Roumanie: Des Eglises dénoncent l’exploitation commerciale du mythe de Dracula

«Dracula donne une fausse image de la Roumanie»

Bucarest, 30 novembre 2001 (APIX) En Roumanie, plusieurs responsables d’Eglise ont dénoncé le projet de parc de 120 hectares – le parc Dracula – destiné à susciter l’intérêt des touristes pour le vampire légendaire de Transylvanie. «Le mythe de Dracula n’a rien à voir avec le peuple roumain ni avec son histoire», déplore Costel Stoica, porte-parole du Patriarcat de l’Eglise orthodoxe de Roumanie à Bucarest. «Né de l’imagination d’un auteur irlandais, il donne une fausse image du pays».

Le prêtre orthodoxe exprimait son indignation après le vote du 19 novembre au Sénat, qui approuvait le développement du parc Dracula près de Sighisoara, dans le nord. Or, dit le prêtre, les responsables d’Eglise orthodoxes n’ont ni été consultés ni informés à propos du projet, qui avait été officiellement rejeté par l’archidiocèse orthodoxe d’Alba Iulia.

Le projet du gouvernement a été aussi condamné par l’Eglise luthérienne minoritaire de Roumanie, pour qui le parc enfreint les règles de protection de l’environnement et alimente l’intérêt des gens pour le surnaturel. «Nous vous exhortons à trouver un autre usage pour les ressources naturelles, historiques et rurales de la région», demande le consistoire de l’Eglise dans un communiqué publié au début novembre. «Les valeurs chrétiennes et humaines, universellement reconnues, sont mises en péril par cette tentative qui vise à promouvoir des loisirs et des jeux fondés sur la cruauté, l’horreur, l’occultisme, et le vampirisme».

Les travaux ont été inaugurés le 5 novembre par le ministre du Tourisme, Dan Agathon. Les promoteurs prédisent que le Parc Dracula va attirer un million de visiteurs par an à Sighisoara, ville médiévale qui figure sur la liste du patrimoine culturel mondial de l’UNESCO.

Pour le prêtre Stoica, le parc est l’une des «idées bizarres» de Dan Agathon, membre du Parti social démocrate, qui manifeste depuis sa prise de fonctions «une certaine hostilité» envers l’Eglise orthodoxe. «Sachant ce que le mythe de Dracula signifie dans les pays occidentaux, il essaie aujourd’hui d’en tirer profit»; a fait remarquer le porte-parole orthodoxe au correspondant de l’agence de presse ENI, en faisant remarquer que ce parc risque «d’encourager l’obsession du surnaturel chez les jeunes».

Le vicaire général de l’Eglise grecque-catholique roumaine, Christian Sabau, a aussi reproché au gouvernement de «tirer profit d’un mythe pernicieux et mensonger», et souligné que l’héritage de Vlad Tepes a été «grossièrement déformé» par la légende de Dracula.

Un personnage inspiré d’un gouverneur connu pour sa cruauté

L’auteur irlandais Bram Stoker, qui a inventé le personnage de Dracula en 1897, se serait inspiré de Vlad Tepes – dit Vlad l’empaleur, gouverneur au 15e siècle de la province de la Valachie et connu pour sa cruauté envers les prisonniers turcs, les nobles indisciplinés et les prêtres orthodoxes. Le prince, dont le nom populaire, Dracula, provient de l’ordre du Dragon (Dracul) établi pour défendre la chrétienté contre les Turcs, a fortifié la future capitale roumaine, Bucarest, avant d’être assassiné. Dans le roman de Bram Stoker, il est mort poignardé.

L’Eglise orthodoxe roumaine n’a pas de «point de vue officiel» concernant Tepes, a souligné le père Stoica. Toutefois, le personnage, en dépit de sa cruauté, a une «image positive» dans l’histoire roumaine, et il est perçu comme un symbole de «justice, fidélité et patriotisme», a ajouté le père Stoica. Il a en effet résisté aux forces étrangères et unifié la Valachie. (apic/eni/bb)

30 novembre 2001 | 00:00
par webmaster@kath.ch
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