Le retour de la messe en latin en filigrane

Lourdes: Début des travaux de la 43e Assemblée de la Conférence des évêques de France

Lourdes, 5 novembre 2006 (Apic) La 43e Assemblée plénière de la Conférence des évêques de France (CEF), qui se tient du 4 au 9 novembre à Lourdes, a commencé ses travaux samedi dans la cité mariale. C’est le cardinal Jean-Pierre Ricard, archevêque de Bordeaux et président de la CEF, qui a ouvert l’Assemblée réunissant quelque 130 évêques par ces mots: «Confiance ! C’est moi, n’ayez pas peur !» (Mt 14,27).

Si trois importants dossiers officiels figurent à l’ordre du jour de cette Assemblée, la question du retour de la messe en latin est en filigrane des travaux des évêques. D’ailleurs si la délicate question de la messe traditionnelle en latin n’était pas officiellement à l’agenda, Mgr Ricard l’a abordée dès l’ouverture. Dans son discours d’introduction aux travaux des évêques, il a tenu à les rassurer: l’Eglise catholique garde le cap des réformes engagées depuis plus de quarante ans et n’y aura pas de libéralisation arbitraire ni immédiate de la messe traditionnelle en latin.

L’Eglise ne change pas de cap

Les évêques de la province ecclésiastique de Besançon et les évêques des diocèses concordataires de Strasbourg et de Metz ont exprimé fin octobre leurs vives inquiétudes à propos des récentes décisions romaines concernant la création dans l’archidiocèse de Bordeaux de l’Institut du Bon Pasteur visant à accueillir des prêtres traditionalistes exclus de la Fraternité saint Pie X et l’éventualité de la publication d’un Motu Proprio du pape Benoît XVI qui généraliserait la célébration de la messe St Pie V, selon le rite tridentin.

Face aux inquiétudes grandissantes concernant la lecture du Concile Vatican II – notamment du côté de Rome – le cardinal Ricard a tenu à rassurer: «Je crois qu’il ne faut pas être habité aujourd’hui par la crainte et la peur. Là aussi, vivons la confiance. Pourquoi les événements récents ne seraient-ils pas l’occasion, pour nous en France, de faire une relecture paisible de notre réception du Concile, d’en relire les grands textes fondateurs, d’en saisir à nouveaux frais les grandes intuitions et d’en repérer les points qui méritent encore d’être pris en compte ? Ce n’est pas à une lecture idéologique de Vatican II que nous sommes appelés mais bien à une relecture spirituelle, dans l’action de grâce de ce que le Seigneur nous a donné de vivre et dans une disponibilité renouvelée pour la mission».

En avril dernier, les évêques français avaient souhaité poursuivre, lors de cette Assemblée de novembre, leur réflexion sur l’accueil des prêtres et des fidèles traditionalistes dans l’Eglise. «L’actualité de ces dernières semaines a donné à ce sujet une tout autre ampleur. Avec la création de l’Institut du Bon Pasteur, le 8 septembre dernier, puis avec l’annonce, dans les médias, d’une libéralisation possible de l’autorisation de célébrer la messe d’avant la réforme conciliaire, une émotion profonde, tant chez les prêtres que chez les laïcs, s’est exprimée dans nos diocèses», a reconnu Mgr Ricard.

Pas de relativisation des orientations conciliaires

Certains se sont demandés si cet accueil de groupes ayant toujours refusé l’enseignement du Concile Vatican II et sa réforme liturgique ne venait pas relativiser les orientations conciliaires et remettre en question tout le travail apostolique fait sur le terrain depuis une quarantaine d’années, a-t-il poursuivi. Les évêques des provinces de Rouen et de Besançon ont senti le besoin de répondre publiquement à l’interrogation de beaucoup. «Il nous faudra prendre du temps en Assemblée pour revenir et échanger sur tout cela».

Mgr Ricard – qui a été reçu en audience privée par Benoît XVI le 26 octobre et qui a discuté avec les instances romaines de la question du rapprochement de Rome avec les fidèles intégristes – a encore relevé que la décision de libéraliser pour les prêtres la possibilité de dire la messe selon le missel de 1962 n’a pas encore été prise. «Le Motu proprio annoncé n’a pas été signé. Son projet va faire l’objet de consultations diverses. Nous pouvons faire part, dès maintenant, de nos craintes et de nos souhaits».

Le président de la Conférence des évêques de France a tenu encore à rassurer: «Ce projet ne s’inscrit pas dans une volonté de critiquer le missel dit de ’Paul VI’ ni de procéder à une réforme de la réforme liturgique. Les livres liturgiques rédigés et promulgués à la suite du Concile sont la forme ordinaire et donc habituelle du rite romain. Ce projet s’origine plutôt dans le désir de Benoît XVI de faire tout ce qui est en son pouvoir pour mettre fin au schisme lefevbriste. Il sait que plus les années passent, plus les relations se distendent et les positions se durcissent».

Et Mgr Ricard de souligner que devant l’histoire des grands schismes, «on peut toujours se demander s’il n’y a pas eu des occasions manquées de rapprochement. Le pape souhaite faire son possible pour que la main soit tendue et qu’un accueil soit manifesté, au moins à ceux qui sont de bonne volonté et qui manifestent un profond désir de communion. C’est dans cet esprit qu’il faut comprendre ce projet de Motu proprio».

Pour l’archevêque de Bordeaux, l’accueil de quelques-uns dans la communion ecclésiale ne saurait remettre en question le travail pastoral de l’ensemble. «Non, l’Eglise ne change pas de cap. Contrairement aux intentions que certains lui prêtent, le pape Benoît XVI n’entend pas revenir sur le cap que le Concile Vatican II a donné à l’Eglise», a-t-il lancé. Le pape s’y est engagé solennellement dès son élection, en reprenant l’affirmation du pape Jean Paul II qualifiant le Concile Vatican II de «’boussole’ selon laquelle nous pouvons nous orienter dans le vaste océan du troisième Millénaire (cf. Lettre apostolique Novo millennio ineunte, 57-58)».

Les thèmes de la 43e Assemblée plénière de la Conférence des évêques de France

correspondent aux trois groupes de travail, mis en place par les évêques en novembre 2005 sur proposition du Comité études et projets, portant respectivement sur «Les différences structurantes de la vie sociale», «La mission de l’enseignement catholique dans l’Eglise et dans la société» et «Le ministère des prêtres et la vie des communautés chrétiennes».

Dans son discours d’ouverture, le président de la Conférence épiscopale a encore évoqué «les futures échéances électorales, occasion de réfléchir sur notre société», en mentionnant le message du Conseil permanent de la Conférence des évêques de France à l’occasion des élections, publié le 18 octobre 2006, et intitulé  » Qu’as-tu fait de ton frère». Incitant à la confiance intérieure qui permet de prendre du recul et d’analyser les situations plus rationnellement, Mgr Ricard a souligné que «l’engagement de tous dans la préparation de cet avenir est aussi souhaitable qu’indispensable». (apic/com/cef/be)

5 novembre 2006 | 00:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 5  min.
Partagez!