Vers la sortie? | CC BY 2.0
Suisse

Le suicide assisté ne sera pas mieux encadré en Suisse

Le Conseil des Etats a refusé le 11 septembre 2025 de réglementer davantage la pratique de l’assistance au suicide en Suisse. Il s’agissait notamment de fixer la procédure à respecter. Les sénateurs ont par contre accepté une proposition pour un meilleur suivi du nombre et des circonstances de ces décès.

La motion, émanant de la commission juridique du Conseil des Etats, demandait au  Conseil fédéral d’élaborer une réglementation-cadre en matière d’assistance au suicide. Cette réglementation devait déterminer les conditions devant être remplies pour qu’une personne souhaitant mourir puisse être aidée et accompagnée lors de son suicide. Il s’agissait également de définir la procédure à respecter pour établir sans équivoque le souhait de mourir de la personne concernée. Enfin un mécanisme de surveillance devait garantir le respect des obligations légales de diligence.

Une pratique libérale non réglementée

De fait, la Suisse dispose d’un modèle libéral en matière d’assistance au suicide. Seul L’article 115 du code pénal interdit l’assistance au suicide uniquement si celle-ci est fournie pour un mobile égoïste. Mais mis à part cet article, il n’existe aucune autre règle légale en la matière. Les directives de l’Académie suisse des sciences médicales (ASSM) n’ont pas pas de force juridique contraignante.

«Il ne s’agit pas de rendre plus difficile l’accès au suicide assisté ni de durcir les conditions en la matière, a expliqué Heidi Z’graggen (Le Centre/UR) au nom de la commission. Mais il convient de clarifier la situation juridique et de défendre les droits et les intérêts de toutes les parties concernées». Au final, elle n’a pas été entendue.

Une compétence cantonale

Le Conseil fédéral, suivi par la majorité des conseillers aux Etats, reconnaît que l’aide au suicide constitue un thème sensible sur les plans éthique et sociétal, qui doit être traité avec le soin nécessaire. Toutefois, il est d’avis que le cadre juridique actuel est suffisamment clair et qu’il n’est pas nécessaire de légiférer davantage.

Le Conseil fédéral a également renvoyé la balle aux cantons chargés de la surveillance des obligations professionnelles du personnel soignant en tenant compte des directives de l’ASSM. Il a rappelé que les personnes qui les enfreignent sont menacées de sanctions pouvant aller jusqu’à l’interdiction professionnelle définitive.  

Les cantons de Genève, de Vaud, de Neuchâtel et du Valais ont édicté des lois qui réglementent notamment l’accès au suicide assisté dans les institutions publiques. Ces actes régissent les conditions matérielles, les procédures et les obligations de diligence conformément aux directives de l’ASSM. Dans le canton de Zurich, les homes et les EMS publics mais pas, par exemple, les hôpitaux, les établissements psychiatriques ou les prisons, sont tenus de tolérer le suicide assisté. De nombreux autres cantons renoncent sciemment à établir leurs propres règles et s’appuient sur les dispositions générales.

Mieux connaître la réalité  

La deuxième motion acceptée par le Conseil des Etats demande d’instaurer un monitorage du suicide assisté en Suisse. La statistique devra recenser à la fois le nombre de suicides assistés et les circonstances de ces décès. Le Conseil national devra encore se prononcer sur ce texte.

La statistique demandée comprendra notamment l’âge, le sexe et le domicile (en Suisse ou à l’étranger) de la personne décédée. Il faudra également relever les données relatives à l’organisation qui a aidé la personne à mourir et aux circonstances précises du suicide assisté, par exemple les moyens utilisés et le lieu.

En Suisse, le nombre de suicides assistés est en augmentation depuis des années. De nombreuses personnes se déplacent depuis l’étranger pour faire appel à l’assistance au suicide dans notre pays. On note par ailleurs que les femmes ont nettement plus souvent recours à cette pratique que les hommes. Cette situation risque de déséquilibrer le modèle suisse, modéré. La Confédération a besoin d’une base de données fiable pour garantir que l’on puisse réagir à d’éventuelles évolutions problématiques en la matière, a soutenu la commission qui a obtenu gain de cause sur ce sujet. Le conseil fédéral a plaidé sur l’augmentation de la charge de travail de l’administration pour collecter ces données, mais il n’a pas été suivi. (cath.ch/com/mp)

Vers la sortie? | CC BY 2.0
12 septembre 2025 | 13:56
par Maurice Page
Temps de lecture : env. 3  min.
Partagez!