Première rencontre entre Léon XIV et Mahmoud Abbas
Le pape Léon XIV a reçu le 6 novembre 2025 le président de l’État de Palestine, Mahmoud Abbas. La difficile mise en application du plan de paix à Gaza a été au centre de cette première rencontre.
Le pape et le président palestinien s’étaient déjà entretenus au téléphone, mais il s’agissait du premier contact direct entre le nouveau pontife et le leader de 90 ans, qui avait rencontré le pape François à de nombreuses reprises.
«Durant cet entretien cordial l’urgence a été constatée de prêter secours à la population civile à Gaza et de mettre un terme au conflit, en poursuivant la perspective de la solution à deux États», précise le Saint-Siège dans un bref communiqué.
Cette audience se situait dans le cadre du 10e anniversaire de l’accord global entre le Saint-Siège et l’État de Palestine, signé le 26 juin 2015, avec le vif soutien du pape François qui espérait que cet accord garantissant le statut juridique des institutions chrétiennes situées sous la juridiction palestinienne puisse aussi servir de modèle dans le reste du monde arabe.
Hommage au pape François
Dès son arrivée à Rome, le 5 novembre dans la soirée, Mahmoud Abbas s’est rendu à la basilique Sainte-Marie Majeure afin de se recueillir sur la tombe du pape François. En raison de la guerre, il n’avait pas pu se rendre à ses obsèques le 26 avril dernier, ni assister à la messe d’installation du pape Léon XIV le 18 mai.
Interrogé par des journalistes devant l’entrée de la basilique, Mahmoud Abbas a confié que lors de ses visites en Italie, il tenait toujours à «visiter d’abord le Saint-Père», et seulement ensuite les autorités italiennes. «Cette fois-ci, je suis d’abord venu rendre visite au pape François, car je ne peux pas oublier ce qu’il a fait pour la Palestine, pour le peuple palestinien. Je ne peux pas oublier que lui, il a reconnu la Palestine sans que cela ne lui soit demandé.» Le chef d’État était accompagné du Père Ibrahim Faltas, vicaire de la Custodie de Terre sainte, qui a fait office de traducteur.
La tragédie de Gaza en toile de fond
Les visites de Mahmoud Abbas au Vatican ont été particulièrement nombreuses sous le pontificat de François. Il avait notamment participé à une cérémonie pour la paix organisée dans les jardins du Vatican le 8 juin 2014 avec son homologue israélien de l’époque, Shimon Peres, deux semaines après la visite du pontife argentin en Terre sainte.
Dans le contexte de la guerre de Gaza débutée par l’offensive du Hamas le 7 octobre 2023, le pape François avait eu des déclarations fortes sur la riposte israélienne, assimilant ces bombardements à du «terrorisme», au regard des nombreuses victimes civiles, et s’interrogeant sur la possibilité d’un génocide. Ses propos avaient suscité une crise diplomatique avec Israël. Plus prudent, Léon XIV n’a pas repris à son compte le terme de «génocide». Il a toutefois exprimé à plusieurs reprises sa compassion pour la «terre martyrisée» de Gaza.
L’actuel président israélien Isaac Herzog a été reçu par Léon XIV le 4 septembre dernier. Dans un communiqué beaucoup plus détaillé que d’habitude, le Vatican avait fait savoir que le pontife avait mentionné la «situation tragique» à Gaza, insistant sur l’importance «d’assurer un avenir au peuple palestinien» en favorisant une solution à deux États, «seule issue à la guerre en cours».
Regain de légitimité pour Mahmoud Abbas
Mahmoud Abbas, qui est à 90 ans l’un des dirigeants les plus âgés de la planète, a été élu en 2005 à la présidence de l’Autorité palestinienne, deux mois après la mort de Yasser Arafat. Son mandat a été prolongé à plusieurs reprises en raison de l’impossibilité d’organiser une nouvelle élection présidentielle.
Il est contesté par une partie de la population palestinienne. Mais depuis quelques semaines, la reconnaissance formelle de l’État de Palestine par la France, le Canada et le Royaume-Uni lui a donné un regain de légitimité internationale.
Bien que les États-Unis ne reconnaissent pas formellement la Palestine comme un État souverain, Donald Trump avait tout de même invité Mahmoud Abbas au sommet de Charm el-Cheikh, en Égypte, le 13 octobre dernier, afin d’entériner son plan pour la fin de la guerre à Gaza. Également présente à ce sommet, la présidente du Conseil italien Giorgia Meloni recevra Mahmoud Abbas le 7 novembre.
Pouvoir limité
Pour le moment, la juridiction de l’État de Palestine ne s’étend que sur certaines communes de Cisjordanie comme Ramallah (la capitale administrative), Jéricho ou encore Bethléem, le lieu de naissance du Christ. La bande de Gaza, administrée par le Hamas, a fait sécession de fait depuis le conflit inter-palestinien de 2007.
Les tensions demeurent très vives dans la région, à la fois en Cisjordanie, en proie aux exactions des colons israéliens, et dans la bande de Gaza, dévastée par deux ans de guerre. Depuis l’entrée en vigueur du cessez-à-feu à Gaza, des frappes israéliennes ont fait au moins 250 morts. Par ailleurs, le Hamas est accusé de détourner l’aide humanitaire et de procéder à des exécutions arbitraires sur ses opposants et des Palestiniens accusés de collaboration avec Israël.
Le pape inquiet d’une situation «très fragile»
Interrogé par des journalistes le 4 novembre à Castel Gandolfo au sujet de la situation en Terre sainte, Léon XIV s’était réjoui du fait que la première phase des accords de paix menés par les États-Unis aille «encore de l’avant». Mais il avait reconnu que la situation était «très fragile». «Il faut voir comment nous pouvons passer à la seconde phase, celle sur le thème du gouvernement, sur la façon dont on peut garantir le droit de tous les peuples», avait-il affirmé à l’avant-veille de son entretien avec le président palestinien.
Évoquant les actions des colons israéliens en Cisjordanie, où les tensions ont été fortes, le pape avait décrit la situation comme «complexe». «Israël avait dit une chose, puis a fait d’autres choses parfois», avait-il commenté, invitant les parties à travailler ensemble pour la justice. (cath.ch/imedia/cv/rz)





