L’avis du théologien orthodoxe français Olivier Clément

Kosovo: L’église serbe a-t-elle une responsabilité?

Rome, 24 juin 1999 (APIC) Le théologien orthodoxe français Olivier Clément a réagi aux accusations lancées contre la hiérarchie orthodoxe serbe, que certains accusent d’avoir été complice dans le conflit du Kosovo. Il a répondu aux questions du quotidien catholique «Avvenire», lié à l’épiscopat italien.

«Ce que l’on dit sur la fusion de l’Eglise orthodoxe et de l’Etat est vrai. Surtout en Serbie, reconnaît-il. Mais le Patriarche Pavle a demandé le respect des droits de l’homme et une solution démocratique au problème du Kosovo, et il n’a pas été le seul, des évêques l’ont fait également». Il ajoute: «C’est vrai que dans l’Eglise serbe, pas tous, mais beaucoup, ont soutenu Karadzic et Mladic, lorsque la Serbie menait une guerre d’unification nationale (on ne peut pas oublier l’expulsion des serbes de Krajina). Mais avec l’explosion de la crise au Kosovo, les évêques ont pris leurs distances par rapport au régime, qu’ils ont même critiqué».

L’erreur de l’Eglise orthodoxe serbe, aux yeux d’Olivier Clément, a été «je ne dirais pas d’exalter, mais d’évoquer le mythe du Kosovo comme «terre sainte» de l’orthodoxie. Ce mythe a été utilisé par Milosevic, mais dans le clergé il n’y a jamais eu d’appel à la purification ethnique. Aucun évêque, même parmi les ultra-nationalistes, n’a jamais appelé à une croisade anti-islamique».

Les critiques prétendent cependant que l’Eglise ne s’y est jamais ouvertement opposée. «Si, affirme Olivier Clément. Artemije, de Pristina, a dénoncé la politique du régime, avant Rambouillet, et il a demandé le respect des droits de tous, chrétiens et musulmans». Le théologien français est d’avis que «dans l’Eglise serbe, il y a un conflit très fort entre les ultra-nationalistes qui ont fait du Kosovo un objet d’idolâtrie, et les nationalistes».

Olivier Clément pense que la déclaration de l’Eglise serbe demandant la démission de Milosevic est sans aucun doute une tentative du Patriarche Pavle d’isoler les ultra-nationalistes qui reconnaissent toutefois que Milosevic a conduit le pays dans un abîme.

Le théologien orthodoxe explique que l’Eglise orthodoxe a, selon lui, une très grande difficulté: le mea culpa. «Demander pardon, se repentir, c’est une chose à laquelle elle n’est pas du tout familière. Dans la conception théologique orthodoxe, l’Eglise c’est le Christ (et cela est vrai) mais on n’accepte pas que ce soit aussi le lieu où le Christ est oublié et humilié. Je crois que ce dont l’Eglise orthodoxe a besoin, c’est la capacité de faire son autocritique». (apic/cip/zenit/pr)

24 juin 1999 | 00:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 2  min.
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