Stop aux amulettes, talismans, et aux noix de cola!
Arabie Saoudite: Entrée interdite aux Sénégalais porteurs de gris-gris
Riyad, 20 juillet 2003 (Apic) L’Arabie Saoudite a formellement interdit l’accès à son territoire aux Sénégalais porteurs de gris-gris, d’amulettes ou de talismans. Elle en a saisi officiellement les autorités sénégalaises, invoquant des mesures de «sécurité». Le royaume wahhabite a déjà interdit, il y a cinq ans, l’entrée de noix de cola, un produit alimentaire contenant de la caféine.
Dans leur note à leurs homologues du Sénégal, les dirigeants saoudiens annoncent qu’ils expulseront dorénavant de leur pays tout porteur de gris- gris. Cette mesure a été prise au sérieux par le gouvernement sénégalais. Dans un communiqué, le ministère des Affaires étrangères a invité ses compatriotes désireux de se rendre dans les pays arabes du Golfe, tel l’Arabie Saoudite, à se débarrasser préalablement de leurs gris-gris ou talismans.
Le ministre ajoute que «certains ressortissants sénégalais rencontrent régulièrement des difficultés liées au non respect de cette interdiction, conduisant à des arrestations et expulsions». Il attire «l’attention des Sénégalais sur l’obligation de se conformer aux lois et règlement en vigueur dans ces pays afin d’éviter des désagréments durant leur séjour».
Censés apporter le bonheur et protéger du mal
Les gris-gris, talismans ou amulettes sont censés procurer le bonheur ou protéger leur porteur contre le mal. Ils font partie de la culture des Africains au sud du Sahara. Dans des pays comme le Sénégal, la Gambie, ou encore la Guinée Bissau, la Guinée, entre autres, pays à forte majorité musulmane, les gris-gris font parties du quotidien. Ils sont portés autour du cou, de l’avant-bras, des reins ou de la cheville.
Les gris-gris d’inspiration islamique contiennent des versets du coran écrits sur papier blanc, puis entourés d’une peau d’animal, soigneusement cousue par un cordonnier. Ceux de tradition animiste sont confectionnés avec des cornes (biche, buffles,.) ou peaux d’animaux sauvages ou domestiques. Ils contiennent parfois des racines et poudres de plantes. Certains travaux de confection de gris-gris sont soumis à des conditions strictes. Le cordonnier qui les confectionne ne doit pas parler aux autres, aller aux toilettes ou encore serrer la main pendant toute la durée de confection du gris-gris. Il est payé pour une somme modique qui atteint rarement les 2000 francs Cfa (5 francs suisses).
Incompatibles avec la pratique de l’islam
Les islamologues déconseillent l’usage des gris-gris, amulettes et talismans. Leur port n’est pas compatible avec une pratique saine de l’islam, indiquent-ils. Chaque année, à l’occasion du Haj (pélerinage aux lieux saints de l’islam), la police et la douane saoudiennes consignent les gris-gris à l’aéroport de Djeddah, rappelle El hadj Moustapha Guèye, secrétaire général de l’Association des Imams du Sénégal. «Les contrevenants sont expulsés après leur avoir fait purger une peine de prison», a-t-il ajouté dans une déclaration au quotidien de Dakar «Scoop».
Pour sa part, Elimane Ndiaye, secrétaire administratif et permanent de la même association, a relevé que les Saoudiens dont le pays a été frappé récemment d’un attentat meurtrier qui a fait plusieurs morts, se méfie maintenant des «choses bizarres». «Les kamikazes peuvent dissimuler des bombes dans des ceintures ressemblant à des gris-gris,».
Des hommes d’affaires sénégalais porteurs de gris-gris ont déclaré avec résignation, accepter la mesure des dirigeants saoudiens. Cependant, a noté l’un d’eux, l’islam est «une religion souple et chacun a sa propre interprétation du port ou non du gris-gris». (apic/ibc/bb)