Paris: bi-centenaire... du premier culte public protestant (080689)
Paris, 8juin(APIC) «Paris vaut bien une messe», avait déclaré Henri IV
lorsqu’il passa de la «religion réformée» au catholicisme, afin de pouvoir
monter sur le trône de France. Et pourtant, combien d’autres ont «payé de
leur vie et de leur liberté leur volonté de se réunir pour affirmer leur
foi», comme l’a rappelé le président de la République française, François
Mitterrand, dans un message adressé mercredi 7 juin, à la «séance solennelle de commémoration de la première célébration publique du culte protestant
à Paris».
Ce n’est, en effet, que le 7 juin 1789 que quelques dizaines de protestants se réunissaient dans une salle de banquet parisienne, aujourd’hui
disparue, pour y célébrer publiquement le culte protestant, avec la participation du pasteur Paul-Henri Marron, chapelain de l’ambassade de Hollande. Cette initiative brisait deux siècles d’interdit. Et ce n’est que parce
que la Révolution française avait rendu périmé la formule «une foi, une
loi, un roi», qui sacralisait l’Etat en la personne du roi, que le pluralisme religieux put enfin voir le jour en France.
Le 7 juin 1989, dans le grand amphitéâtre de la Sorbonne, à Paris, a
donc été célébré le bi-centenaire de cet événement historique. A l’invitation du pasteur Jacques Stewart, président de la Fédération protestante de
France, une foule nombreuse – majoritairement protestante – s’est rassemblée. Parmi les personnalités présentes figuraient notamment Michel Rocard,
Premier ministre, Pierre Joxe, ministre de l’Intérieur, Mgr Jean-Marie Lustiger, cardinal archevêque de Paris, Mgr Jérémie, président du comité interépiscopal orthodoxe, ainsi que Georgina Dufoix, ancien ministre de la
solidarité, qui donna lecture du message de François Mitterrand.
Le Premier ministre Michel Rocard, lui-même protestant, a rappelé à cette occasion que la France, qui a su faire une place aux minorités que
représentaient alors les protestants et les juifs, doit aujourd’hui «être
particulièrement attentive à faire une place aux nouvelles minorités culturelles» et «tendre la main à travers le temps et l’espace à tous ceux qui,
aujourd’hui, en Afrique du Sud, en Amérique latine, en Pologne et plus tragiquement en Chine, optent eux aussi, avec une détermination impressionante, pour la liberté».
Même tonalité solidaire dans l’intervention du pasteur Jacques Stewart
qui a affirmé: «Nous voulons nous souvenir ensemble d’hier, des illuminations comme des reniements, des fêtes comme des drames, pour tenter de
vivre le présent avec plus d’intelligence et de fidélité».
Controverse et mise au point
La commémoration du bi-centenaire du premier culte réformé public à Paris, avait pourtant suscité auprès d’un certain public des étonnements et
parfois des condamnations. D’aucuns y voyaient une célébration à peine dissimulée et sans nuances, de la Révolution française. Ce qui avait valu de
la part du pasteur Jean-Pierre Monsarrat, président du Conseil national de
l’Eglise réformée de France et prédicateur du culte du 7 juin, une mise au
point dans laquelle il déclarait: «Le culte à l’Oratoire ne sera pas un
culte d’action de grâces pour la Révolution. Nous y célébrons Jésus-Christ»
en insistant sur l’importance du culte comme service rendu par l’Eglise à
la Cité.
Au demeurant, avait ajouté le pasteur Monsarrat, «c’est un fait que
l’Edit de tolérance de 1787 a confirmé la seule légitimité du culte catholique et n’a touché qu’à l’état-civil des réformés. C’est bien la Constituante qui a supprimé toutes les discriminations à l’égard des réformés et
des juifs». S’agissant de la Révolution, il a relevé qu’elle n’est qu’»un
événement historique parmi d’autres et peut, comme tel, faire l’objet d’interprétation diverses, de commentaires contradictoires. Il me semble, a-til conclu, que nous devons, comme chrétiens, garder à son égard une entière
liberté de jugement pour en apprécier les aspects positifs et négatifs».
(apic/bip/mjh/pr)