Mais dans un cadre très limité et dans des situations d’urgence

Rome: Le cardinal Cottier favorable à l’utilisation du préservatif dans la lutte contre le sida

Rome, 1er février 2005 (Apic) Le théologien suisse de la maison pontificale est favorable à l’utilisation du préservatif dans la lutte contre le sida, dans un cadre très limité et dans des situations d’urgence. Une déclaration peu ou prou semblable du secrétaire de la Conférence des évêques d’Espagne avait valu à ce dernier les critiques des évêques et du «ministre de la Santé» du pape.

Dans un entretien accordé à l’agence de presse italienne Apcom, reprise par le quotidien italien «Il Corriere della Sera» en date du 31 janvier 2005, le cardinal Georges Cottier, théologien, estime en effet que l’utilisation du préservatif peut être «légitime». Cela dans certains cas et certaines limites très strictes, dans la lutte menée contre le sida.

Interrogé à Rome par l’Apic, le cardinal précise que ses propos étaient «strictement personnels» et n’engageaient aucunement le Saint- Siège.

Le cardinal suisse, qui a la charge de relire du point de vue doctrinal les textes signés ou lus par le pape, a affirmé que l’usage du préservatif «peut être considéré comme légitime» dans certaines circonstances particulières, mais seulement dans certaines». En particulier lorsque les gens sont «prisonniers» d’une «situation» d’épidémie et que n’est plus praticable «la voie normale» et la «plus sûre» de l’éducation à la «sacralité du corps humain».

«Dans des situations particulières, poursuit le cardinal Cottier, et je pense aux endroits où circule tant de drogue, où existe une grande promiscuité humaine à laquelle est associée une grande misère, comme par exemple dans des zones de l’Afrique ou de l’Asie». Voilà aux yeux du cardinal des cas dans lesquels l’usage du préservatif peut être «considéré comme légitime».

Pour le cardinal, la nature même de cette terrible maladie peut légitimer l’usage du préservatif. «Le virus se transmet à travers un acte sexuel et ainsi à côté de la vie, il y a le risque de transmettre aussi la mort. Et c’est de ce point de vue qu’est valable le commandement ’tu ne tueras point’. On doit respecter la défense de la vie avant tout».

Cette ligne «est soutenue par plusieurs théologiens, explique le haut prélat, bien que tous ne soient pas d’accord avec cette position à la base de laquelle il y a la protection de la vie». Mais, souligne clairement le cardinal, «la meilleure voix pour lutter contre la contagion demeure la chasteté et l’éducation. L’usage du préservatif contribue à diminuer le risque de contagion».

Les réalités africaines

«Il est clair que dans ce contexte, ce n’est pas la permissivité sexuelle qui est encouragée. Plus exactement, on tente de préserver la vie de la mort», a-t-il insisté.

Le théologien du pape souligne que ces dernières années «les conférences épiscopales africaines qui ont critiqué les campagnes de lutte contre le sida des organismes internationaux favorables à l’usage du préservatif ne sont pas peu nombreuses». Malheureusement, poursuit-il, «ce sont des campagnes qui reflètent la situation culturelle générale empreinte d’une grande permissivité dans le champ des pratiques sexuelles».

Pour le cardinal suisse, le préservatif n’est cependant pas «le meilleur moyen» pour endiguer l’épidémie. A la base de ces campagnes, relève-il encore, il y a une vision globalisatrice d’une sexualité non conforme à la dignité humaine. Ce phénomène, on peut le noter au Nord comme au Sud, dans la publicité, dans les images de la télévision, dans la production cinématographique.

En définitive, «la lutte contre le sida finit pas encourager ce qu’à l’inverse elle voudrait combattre. N’oublions pas que c’est la permissivité qui est un facteur indubitable de diffusion du virus».

Enfin, le cardinal rappelle que Jean Paul II ne s’est jamais prononcé au sujet du préservatif, ni dans ses discours, ni dans ses documents. «Il a au contraire toujours insisté sur les valeurs, le respect de l’autre, sur la signification du mariage, de la chasteté, sur le respect de son propre corps, sur l’importance de la vie humaine et de sa protection».

La question de l’usage du préservatif est au centre de nombreux débats au sein de l’Eglise catholique, a admis le cardinal Cottier au cours de son entretien à l’Apic. «Les points de vue, dit-il, peuvent être différents.

Déjà le cardinal Danneels en 2004.

En janvier 2004, le cardinal Godfried Danneels, archevêque de Malines- Bruxelles, avait admis à la télévision hollandaise que l’usage du préservatif par les personnes séropositives était un moindre mal, tout en préconisant la fidélité dans le mariage ou l’abstinence. Des propos que le cardinal belge avait déjà étayé lors d’une conférence de presse le 15 octobre 2003 pour le jubilé d’argent de Jean Paul II.

Dernièrement, la Conférence épiscopale espagnole a démenti, le 19 janvier 2005, les propos de son porte-parole reconnaissant au préservatif «un rôle dans la prévention intégrale et globale du Sida». Mgr Juan Antonio Martinez Camino a toutefois affirmé le lendemain que le préservatif «devrait être utilisé par les personnes n’étant pas capables d’avoir une relation stable, tout en ayant conscience qu’ainsi on ne se protège pas totalement».

«Pour moi, les trois cas indiqués par le secrétaire de la Conférence épiscopale espagnole – ceux qui ne s’abstiennent pas, ceux qui n’en sont pas capables, ou ceux qui ne peuvent être fidèles à une relation sexuelle au sein d’un couple stable – comme requérant licitement l’utilisation du préservatif en tant qu’ultime option, sont inacceptables», avait répondu le cardinal mexicain Lozano Barragan, président du Conseil pontifical de la santé, le 21 janvier. (apic/imedia/hy/pr)

1 février 2005 | 00:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 4  min.
Partagez!