Moine trappiste séduit par la révolution sandiniste
Nicaragua: Ernesto Cardenal, ancien ministre de la Culture, fête ses 75 ans jeudi
Managua, 17 janvier 2000 (APIC) Le Père Ernesto Cardenal, ancien ministre de la Culture du gouvernement sandiniste du Nicaragua, fêtera jeudi ses 75 ans.
Après la chute du dictateur Somoza et la victoire des sandinistes, le Père trappiste Ernesto Cardenal, un poète connu dans toute l’Amérique latine, est nommé en 1979 ministre de la Culture du gouvernement révolutionnaire.
En 1957, Ernesto Cardenal, issu d’une famille importante et riche du Nicaragua, entre dans le monastère trappiste de Gethsemany dans le Kentucky aux Etats-Unis, attiré par les livres et la personnalité de l’Abbé du couvent, Thomas Merton. Avant son ordination sacerdotale, il étudie la théologie au Mexique et en Colombie. Puis en 1966, il fonde sur une île du lac Nicaragua, Solentiname, une communauté trappiste originale où la contemplation s’allie aux arts (poésie, sculpture et peinture) et où des compagnons réfléchissent aussi avec le futur ministre sur les méfaits du somozisme et la possibilité de participer bientôt à la révolution sandiniste.
Dans les années 80, après la victoire, l’une des consignes principales affichées par les secteurs chrétiens progressistes du Nicaragua avait été: «Entre christianisme et révolution, il n’y a pas de contradiction». Interrogé sur la validité de cette consigne, le Père Ernesto Cardenal a, toute sa vie, répondu affirmativement: «Elle est toujours valable, bien qu’il soit nécessaire aujourd’hui de comprendre que révolution et rénovation sont parfois des termes semblables». Pour Ernesto Cardenal, «le concept même de socialisme» continue d’être pleinement actuel, même s’il faut l’adapter aux «changements mondiaux, par exemple en tenant compte du rôle du marché, mais sans perdre de vue le critère d’équité et de justice sociale».
D’autres «prêtres-ministres», comme son frère Fernando Cardenal, jésuite et ex-ministre de l’Education, ou l’ancien ministre des Affaires étrangères, le Père Miguel D’Escoto, n’ont pas renié leurs premières options politiques, à l’égal de l’ancien moine trappiste rendu célèbre par son sempiternel béret noir, sa barbe blanche, et le fameux geste de monition que le pape Jean Paul II lui avait adressé lors de sa visite pastorale au Nicaragua en 1983.
Fidèle à ses convictions
Ni la situation explosive du Nicaragua, ni les tensions profondes qu’a connu le sandinisme après la défaite électorale, en février 1990, n’ont terni la vision religieuse et politique d’Ernesto Cardenal. Bien qu’il dénoncera sévèrement en 1994 la corruption de certains politiciens sandinistes en leur reprochant d’avoir trahi la révolution des origines, il redit toujours: «Je continue de croire en la révolution et au changement». Il vit actuellement à Managua en poursuivant son rôle d’écrivain et de chrétien révolutionnaire. (apic/kna/ba)