Rome: Un pèlerinage sans pareil auprès de la dépouille mortuaire d’un pape

La ville éternelle en «Etat d’urgence»

Rome, 6 avril 2005 (Apic) Depuis la translation du corps de Jean-Paul II dans la basilique Saint-Pierre lundi dernier, 4 avril 2005, et l’annonce des funérailles du pape défunt le 8 avril prochain, le flot de fidèles n’a cessé d’augmenter aux alentours du Vatican. Plusieurs millions de personnes sont attendues à Rome pour la seule journée de vendredi. La ville, assiégée, crie au secours, et déclare l’»Etat d’urgence».

«Si tu vas à Rome pour un hommage au pape, utilise les transports collectifs, prépare-toi à des queues organisées mais très longues. Chaud de jour et froid la nuit», peut-on lire dans les sms envoyés sur les téléphones portables italiens par les services d’ordre romains.

A la gare de Termini, que le maire Walter Veltroni a décidé de rebaptiser «Jean Paul II», les pèlerins arrivent en masse. Arrivés à la station de métro «Ottaviano San Pietro», les groupes descendent, en masse, des drapeaux indiquant les provinces italiennes dont la plupart sont originaires. Il faut alors jouer des coudes pour avancer vers le Vatican, qui n’est pourtant pas si proche.

Çà et là, un Italien vend son quotidien avec un dossier «spécial Jean Paul II» ou «spécial Conclave». Les kiosques à journaux de la Via della Conciliazione comme ceux dans l’environnement du Vatican sont en effet souvent inaccessibles, du fait des barrières.

On passe alors devant des tentes et des ambulances de premier secours, très utile pour pallier aux malaises des pèlerins qui doivent attendre une dizaine d’heures pour avoir accès à la Basilique Saint-Pierre. Pour ceux qui ont eu la chance de le faire.

Les rues avoisinant le Vatican sont pleines. Les services de sécurité canalisent le flot de pèlerins obéissants. Un «serpent» de près d’un million de personnes se déroule sur plusieurs kilomètres dans les rues adjacentes à la Via della Conciliazione, celle qui conduit à la Basilique vaticane. Si bien que les résidents ont dû mal à accéder à leur propre logement.

La «fête» aux appareils numériques et téléphones portables.

Au début de la file, les fidèles sont enthousiastes. Les groupes de jeunes entonnent les hymnes des JMJ – Journées Mondiales de la Jeunesse – comme celui de l’Emmanuel des JMJ de Paris en 1997, ou scandent des «Giovanni Paolo». Puis, au fur et à mesure, les pèlerins sont gagnés par le recueillement, éprouvés par cette longue et patiente marche, une sorte de chemin de croix. Sur leur passage, on leur distribue de l’eau. Mais il est difficile de sortir de la foule sans risquer de perdre sa place.

Adultes, familles, jeunes, ecclésiastiques et enfants sont prêts à passer une nuit ou une journée dehors, pour, comme ils le disent eux-mêmes, «rendre un dernier hommage au pape» ou «l’accompagner dans sa mort». Soutenus par la lecture de textes bibliques, de prières ou de chants retransmis par les haut-parleurs installés sur leur chemin, les pèlerins pénètrent finalement dans l’enceinte sacrée de la basilique après 8 à 10 hures d’attente. Là ils doivent encore faire quelques mètres dans le plus grand recueillement avant d’apercevoir la dépouille mortuaire de Jean Paul II.

Le pape, sur son catafalque vert pale, repose en paix dans ses vêtements rouge et blanc. Après avoir reçu des soins, le corps ne semble plus qu’une statue de cire. Mais suffisamment expressive pour émouvoir les fidèles, qui parfois s’arrêtent plus loin, une larme à l’oeil. Certains membres de la curie ou malades de l’Unitalsi – Union nationale italienne de transport des malades – privilégiés peuvent rester plus longtemps. Des milliers d’appareils numériques ou de téléphones portables se dressent aussi pour prendre une dernière photo du pape.

Derrière le baldaquin de Saint-Pierre, devant lequel le corps est exposé, une messe est régulièrement célébrée dans l’abside par quelques évêques et prêtres.

