lorsqu’éclata en 1987 l’intifada, la révolte des pierres menée par de jeunes Palestiniens sans avenir, fatigués de deux décennies d’occupation et d’oppression. Sa modération lui valut plus d’une fois les menaces des plus extrémistes des militants palestiniens et sa maison fut même mitraillée.
Le vieux maire de Bethléem, contemplant les colonies de peuplement qui quadrillent la région, se demandait souvent pourquoi des colons juifs, qui venaient d’arriver des Etats-Unis, de France ou d’ailleurs, pouvaient s’installer sans remords «la Bible dans une main, le fusil dans l’autre» sur des terres appartenant aux Palestiniens. «Moi, par contre, je peux prouver, grâce aux registres de l’Eglise orthodoxe, que ma famille vit sur cette terre depuis des siècles», déclarait-il un jour à l’APIC. Il avait récemment encore mis en garde contre les développements dangereux créés par l’intransigeance du gouvernement de Benjamin Netanyahou. Atteint dans sa santé, Elias Freij avait remis son mandat il y a moins d’un an à son adjoint Hanna Nasser, âgé de 51 ans.
Elias Freij, maire de la ville qui a vu naître le Christ – il voyait la place de la crèche depuis ses bureaux -, avait su faire de Bethléem une cité reconnue au niveau international, qui ne comptait plus les jumelages et les partenariats: Cologne, Orvieto, Lisbonne, Burlington/Vermont, Glasgow, Chartres, Athènes, Cordoue, Cuzco… Le maire de Bethléem, ville qui prépare fiévreusement le Jubilé de l’an 2’000 – même si les moyens lui manquent – fut à plus d’une reprise l’hôte du pape Jean Paul II au Vatican. (apic/kna/be)