Des bébés meurent en Irak, c’est injustifiable
Irak: Les répercussions de 10 années de sanctions
Par Odilo Noti, Caritas suisse
Bagdad, 27 avril 2001 (APIC) Voici 10 ans, le Conseil de sécurité des Nations Unies a pris des sanctions contre l’Irak. Il entendait renverser ainsi Saddam Hussein. Or, ce régime tient toujours en place. Ces sanctions ont surtout des répercussions désastreuses pour la population: la mortalité infantile a augmenté et les soins médicaux se sont dégradés. De plus en plus d’organisations humanitaires estiment que les sanctions ont manqué leur objectif et qu’elles se trompent de cible.
Le docteur Taha Hamid Al-Askari est médecin en chef dans le plus grand hôpital irakien pour les malades du cancer. Il estime que 8’000 patients sont traités chaque mois dans cette clinique de Bagdad. Le docteur Hamid, qui travaille 15 heures par jour dans des conditions déplorables, est accablé de soucis. D’importants médicaments nécessaires pour les chimiothérapies lui font défaut. Et sur les 7 appareils dont il dispose pour les rayons, 4 ne fonctionnent plus faute de pièces de rechange ou parce que des matières premières telles que le cobalt sont épuisées.
«La pénurie de médicaments est grande, explique le docteur Hamid. Certains instruments nous manquent également et les appareils thérapeutiques devraient être absolument réparés. Cependant les sanctions qui ont été décrétées contre l’Irak voici 10 ans rendent la chose impossible. Le comité des sanctions du Conseil de sécurité a bloqué nos commandes. Il dit que ces matériaux pourraient aussi servir à fabriquer des armes. On nous a même empêchés d’acheter de nouveaux ordinateurs avec cet argument».
Appauvrissement de la classe moyenne
Les sanctions que le Conseil de sécurité des Nations Unies a infligées à l’Irak avaient pour but de provoquer un changement à la tête du pays et d’empêcher le réarmement de l’armée. Mais l’embargo n’a pas eu l’effet voulu: Saddam Hussein est toujours aussi solidement au pouvoir. La présence policière constante et les divisions au sein de l’opposition n’en sont pas les seules responsables.
Les sanctions y ont aussi contribué, en faisant notamment disparaître la classe moyenne. Ce pays qui présentait un haut niveau technologique est retourné au stade de pays en développement. Alors qu’un enseignant gagnait encore 400 dollars voici 10 ans, il en touche à peine 3 aujourd’hui. Mais un peuple qui lutte quotidiennement pour survivre a d’autres soucis que de renverser son gouvernement. Saddam peut par ailleurs, grâce à l’embargo, attribuer la misère de son peuple à l’Occident ou aux Nations Unies. Beaucoup d’experts sont convaincus que les sanctions ont renforcé le régime du dictateur.
La population souffre. La mortalité infantile a par exemple énormément augmenté ces 10 dernières années. L’une des causes en est dans la malnutrition. Il n’y avait en effet pas assez de vivres à disposition et d’importants compléments alimentaires riches en protéines ont fait défaut.
Les sanctions ont également empêché le pays de reconstruire son infrastructure détruite par la guerre et beaucoup de stations d’épuration ne fonctionnent plus. L’eau est polluée et il n’y a plus de chlore pour la désinfecter, car ce produit pourrait être utilisé pour la fabrication d’armes chimiques.
Lever les sanctions
Le Conseil de sécurité a certes légèrement adouci l’embargo pour une durée de 5 ans, par le biais du programme «pétrole contre nourriture» qui autorise l’Irak à exporter du pétrole pour acheter des vivres et des médicaments. Mais la procédure est longue et compliquée. Chaque contrat de livraison que l’Irak conclut avec une entreprise doit être approuvé à New York. Pas moins de 400 observateurs sur place contrôlent que les aliments achetés grâce aux recettes pétrolières sont bien remis gratuitement à la population une fois par mois.
Les organisations humanitaires sont unanimes: c’est en premier lieu la population qui souffre des sanctions. Ces dernières ont par conséquent manqué leur objectif. Une délégation internationale de Caritas a visité le pays en janvier de cette année. Sa conclusion est également sans appel, comme l’explique le président de Caritas Europe, Denis Vienot: «Il faut lever les sanctions pour des raisons humanitaires et traiter autrement les questions politiques qui ont par exemple trait au contrôle des arsenaux d’armes».
Toujours d’après Denis Vienot, les sanctions ont d’énormes conséquences sociales et psychiques: «Elles entraînent la mort des pauvres et des malades, des personnes sans défense et de celles qui sont dans le besoin. Même des bébés qui sont pourtant nés après la guerre meurent. C’est moralement injustifiable». (ot/pr)
Caritas aide les enfants
Le Réseau-Caritas apporte aussi une aide pratique. Il soutient par exemple 14 centres sanitaires dans tout le pays. Des milliers d’enfants victimes de sous-alimentation et de malnutrition y sont traités, afin qu’ils recouvrent leur poids normal en l’espace de 3 à 6 mois. Les mères reçoivent simultanément des conseils en matière d’hygiène et d’alimentation. (ot/pr)
Guatemala: 3e anniversaire de l’’assassinat de Mgr Gerardi
Guatemala Ciudad, 27 avril 2001 (APIC) Trois ans après l’assassinat de Mgr Juan José Gerardi, évêque auxiliaire de Guatemala Ciudad, l’espoir de faire enfin la lumière sur cette pénible affaire repose sur le procès en cours, où comparaissent cinq accusés.
La commémoration de ce troisième anniversaire de la mort du prélat n’a pas empêché l’audience du 26 avril d’avoir lieu, avec l’audition de Ronalth Ochaeta, ancien directeur de l’Office des droits de l’homme de l’archidiocèse (Odha), aujourd’hui ambassadeur du Guatemala auprès de l’Organisation des Etats Américains (OEA).
La défense des trois militaires accusés de l’homicide – le colonel à la retraite Byron Disrael Lima Estrada, ancien responsable des services secrets de l’armée, son fils, le capitaine Byron Miguel Lima Oliva, et l’agent d’Etat-Major présidentiel José Obdulio Villanueva – avait demandé la suspension des débats, arguant de possibles problèmes de sécurité liés à l’affluence prévue dans la capitale à l’occasion de la érémonie de commémoration de la mort du prélat. Les juges n’ont pas accédé à cette requête, mais ont décidé de doubler le nombre des agents chargés de surveiller la salle d’audience.
Mgr Gerardi, évêque auxiliaire de Guatemala Ciudad, a été abattu le 26 avril 1998, deux jours après avoir présenté le rapport «Guatemela nunca mas» (Guatemala plus jamais), qui mettait en évidence les responsabilités des forces armées dans la mort des quelque 200’000 victimes de la guerre civile (1960-1996). Doivent répondre devant les magistrats, outre les trois militaires cités plus haut, le Père Manuel Orantes, l’assistant de Mgr Gerardi, qui partageait sa maison à la paroisse San Sebastian, et la domestique du prélat, Margarita Lopez.
Plus de cent personnes sont appelées à témoigner au sujet du meurtre de l’évêque. à noter que sept personnes soupçonnées d’être impliquées sont mortes dans des circonstances mystérieuses. (apic/cip/mna/pr)