«Une société traumatisée ne peut pas construire une paix durable»
«La paix est notre héritage, la réconciliation est notre voie, l’unité est notre avenir.» Inlassablement, les évêques du Soudan du Sud appellent la population du pays à dépasser les identités tribales et à œuvrer, ensemble, à la reconstruction de la nation, pour guérir des traumatismes. Dernier message en date, celui de Mgr Barani Hiiboro, évêque du diocèse de Tombura Yambio, qui mise sur les jeunes.
La Commission diocésaine Justice et Paix (DJPC) de l’Organisation catholique pour le développement et la paix (CODEP) a organisé début décembre, dans l’État d’Équatoria-occidental, une réunion sur la promotion de la paix, rapporte l’agence Fides. Lors de cette rencontre, Mgr Hiiboro a invité tous les participants – autorités, dirigeants communautaires, représentants de la société civile et délégués des jeunes des dix comtés de cet État – à s’engager ensemble pour le rétablissement d’un climat électoral pacifique au Soudan du Sud.
Depuis février 2025, les conflits locaux dans l’État d’Equatoria-occidental se sont intensifiés, exacerbés par l’instabilité économique. «La paix ne viendra pas d’un seul groupe. Elle viendra de nous tous, main dans la main, cœur à cœur, village par village et comté par comté», a lancé l’évêque, appelant les jeunes en particulier à s’engager dans cette voie. «Nos jeunes ne sont pas une menace. Ils sont la plus grande opportunité pour la renaissance de l’Équatoria-occidental.»
«Des signes de grâce»
«En tant qu’évêque, j’ai traversé des villages encore terrifiés par les conflits passés, a-t-il témoigné. J’ai prié avec des veuves dont les yeux cachent des larmes silencieuses; j’ai écouté des jeunes qui portent le poids de rêves brisés; et je me suis assis avec des personnes âgées qui craignent que la paix ne s’échappe lentement des mains de leurs enfants. Mais j’ai aussi vu des signes de grâce», a souligné le prélat.
«J’ai vu des communautés qui choisissent le dialogue plutôt que la violence, des jeunes qui choisissent le sport plutôt que la vengeance, des femmes qui choisissent la reconstruction plutôt que le désespoir, des personnes âgées qui choisissent la sagesse plutôt que la colère, et l’Église qui s’érige en pont là où régnait autrefois la division.»
Un réseau de jeunes observateurs de la paix
Mgr Barani Hiiboro ainsi appelé chacun à dépasser les identités tribales et à opter pour un dialogue inclusif, où chaque voix compte. Seul ce chemin pourra mener à la guérison des traumatismes, et donc à la réconciliation, souligne le prélat, pour qui «une société traumatisée ne peut pas construire une paix durable».
L’évêque a officiellement annoncé la création pour ce faire d’un réseau qualifié de jeunes observateurs de la paix dans chaque district du pays. Ils travailleront en étroite collaboration avec le DJPC, les chefs, les responsables paroissiaux et les autorités du comté, car «aucune institution ne peut accomplir cette tâche seule », a-t-il conclu.
Les craintes de reprise de la guerre civile
Cet automne, le pays a été marqué par le procès de Riek Machar, ancien vice-président du Soudan du Sud et leader de l’opposition, ainsi que de sept autres responsables de son parti, l’Armée populaire de libération du Soudan-opposition (SPLM-IO), accusés de meurtre, trahison et crimes contre l’humanité.
Depuis l’accord de paix de 2018 – qui a mis un terme à cinq ans de guerre civile meurtrière – signé par Salva Kiir et Riek Machar, le parti au pouvoir du président Kiir, le SPLM, partageait le pouvoir avec le SPLM-IO de Machar et trois autres partis. Ce gouvernement de transition devait mener le pays vers des élections générales. Or celles-ci ont déjà été deux fois reportées. Elles sont actuellement annoncées pour décembre 2026, mais le procès de Riek Machar, toujours en cours, fait craindre une reprise des affrontements armés. (cath.ch/lb)





