L’évêque: sa mission et son profil

La nomination de Mgr Bernard Genoud à la tête du diocèse de Lausanne, Genève et Fribourg est l’occasion de rappeler en quoi consiste la fonction de l’évêque. Dans un article publié en 1995 dans «Evangile et Mission», Marc Donzé, professeur de théologie pastorale à l’Université de Fribourg, attirait l’attention sur quelques aspects fondamentaux du rôle de l’évêque dans l’Eglise catholique.

Par son ordination et par la mission que le pape lui confie, l’évêque reçoit une triple charge, ainsi que le pouvoir et l’autorité qui lui permettent de l’accomplir: la charge d’enseigner, de sanctifier et de gouverner.

La charge d’enseigner: pour l’évêque, il s’agit de veiller à ce que l’évangile soit annoncé et vécu dans son diocèse par la prédication, la catéchèse, la présence dans les milieux de vie et la proclamation du Christ mort et ressuscité. Tous ces registres de l’annonce sont le fait de tous les chrétiens. Ils sont assumés aussi au travers de nombreux ministères: catéchistes, évangélisateurs, animateurs, prêtres et diacres. L’évêque, quant à lui, a non seulement le souci de coordonner l’action de son Eglise locale, mais la délicate mission de veiller à la fidélité évangélique et ecclésiale de la parole annoncée. Il est situé en première ligne dans la proclamation de la Parole. C’est même sa charge première, affirme le Concile Vatican II (Lumen gentium 25). Il se doit d’être un homme de communication: il prend publiquement, ouvertement position au nom de l’Evangile et de l’Eglise, et n’hésite pas à avoir recours aux moyens médiatiques appropriés afin de largement diffuser les enseignements du Christ.

La charge de sanctifier, pour l’évêque, c’est d’abord de prier et de célébrer l’eucharistie pour tout le peuple de son diocèse (Lumen gentium 26). C’est aussi de veiller à ce que les fidèles puissent bénéficier de la messe chaque dimanche, un souci qui grandit en une période de pénurie de prêtres. Que l’évêque ait rôle de sanctification exige de lui qu’il devienne un «saint», qu’il se convertisse sans cesse, qu’il prêche l’exemple, qu’il soit un homme de prière et de foi profonde, patient et compatissant avec un peuple toujours en voie de conversion. Il confère aussi certains sacrements particuliers. Il ordonne les prêtres, ministres qui structurent l’Eglise dans son rassemblement eucharistique, ainsi que les diacres, ministres qui structurent l’Eglise dans sa mission vers tous les hommes, en particulier vers ceux qui se situent le plus en marge de la société. Il donne aussi la confirmation.

Gouverner: l’art premier de l’évêque est celui de faire l’unité, de rassembler son peuple au nom du Christ. Il est au service de la communion diocésaine et de la communion du diocèse avec l’Eglise universelle. Or, qui dit communion dit fraternité, entraide, concertation, coresponsabilité, unité dans la foi, l’écoute de la Parole et l’eucharistie. Il veille à l’unité du peuple de Dieu en écoutant ses requêtes, ses projets, ses générosités, en faisant route avec lui. Cet art de l’unité ne signifie pas qu’il n’y ait pas des tâches effectives de gouvernement. L’évêque se soucie de la répartition des ministères ordonnés et laïcs dans son diocèse, et détermine un projet pastoral. Il règle la préparation et la distribution des sacrements. Il convoque les conseils (presbytéral et pastoral) que le droit canonique l’invite à mettre sur pied; il les écoute et travaille avec eux. «Mais toutes ces tâches ne seraient rien, disait saint Paul, sans l’art de l’unité et de la communion en Christ.»

Une triple relation

Par son ordination, par sa triple charge et par les pouvoirs qui y sont liés, l’évêque est constitué en une triple relation par rapport à son diocèse et à l’Eglise universelle: l’apostolicité, la repraesentatio Christi, la repraesentatio Ecclesiae.

L’évêque est successeur des apôtres. De ce fait, il garantit la traversée historique de l’Eglise depuis la Pentecôte jusqu’à nous. Il réalise l’union de toutes les Eglises locales aujourd’hui en une seule communion universelle par le lien collégial qui l’unit avec tous les autres évêques et en particulier avec l’évêque de Rome.

L’évêque a aussi pour mission de rendre présent le Christ à la communauté diocésaine (repraesentatio Christi). Par sa personne, il est le signe «sacramentel» que l’Eglise diocésaine, dans son écoute de la Parole, dans ses célébrations, dans ses ministères et institutions, est rassemblée par le Christ et pour le Christ. Elle le montre précisément dans sa communion avec l’évêque lorsqu’il proclame l’évangile et la foi, quand il confère les sacrements et qu’il envoie en mission, en un mot, quand il agit in persona Christi, quand il communique le Christ à la communauté. Il n’est pas le Christ, bien sûr, mais il s’efface pour laisser transparaître le Christ. S’il ne le fait pas, la manifestation du Christ en lui devient difficilement lisible par la communauté chrétienne. «S’effacer en ce sens, précise Marc Donzé, ce n’est pas devenir évanescent. Au contraire, c’est se laisser saisir par le Christ qui rend la personnalité plus forte, plus assurée, plus originale même, dès lors qu’elle est toute pénétrée de lui.»

L’évêque a encore mission de rendre présente l’Eglise et d’agir in persona Ecclesiae. Parce qu’il est celui qui la rassemble en Christ, il est aussi celui qui préside et la représente. Cette triple relation dénote que l’évêque a un rôle à la fois collégial et local. Evêque d’un lieu, il doit en connaître le peuple, la culture, les élans et les faiblesses. Il doit être capable de manifester la destinée de ce peuple qui, à son tour, doit pouvoir se reconnaître dans ce que l’évêque dit et vit avec lui. (apic/pda)

18 mars 1999 | 00:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 4  min.
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