Etats-Unis: Les Universités jésuites critiquent la constitution " Ex Corde Ecclesiae «

Des normes inadaptées à la réalité américaine

Washington, 27 juin 1999 (APIC) Les Universités jésuites aux Etats-Unis ne sont pas satisfaites de la constitution apostolique sur les universités «Ex Corde Ecclesiae». Des prêtres de la Compagnie de Jésus qui dirigent les Universités jésuites des Etats-Unis ont manifesté leur opposition à l’application de ce texte de Jean Paul II publié le 25 septembre 1990 déjà. Motif: les directives données par le pape ne sont pas adaptées à la réalité américaine.

Le panel des responsables académiques jésuites était organisé dans le cadre d’une convention nationale des administrateurs jésuites, tenue à l’Université (jésuite) de San Francisco. S’ils n’ont aucune difficulté à rencontrer «l’esprit» du document papal, les présidents des quatre Universités jésuites et celui de l’Association des Collèges et Universités Jésuites (AJCU) des Etats-Unis se sont relayés pour dire – parfois en termes très durs – leur opposition à la mise en pratique des normes dans les hautes écoles jésuites américaines.

Faire pression sur les évêques américains

Si les responsables des Universités jésuites se sont manifestés, près de dix ans après la publication de la constitution apostolique contestée, c’est parce que les évêques américains doivent aborder ce délicat dossier lors de leur prochaine assemblée qui se tiendra à l’automne prochain. Comme l’a admis le Père Charles I. Currie, président de l’AJCU, le panel a été organisé pour faire pression sur une réunion préparatoire à cette assemblée, réunion qui doit se tenir ces 28 et 29 juin pour présenter aux évêques l’ensemble des normes juridiques que le document papal demande d’appliquer aux Etats-Unis.

Dans son exposé, le P. Currie a jugé «à proscrire» la norme qui requiert que la majorité des membres du corps enseignant des Universités catholiques soient des «fidèles catholiques». Selon le jésuite, son application ne manquera pas de provoquer «une chasse aux sorcières» ou de ressusciter des tactiques «policières».

Crainte d’une chasse aux sorcières

Le président de la Regis University de Denver, le P. Michael Sheeran, a émis des réserves plus pragmatiques. A ses yeux, l’application des normes romaines pourrait «mettre en péril» l’aide économique gouvernementale consentie à l’institution, en vertu des lois de séparation Eglise-Etat.» Au Colorado, les lois sont particulièrement «anti-Eglise» et cela pourrait compromettre l’aide», a-t-il déclaré, disant craindre d’être accusé de «ségrégation» au cas où il appliquerait les normes dictées par le pape.

Pour le P. Sheeran, le terme «fidèles catholiques» mériterait d’être précisé, car beaucoup craignent d’être bientôt exclus des universités catholiques, par exemple «les professeurs divorcés remariés ou ceux qui critiquent l’enseignement de l’Eglise en matière de contrôle des naissances ou encore l’application de la doctrine sociale de l’Eglise».

Le P. Currie s’oppose lui aussi à ce que la majorité des enseignants soient des «fidèles catholiques», car, dit-il, «cela pourrait suggérer à ceux qui ne sont pas catholiques qu’ils sont des professeurs de seconde classe». Le président de l’AJCU s’oppose aussi à l’exigence d’une approbation officielle, celle de l’évêque du lieu, pour les professeurs de théologie (la «missio canonica»). «Comment concilier l’autorité de l’évêque avec l’intégrité intellectuelle du théologien ?», demande-t-il. Comme le P. Sheeran, le P. Currie pense que l’application des normes de l’Eglise priverait les universités catholiques des fonds étatiques et fédéraux.

Uniquement pour faire plaisir au pape ?

Le P. Robert Manning, s’étonnant du zèle des évêques américains, fait état de «nombreuses conversations de couloir» présentant l’application des normes de la constitution apostolique comme «une sorte de cadeau au pape à ce moment de son pontificat». Finalement, le P. Curie a indiqué que, pour éviter que beaucoup pensent que l’application des directives papales est «une affaire jésuite», l’Association des Universités Jésuites a décidé d’émettre ses objections dans le cadre de l’Association Nationale des Universités Catholiques, un organisme qui fédère 90 % des universités catholiques nord-américaines. (apic/cip/cx/be)

27 juin 1999 | 00:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 3  min.
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