Rome: Le Père Dupuis se sent «plus libre», mais le théologien n’est pas totalement satisfait

«Je ne présente pas ces thèses fausses…»

Rome, 27 février 2001 (APIC) Le théologien belge Jacques Dupuis, réagissant mardi à la «notification» publiée la veille par la Congrégation romaine pour la doctrine de la foi, a déclaré se sentir «plus libre, même s’il y a des choses qui ne me font pas plaisir». Le Saint-Siège avait une nouvelle fois mis en garde contre certaines thèses sur le pluralisme religieux contenue dans la théologie du jésuite Jacques Dupuis, 78 ans.

S’exprimant devant les journalistes qu’il a reçu mardi dans «son» Université au sujet de la «notification» de la Congrégation pour la doctrine de la foi, le théologien belge a confirmé qu’il avait bien signé le document en question. Mais il a précisé – en présence des quatre vice-recteurs de la Grégorienne – qu’il conteste toujours certains points de la doctrine de l’Eglise catholique.

La notification publiée par le Saint-Siège reprend les questions soulevées par le livre du Père Dupuis «Vers une théologie chrétienne du pluralisme religieux» (Paris, Cerf, 1997) qui concernent «l’interprétation de la médiation salvifique unique et universelle de Jésus Christ, l’unicité et la plénitude de la Révélation dans le Christ, l’action salvifique de l’Esprit Saint, l’ordination de tous les hommes à l’Eglise, la valeur et la signification de la fonction salvifique des religions». Le théologien belge a signé la notification le 15 décembre 2000.

Le jésuite conteste certaines interprétations de la Congrégation pour la doctrine de la foi

Les cinq points de cette notification sont développés en deux temps: affirmation des principes de la doctrine catholique (»Il faut croire fermement que…»), puis réfutation des doctrines contraires (»Il est donc contraire à la foi catholique…). «Nous sommes tous d’accord avec la première partie des propositions, mais la seconde est dirigée explicitement contre mon livre, alors que je ne présente pas ces thèses fausses», s’est défendu le jésuite belge. C’est pourquoi il n’a pas signé la première version de la notification – modifiée à trois reprises. «Je ne suis toutefois toujours pas complètement d’accord avec certaines de ces deuxièmes parties», a-t-il ajouté.

Si, par sa signature, qui tient compte à la fois de la notification et de la déclaration «Dominus Iesus» (septembre 2000) sur la place du Christ dans le dialogue avec les autres religions, le Père Dupuis a reconnu les «ambiguïtés» de son livre «Vers une théologie chrétienne du pluralisme religieux», il regrette qu’on ne l’ait pas mis au courant des conséquences à venir. La Congrégation pour la doctrine de la foi lui demande en effet de publier la notification dans les prochaines rééditions du livre ainsi que dans les traductions qui seront faites à l’avenir.

La Congrégation réplique

Après la signature du P. Dupuis, la Congrégation pour la doctrine de la foi a en effet modifié le «préambule» de la notification, qui reprend un bref historique du dialogue, en stipulant que l’auteur devra «s’engager à se conformer aux thèses qui sont exposées dans la notification et à les publier dans les prochaines traductions ou rééditions du livre en question».

Du côté de la Congrégation pour la doctrine de la foi, on estime qu’à partir du moment où le Père Dupuis a signé la notification, c’est qu’il est d’accord avec son contenu, et qu’elle peut donc être publiée dans les prochaines éditions pour «aider le lecteur à interpréter à la lumière de la doctrine catholique, les points doctrinaux mis en doute par le Père Dupuis». Le dicastère considère par ailleurs qu’il est de sa responsabilité de régler les aspects publics de la conclusion du dialogue avec l’auteur.

Après la conclusion du dialogue avec la Congrégation pour la doctrine de la foi, le Père Dupuis a décidé, pour des raisons personnelles, de ne plus continuer à enseigner à l’Université grégorienne, où il enseignait depuis 1984. Il a cessé d’enseigner la christologie en 1998 pour se consacrer à la rédaction de ses réponses aux demandes d’éclaircissement de la Congrégation dirigée par le cardinal Ratzinger. Le Père Jacques Dupuis, connaisseur des religions asiatiques, a vécu en Inde de 1948 à 1984 et a enseigné à la Faculté de théologie de Delhi. Ancien consulteur du Conseil pontifical pour le dialogue inter-religieux, il dirige actuellement la revue théologique «Gregorianum».

La «notification» sur l’ouvrage du Père Dupuis a été approuvée par Jean Paul II le 24 novembre 2000. Dans toute cette affaire, conformément à la procédure prévue, le jésuite belge a été assisté par un autre théologien en qualité d’avocat, le Père Collins, un théologien australien, lui aussi professeur à l’Université grégorienne et auteur de nombreux livres. (apic/imedia/be)

27 février 2001 | 00:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 3  min.
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