.Mais aussi la «fête» pour les commerçants

A la sortie de la basilique, au pied statues de saint Pierre et saint Paul dressées un peu plus loin, ont été affichés témoignages, cartes postales religieuses et dessins d’enfants, en signe de dévotion.

Les magasins avoisinant vendent aussi affiches, cartes postales et autres pieux objets aux couleurs de Jean Paul II. Les cafés aussi ont affiché des images du pape polonais encore jeune. Dans les rues de Rome, on peut aussi lire «N’ayez pas peur» sur les photos placardées.

Mercredi, le Vatican annonçait qu’un million de personnes étaient déjà passées dans la basilique, selon les données du Département de la protection civile italienne, de la Commune et de la Préfecture de Rome. 600’000 autres pèlerins étaient attendus aujourd’hui. Près de 15’000 personnes défilent toutes les heures devant la dépouille. La foule est si nombreuse, que dès ce soir, l’accès à la queue devrait être interdit. La basilique fermera en effet jeudi 8 avril 2005 à 20 heures, afin de préparer la dépouille et la basilique à la cérémonie des funérailles du lendemain matin. Les Musées du Vatican seront également fermés pour les funérailles. Toutes les visites guidées aux Jardins du Vatican sont suspendues jusqu’à la fin du Conclave, tout comme l’accès à la Chapelle Sixtine.

Plusieurs millions de personnes sont attendues vendredi 8 avril au matin, dont beaucoup de Polonais. Le chef de la protection civile italienne a donc invité dès aujourd’hui les Romains à ouvrir leur maison pour aider à l’hébergement. Vendredi, la circulation automobile sera interdite dans les rues de Rome, sans doute aussi pour laisser le passage aux nombreuses délégations officielles politiques et diplomatiques attendues au Vatican. Des représentants des différentes religions, bouddhistes, musulmans, juifs, sikhs se sont annoncés pour les funérailles. Hélicoptères et avions antiterroristes ont donc été affrétés pour la sécurité de la ville de Rome.

Ces personnalités seront d’ailleurs sans doute les seules à avoir accès à des places privilégiées pour les funérailles. Aucun ticket n’a été attribué et ne sera a priori attribué pour la messe. Ceux qui seront loin de la Place Saint-Pierre devront suivre la cérémonie sur les écrans géants installés dans toute la ville de Rome.

«Une mer d’amour»

Des personnes du monde entier sont attendues à partir de ce jeudi. Des jeunes étrangers se promènent déjà avec leur tente sur le dos. «Une mer d’amour» titre le quotidien italien Avvenire dans un de ses articles en référence à ce raz-de-marée. «Pour Jean XXIII aussi il y avait une foule de personnes», raconte Pina, une Romaine d’une cinquantaine d’années. «Car comme Jean Paul II, c’était un pape accessible et d’une humilité exemplaire». «Je me sens mal, de l’intérieur», explique pour sa part le jeune photographe officiel du pape.

En attendant, le diocèse de Rome organise de nombreuses initiatives de prière quotidiennes dans les paroisses.

L’»Amérique s’agenouille» devant Jean Paul II

Trois présidents américains se sont agenouillés devant la dépouille mortelle de Jean Paul II dans la basilique Saint-Pierre de Rome en toute fin de journée, le 6 avril 2005. A peine descendu de l’avion en provenance de Washington, le président en exercice des Etats-Unis, Georges W. Bush, est arrivé dans la basilique vaticane, accompagné de son épouse Laura, de son père l’ancien président Georges Bush, d’un autre ancien président, Bill Clinton, et de la secrétaire d’Etat Condoleezza Rice.

Selon des informations recueillies à Rome, l’acteur de cinéma américain Jim Caviezel devrait à son tour passer devant la dépouille mortelle du pape dans la journée du 7 avril 2005. Cet acteur de 36 ans, qui a tourné dans une douzaine de film, est récemment sorti de l’ombre en interprétant le rôle de Jésus dans le film controversé ’La passion du Christ’ de Mel Gibson (apic/imedia/ar/ami/pr)

7 avril 2005 | 00:00
par webmaster@kath.ch
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