Maroc: Table ronde sur le dialogue interreligieux pour montrer «le Maroc pluriel»
Pluralité religieuse dans le Royaume chérifien
Casablanca, 7 octobre 2007 (Apic) Religieux, sociologues, psychologues et chercheurs du Maroc soulignent l’importance du dialogue interreligieux dans leur pays. Lors d’une table ronde de la Bibliothèque nationale (BN) organisée à l’occasion du ramadan, ils se sont félicités de la pluralité religieuse dans le Royaume chérifien.
La rencontre qui s’est tenue avait pour thème: «le dialogue interreligieux aujourd’hui au Maroc», rapporte la semaine dernière le quotidien marocain «Libération» paraissant à Casablanca. Pour le directeur de la BN, Driss Khrouz, c’est un débat important, intéressant, mais aussi «périlleux». Il fallait «prendre le risque de parler de la religion, des valeurs partagées ou non confisquées par l’idéologie et la politique». S’il n’y a pas de dialogue des religieux, «ce sont les sociétés, traversées, confisquées et instrumentalisées par le politique qui privilégient le retour vers le passé en confisquant l’avenir», a-t-il déploré.
Le rapport entre religion et politique s’est retrouvé en filigrane des différentes interventions, Pour sa part, Faouzi Skali, sociologue, a dénoncé l’amalgame et l’instrumentalisation de la religion. Rita Khayat, un anthropologue, a préconisé la réintroduction de la dimension humaine et affective dans l’acte de croire.
Le Père Jacques Levrat, prêtre Fidei donum depuis plus de trois décennies au Maroc et représentant de l’Eglise catholique, a relevé que l’on ne trouve la vérité qu’en pratiquant l’hospitalité et en accueillant l’autre, «en découvrant le meilleur de l’Autre, cet autre qui est à l’image de Dieu». Installé à Béni Mellal, ville universitaire et centre dynamique de la région Tadla-Azilal, le Père Jacques Levrat est l’auteur du livre «La force du dialogue». Le prêtre plaide pour le respect mutuel des religions et des civilisations. Docteur en théologie en 1984 et cofondateur du GRIC (Groupe de Recherches Islam-Chrétien) à Rabat, le Père Jacques Levrat invite au partage, à l’écoute et à l’échange, car «tant que nous restons limités à nos petits univers, la peur et la méfiance nous paralysent».
Le dialogue interreligieux, une relation, et non une fusion
A ses yeux, le dialogue interreligieux, vécu comme une relation, et non comme une fusion, ne conduit pas à un quelconque syncrétisme fade. «Au contraire, assumer la différence renvoie le chrétien que je suis au coeur de sa foi, au coeur du mystère divin, à un Dieu qui vit au plus intime de Lui-même la kénose». Certes, admet-il, l’écoute, le questionnement ne dispensent pas d’une approche plus intellectuelle, plus abstraite de l’Autre, de sa culture, de sa religion. «Notre bagage intellectuel en ce domaine se limite, parfois, à quelques stéréotypes, quelques clichés… C’est pourquoi le travail intellectuel – selon les dons de chacun – est indispensable pour connaître la tradition de l’Autre et en découvrir les richesses».
Cela a été bien exprimé, du point de vue musulman, par un penseur tunisien contemporain, Abdelmajid Charfi, qui a écrit: «Les Musulmans ne pourront rentrer dans la paix, dans la construction d’un monde fraternel, s’ils ne relisent pas leur histoire». Cette réflexion est valable pour toute société, estime le Père Jacques Levrat, «car le travail intellectuel nous libère de nos a priori, de nos idées toutes faites. Idées qui parfois se structurent en système clos, en idéologie».
Le Père Jacques Levrat est né, à Lyon, en 1934. Ordonné prêtre en 1960, il se met quelques années au service de l’Eglise de Lyon, et, en 1967, il est envoyé au service des chrétiens travaillant en coopération au Maroc. Il devient, en 1973, vicaire général de Mgr Jean Chabbert, archevêque de Rabat. Il sera également vicaire général de Mgr Hubert Michon de 1995 à 2000. En 1980, il est nommé Directeur de la Source, un centre de recherche et de documentation. (apic/com/ibc/be)